Tunisie – Médias : Un code de conduite pour plus d’indépendance de la TV nationale

tlevision-1-040512.jpgUn projet de code de conduite pour la télévision nationale a été présenté, ce 4 mai 2012, par son directeur général, Adnane Khedher. Un projet qui a été lancé depuis février dernier en partenariat avec BBC Media Action et un ensemble de journalistes tunisiens, et dirigé par Maher Abderrahmen, un expert en médias, et Najla Amri, directrice régionale de la BBC.

La télévision nationale, qui a subi des critiques de toutes parts et de tous genres, semble avancer vers une réforme intérieure qu’elle veut guider toute seule. Une réforme qu’elle veut collective et solidaire. «C’est un document de référence pour garantir l’indépendance de l’entreprise médiatique. Nous allons le présenter à tous les journalistes et employés de la télévision», indique M. Khedher.

De la déontologie…

Pour l’expert Maher Abderrahmen, il y avait des difficultés à démarrer le projet au début. «Il n’y avait pas une bonne compréhension de ce que signifie le code de conduite. C’est compréhensible parce que cette question était toujours le chaînon manquant des médias tunisiens», affirme-t-il.

M. Abderrahmen confie d’ailleurs qu’il s’est inspiré du code de la BBC, de Reuters, de France Internationale, pour la rédaction de ce projet. «C’est important de voir ce que les autres ont fait et de prendre en compte aussi le contexte tunisien. La déontologie du métier n’a jamais été enseignée à l’Institut de Presse et des Sciences de l’Information (IPSI). C’est un manquement flagrant», estime-t-il. Le projet qui concerne actuellement la télévision nationale seulement sera prolongé pour la radio nationale et les radios régionales.

Le code en question soutient 12 clauses, à savoir: servir l’intérêt général, l’indépendance, la neutralité, l’équité, la précision, le respect de la vie privée, la protection des enfants et des classes faibles, la couverture des élections et des sondages et des principes généraux.

Apprendre de ses erreurs…

On indique qu’il s’agit d’une première proposition en attendant de publier la version finale qui s’appliquera à tous les intervenants dans la télévision nationale. D’ailleurs, cet effort de réforme que soutient cette entreprise publique reflète une volonté de dépasser les critiques qu’elle a subies dès le lendemain du 14 janvier 2012.

«L’entreprise médiatique publique a des devoirs énormes et subit les critiques les plus virulentes. On ne lui pardonne pas facilement ses erreurs alors que pour l’entreprise médiatique privée, c’est plus facile», souligne Najla Amri, de la BBC. Elle précise que la politique éditoriale doit provenir des employés de l’entreprise, leur expertise, leur expérience, leurs problèmes et même leurs erreurs.

Mme Amri souligne que le code déontologique a consacré un paragraphe pour le traitement des informations de sources officielles. «Cette question n’a pas été inscrite dans le code de la BBC. Et ceci reflète la spécificité du contexte tunisien puisque la télévision nationale a un historique avec les instances officielles ou gouvernementales», explique-t-elle.

Le paragraphe en question stipule qu’il «faut faire attention au traitement des messages, photos ou vidéos de source officielle et concernant des questions de politique générale ou des sujets polémiques. Il est préférable d’en discuter en interne pour distinguer entre les informations de propagande et les informations utiles. La décision est prise en interne sur la couverture qu’il faudra y consacrer».

Crédibilité…

Cette distance avec la communication officielle ou gouvernementale marque une rupture avec les anciennes pratiques. Une chose qui ne plait pas à certains puisque les pressions sur la télévision nationale n’ont pas cessé d’augmenter, ces dernier mois. «Nous subissons plus la pression populaire que la pression politique», lance Saïd Khezami, rédacteur en chef du journal d’information à la télévision nationale.

Mais ces pressions ont-elles incité l’entreprise à entamer le projet de code de conduite?, s’est interrogé un journaliste. M. Khedher répond qu’il n’en est rien. «Nous n’avons pas entamé ce projet à cause des pressions. Il a démarré depuis des mois», insiste-t-il. Avec la BBC, 55 cycles de formation ont déjà été organisés en 2011 et 25 en 2012.

Pour M. Khézami, tout se joue autour de la crédibilité de l’entreprise médiatique publique. L’information ne doit jamais être traitée comme avant. Il insiste sur l’importance du dialogue au sein de la télévision entre les journalistes pour obtenir un produit médiatique fiable et constructif. Par exemple, «il y avait une discussion sur la couverture de la visite de Cheikh Karadhaoui. Ceci prouve qu’on est sur la bonne voie. C’est un dialogue constructif qui nous aidera à établir des cadres de traitement de l’information», estime-t-il. .