L’idéologie rétrograde des talibans afghans, version numérique

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é inernet à Kaboul le 15 mai 2011 (Photo : Shah Marai)

[17/05/2011 09:42:57] KABOUL (AFP) Sous leur régime ultra-rigoriste, entre 1996 et 2001, télévision, musique et cinéma étaient interdits. Mais désormais, les talibans utilisent pleinement les possibilités des nouvelles technologies pour promouvoir et vanter leur combat en Afghanistan.

Sites internet, courriers électroniques, Facebook et plus récemment Twitter, les talibans utilisent désormais tous les outils que la technologie moderne et “infidèle” met à leur disposition.

“Nous considérons la technologie moderne, telle qu’internet, comme une bénédiction divine”, assure Zabihullah Mujahid, un de leurs porte-parole.

…Si elle est utilisée de façon islamiquement correcte, tient-il toutefois à préciser, sans vouloir s’étendre sur l’apparent changement d’attitude des talibans depuis qu’ils ont été chassés du pouvoir fin 2001.

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à Kaboul le 15 mai 2011 (Photo : Shah Marai)

Le 12 mai, les insurgés ont envoyé leur premier tweet en anglais – “l’ennemi attaqué à Khak-e-Safid, 6 morts” -, mais les talibans ont un compte Twitter depuis six mois, selon Zabihullah Mujahid, un porte-parole des talibans.

“Nous savons que Twitter est un réseau populaire en Occident et nous voulons faire entendre notre voix”, a-t-il expliqué à l’AFP. Les Occidentaux “n’entendent qu’un seul son de cloche nous concernant, celui des envahisseurs, mais désormais, ils peuvent connaître la réalité”, a-t-il poursuivi.

Le compte twitter des talibans – @alemarahweb (“l’émiratweb”) – émet plusieurs messages quotidiens, majoritairement en pachtoune – le plus important groupe ethnique afghan, dont sont majoritairement issus les talibans – et est suivi par 5.000 abonnés, un nombre croissant depuis l’apparition de “tweets” en anglais.

“Les talibans ont désormais découvert le pouvoir magique des nouvelles technologies des médias et l’utilisent largement à leur avantage pour attirer de nouvelles recrues”, explique Mohammad Zia Bomia, le directeur de l’agence de presse Mahal, basée à Kaboul.

La page des talibans sur Facebook a été fermée en début d’année, sur ordre la compagnie selon Zabihullah Mujahid, mais selon lui de nombreux sympathisants relaient les informations sur leurs pages personnelles.

Le site internet de “l’Emirat islamique d’Afghanistan” – nom de l’Etat afghan sous le régime taliban – dispose de plusieurs adresses internet et publie communiqués, revendications, compte-rendus et bilan, souvent exagérés, parfois faux, d’opérations des combattants talibans.

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éma de Kaboul (Photo : Saeed Khan)

Le tout en anglais, pachtoune, dari (l’autre langue officielle afghane) et ourdou (langue officielle du Pakistan).

On y trouve également des vidéos de supposées attaques ou de prétendues victimes d’atrocités des forces afghanes et internationales, impossibles à vérifier, sur fond de musique ou de sons de tirs rajoutés.

L’agence afghane du renseignement (NDS) affirme avoir tenté de lutter contre la présence des talibans sur internet.

“Nous avons essayé d’empêcher leurs activités de propagande, qui vont à l’encontre de l’intérêt national et de la Constitution”, a expliqué à l’AFP le porte-parole de la NDS Luftullah Mashal.

Mais les différents sites “sont presque tous basés hors du territoire afghan”, a-t-il expliqué.

L’utilisation des nouvelles technologies ne doit pas masquer l’idéologie ultra-rétrograde qui imprègne les talibans, avertissent certains observateurs.

“Ils expriment très clairement leur objectif de reprendre le pouvoir, de mettre fin à l’actuelle système démocratique et d’imposer leur version de la Charia”, la loi islamique, souligne l’analyste afghan des médias Sediqullah Tawhidi.

“On peut être sûr qu’ils se comporteront de la même façon qu’avant s’ils reviennent au pouvoir et interdiront tout signe de modernité et toute liberté”, ajoute-t-il.