Chez Chrysler, une course à la rationalisation depuis la crise

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usine Jefferson North de Detroit (Photo : Bill Pugliano)

[11/08/2012 07:02:57] DETROIT (Etats-Unis) (AFP) Depuis que Chrysler est sorti de la faillite il y a trois ans, le constructeur automobile a entrepris un effort de rationalisation de sa production passant par une multitude de petites mesures qui portent leur fruits, plus que par une véritable révolution technologique.

“La première fois que je suis venu” à l’usine de Jefferson North de Detroit (Michigan, nord) “j’ai demandé: Charles Dickens, il est à gauche ou à droite?”, plaisante le directeur de la communication de Chrysler, Gualberto Ranieri.

Depuis, cette usine Chrysler a fait peau neuve. Les couloirs sont propres et bien éclairés, l’entrée est décorée d’un poster géant barré des quatre lettres “Jeep”, l’une des marques maison, où apparaissent en mosaïque les visages de milliers d’ouvriers du site.

“On veut l’apparence d’un magasin Apple. Cela fait que les gens veulent venir travailler ici”, explique Scott Tolmie, l’un des responsable du centre de formation des employés, le WCM Academy, inauguré en janvier.

Le WCM, ou World Class Manufacturing, c’est la méthode de production mise en oeuvre par Fiat depuis trois ans et déjà utilisée par son partenaire italien Fiat et d’autres entreprises, comme les pâtes Barilla ou le Royal Mail.

Il s’inspire de la méthode “lean” (maigre) du numéro un mondial de l’auto, Toyota, qui fait essentiellement la chasse au gâchis de matériaux, de temps, d’efforts, en misant sur l’engagement des employés.

“Je suis le WCM”, lit-on sur des posters géants dans les couloirs de Jefferson North, qui produit deux 4×4, la Jeep Grand Cherokee et la Dodge Durango.

Pour les ouvriers, le WCM signifie de nouvelles tâches, comme nettoyer soi-même son poste de travail ou repeindre ses machines pour les garder “comme au premier jour”.

Les salaires, moitié moins élevés qu’avant la crise pour les nouveaux ouvriers, font partie des sacrifices consentis.

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usine Chrysler de Jefferson North de Detroit, en avril 2011 (Photo : Bill Pugliano)

“Il y a trois ans, on sortait d’une faillite. Si on voulait garder notre emploi, il fallait que des choses changent”, souligne l’ouvrier qualifié Robert Figloli, 20 ans de maison et vice-président de la section locale du syndicat UAW.

“Les ouvriers viennent travailler avec une meilleure attitude, ont plus de choses à dire sur leur travail. Et maintenant, la hiérarchie les écoute”, ajoute-t-il.

L’engagement des ouvriers a donné lieu à des centaines de suggestions, comme un changement d’orientation d’écrans pour ne plus avoir à se pencher, ou l’utilisation de “limousines”, nom emphatique donné à des chariots qui transportent les équipements sur la ligne d’assemblage, évitant aux ouvriers de se déplacer inutilement.

Au centre de formation WCM Academy, les ouvriers s’exercent à la fois sur des outils high-tech, comme une combinaison équipée de capteurs pour analyser les mouvements ou des casques de visionnage en 3D, ou basiques comme des légos ou des cartes, pour s’exercer à la résolution de problèmes.

Le WCM, qui selon Fiat a fait économiser 250 millions d’euros au groupe au premier semestre, ne mise pas forcément sur l’automatisation.

La robotisation est déjà très avancée dans le secteur: des machines font plus de 90% du travail de pré-assemblage chez Chrysler comme chez Ford, mais l’assemblage final d’une voiture se fait encore largement à la main.

“Dans les années 80, on voulait des usines 100% automatisées. Ca n’a pas marché”, affirme Gualberto Ranieri.

Il cite en exemple l’usine la mieux notée du groupe selon les critères WCM: Bursa, en Turquie, où de nombreuses tâches automatisées ailleurs sont encore faites à la main.

Chez Ford, la recherche de productivité s’appuie sur la flexibilité: “on met en place des outils pour travailler sur plus d’un modèle” dans une même usine, en utilisant une même architecture, explique le porte-parole Todd Nissen.

L’automatisation se poursuit chez Ford, mais en amont, grâce à la simulation électronique: “Ca permet d’éviter beaucoup de problèmes sur la chaîne de production”, conclut M. Nissen.