Comment relancer les moteurs de l’emploi dans le monde arabe?

Avant le Printemps arabe, une équipe du Groupe de la Banque mondiale s’était attelée à la conception d’un Dispositif d’appui aux micro, petites et moyennes entreprises (MPME). Ses efforts ont porté leurs fruits dans les temps : cette semaine, un premier prêt a été accordé dans ce cadre à la Tunisie, afin d’y encourager les petits entrepreneurs privés.

« Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, c’est l’énorme secteur des MPME qui peut et doit dynamiser la croissance, et donc l’emploi », affirme Shamshad Akhtar. Vice-présidente chargée de cette région à la Banque, elle a d’emblée soutenu ce projet, l’accès des entreprises au financement et à l’expertise étant la clé d’une croissance économique inclusive pour des millions d’individus. Alors que l’histoire de la région se réécrit dans la rue, la création d’opportunités d’emplois et d’entreprenariats devient une priorité.

Comme ailleurs, les MPME du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (MENA) font (ou pourraient faire) vivre beaucoup de gens. Plus de 90 % des entreprises tunisiennes, égyptiennes, jordaniennes et marocaines comptent moins de 100 salariés. Avec l’Afrique subsaharienne, la région affiche le plus faible nombre de prêts bancaires aux MPME, auxquels ne recourent que 10 % des entreprises pour investir. Les petits acteurs manquent de capitaux, leur production stagne et la création d’emplois atteint sa limite.

Le capitalisme de copinage exclut des millions d’entrepreneurs, qui pourraient prospérer dans un environnement plus équitable. Le rapport 2009 « From Privilege to Competition » de la Banque révèle un système hyper-sclérosé : en moyenne, les entreprises MENA sont deux fois plus anciennes (19 ans) qu’en Asie centrale (10,5), leurs dirigeants font partie des plus âgés dans une région à population jeune et ont 14 années d’expérience, contre 7 en Asie de l’Est. La domination de quelques vieilles entreprises indique que les relations importent davantage que l’innovation pour réussir. Bref, le dynamisme est freiné et les jeunes entrepreneurs exclus.

Ces opportunités manquées pèsent sur les banques MENA, désireuses de porter de 8 à 21 % la part des prêts MPME dans leur portefeuille. Cela nécessite un cadre juridique et réglementaire plus propice, ainsi que des financements, une mutualisation des risques et un soutien technique pour les banques et autres établissements financiers. Le Dispositif d’appui aux MPME procurera des solutions complètes (financement et assistance technique) favorisant l’expansion des prêts bancaires aux MPME. Il renforcera les capacités des MPME, qui pourront ainsi améliorer leur solvabilité et remplir leurs obligations de reporting.

La Banque mondiale et l’IFC espèrent attirer sur les cinq prochaines années plus de 500 millions de dollars provenant de partenaires régionaux (dont la Banque africaine de développement) et de donateurs. La Banque a d’abord lancé un Prêt à des programmes évolutifs (APL) de 100 millions de dollars, permettant de prêter à des intermédiaires financiers dans la région MENA. Ces prêts aux pays peuvent comporter une ligne de crédit classique et une ligne de crédit conditionnel. Le prêt à la Tunisie (50 millions) répond au besoin urgent de liquidité des MPME, avec un soutien aux réformes juridiques et économiques pour étoffer le financement des MPME.

Autre volet : l’assistance technique conjointe (Banque/IFC) via un centre de services consultatifs au Caire, qui accompagnera dans ces réformes l’État, le secteur financier et les MPME elles-mêmes. Environ 20 millions de dollars seront apportés sur cinq ans pour permettre au Dispositif d’appui de fonctionner.

Selon Doug Pearce, qui dirige l’équipe chargée du Dispositif, « l’approche est triple : 1) l’État doit instaurer une pleine concurrence ; 2) les banques commerciales doivent pouvoir accueillir des emprunteurs dont elles se méfiaient ou qui les intéressaient peu hier, via de nouvelles techniques de prêt qui élargiront leur clientèle de MPME pour un coût et un risque minimes ; 3 ) cette clientèle doit poser des questions précises aux banques et présenter des données crédibles sur leurs besoins commerciaux et financiers. »

C’est dans cet environnement que l’investissement pourra affluer pour développer l’activité qui créera les emplois permettant de recruter les personnes désireuses de saisir les opportunités.

Banque Mondiale – 26/07/2011

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