Tunisie-Archives audiovisuelles (1/2) : Des trésors menacés!

Le problème ne concerne pas, certes, le seul secteur audiovisuel public
tunisien. Toutes les radios et télévisions du monde voient chaque année une
partie de leurs archives perdue à jamais. Reste que la situation est des plus
délicates.

Diffusées sur Al Wataniya1 et Al Wataniya 2, deux émissions ont suivi, au cours
de ce mois de ramadan, leur petit bonhomme de chemin. Leur nom? «Min Dhakiret Al
Talvaza», De la mémoire de la télévision et «Telfetzet Zaman», La télévision
d’antan.

Programmées le soir, elles sont totalement réalisées à partir d’extraits
d’émissions des années 60 et 70 conservées dans la vidéothèque de l’ETT
(Etablissement de la Télévision Tunisienne).

Grâce à cette émission, de nombreux téléspectateurs ont pu visionner des images
du ramadan d’antan avec ses cafés chantant à Halfaouine, dans la médina de
Tunis, ou encore des séquences du feuilleton «Haj Klouf», campé par Béchir Rahal,
le père de la grande chanteuse Oulaya Ettounisia, et d’«Oumi Traki», joué par
l’inoubliable Zohra Faïza et un concert du chanteur Lotfi Bouchnek à ses débuts.

Discours de Bourguiba à Arriha (Jéricho)


Des fragments de la mémoire collective tunisienne qui constituent des trésors
pour leur valeur historique et commerciale. L’ETT dispose des centaines d’heures
de programmes qui ont immortalisé des événements cruciaux de la vie nationale
aussi bien politique qu’économique ou culturelle.

La vidéothèque de l’ETT possède, à titre d’exemple, de nombreux discours du
président Habib Bourguiba, dont celui d’Arriha (Jéricho), dans les territoires
occupés –aujourd’hui- par Israël, le 3 mars 1965, dans lequel il incitait les
Palestiniens à ne compter que sur eux-mêmes.

L’ETT dispose encore le concert donné par la cantatrice égyptienne Oum Kolthoum
au Palais des Sports d’El Menzah, en juin 1968, et son chef-d’œuvre «Al atlal»,
recherché par tous les mélomanes. La vidéothèque de la télévision publique
renferme également la médaille d’or des 5000 mètres de Mohamed Gammoudi, à
Mexico, le 19 octobre 1968, et la totalité des rencontres de la première
participation de la «Dream team» de l’entraîneur Abdelmajid Chetali à la Coupe
du monde de football, au Mexique, en juin 1978.

Beaucoup de retard


L’ERT (Etablissement de Radio Tunisienne) détient, pour sa part, des centaines
de dramatiques de Habib Belhareth, Abdessalem El Bech, de Omar Khalfa ou encore
de Hamadi Jaziri et Ezzeddine Brika, et pratiquement toute les chansons de Cheik
El Efrit, Habiba Mesika, Fadhila Khetmi, Raoul Journou, Ali Riahi, Hédi Jouini,
Ahmed Hamza, Youssef Temmimi, Mohamed Jammoussi, Oulaya Tounissia, Neima, pour
ne citer que ces dernières vedettes tunisiennes du théâtre et de la chanson.

Mais ces trésors sont menacés du fait de leur mauvaise conservation et du retard
pris dans l’opération qui consiste dans leur numérisation. Selon des indications
fournies il y a à peine un an, entre 20 et 25% des archives audiovisuelles
(radio et télévision) que possèdent l’ETT et l’ERT seraient «irrécupérables».

Le phénomène ne concerne pas, force est de le constater, que la seule Tunisie.
Toutes les radios et télévisions du monde rencontrent des problèmes à ce niveau.
Mais la question est, peut-être, plus ardue pour l’ERT et l’ETT en raison
notamment du grand retard pris à mettre en place un programme.

Il faut reconnaître que la tâche est des plus ardues. La conservation des
archives audiovisuelles demande des moyens importants à la fois financiers et
humains que l’audiovisuel public n’a pas toujours réussi à mobiliser.

Qu’en est-il aujourd’hui? Le secteur audiovisuel public n’a pas beaucoup avancé
malgré les initiatives entreprises que se soit par ses propres moyens ou grâce à
la coopération internationale. L’INA (Institut National –français- de
l’Audiovisuel) a procédé, ces deux dernières années, à la remises de documents
audiovisuels à l’ETT et l’ERT.

Comme ces derniers ont participé activement au programme MED-MEM, initié par des
institutions comme l’INA et la COPEAM (Conférence Permanente de l’Audiovisuel en
Méditerranée) en vue de numériser une partie des émissions appartenant aux
radiodiffuseurs méditerranéens.

Des initiatives qui ne peuvent résoudre totalement le problème des archives
audiovisuelles. Loin s’en faut!

Prochain article : Il est urgent d’agir