Les enjeux pour l’industrie textile tunisienne de l’adoption du «made in» par le Parlement européen

Une mauvaise nouvelle pour les sous-traitants tunisiens, particulièrement ceux
qui opèrent dans la filière
textile. Le Parlement européen a voté à l’unanimité
le projet de règlement du «made in» (21 octobre 2010). Cette mesure ne sera
toutefois validée qu’après son adoption par le Conseil de l’Union européenne
(instance représentant les Etats membres de l’Union).

Faut-il rappeler ici que, au sein du Conseil, certains Etats membres
majoritaires avaient manifesté leur opposition à ce règlement, probablement du
fait des pressions des lobbies. Pour peu que ça dure !

Alors quels sont les enjeux de ce règlement ? Une fois définitivement adoptées
par le Parlement et le Conseil, les nouvelles règles seront applicables dans
tous les Etats membres, un an après leur publication au Journal officiel de
l’UE.

Selon un amendement adopté par les députés, le règlement expirera 5 ans après
son entrée en vigueur. Un an avant cette échéance, le Parlement et le Conseil
devront décider s’il convient d’étendre ou de modifier la loi.

Ce règlement, que les textiliens sud-méditerranéens craignent particulièrement,
rend obligatoire l’étiquetage de l’origine des marchandises en provenance des
pays hors Union européenne.

Concrètement, la mention du pays d’origine va, désormais, figurer sur certains
produits comme les vêtements, les chaussures, les meubles et les produits
pharmaceutiques.

Le «made in» ne sera autorisé que pour les seuls produits finis dont au moins
deux des quatre étapes de fabrication (filature, tissage, teinture,
ennoblissement confection) auront lieu en Europe et dont il sera possible de
vérifier la traçabilité des autres phases.

Pour en mesurer l’impact et à titre indicatif, un maillot de bain conçu par un
designer italien et fabriqué avec un tissu italien en Tunisie ne sera plus
marqué «made in Italy» mais «made in Tunisia». Les produits qui ne rempliront
pas ces conditions prévues par la nouvelle législation italienne devront
indiquer le pays de provenance.

Ce règlement ne s’applique pas aux pays de l’Union européenne et les pays
associés à l’espace économique (Norvège, Islande, Liechtenstein, Turquie).

Cette loi est un coup dur pour les sociétés off shore européennes qui sont
implantées en Tunisie. Ce règlement, pour peu qu’il soit appliqué, peut avoir
des effets négatifs sur les nombreux industriels européens qui ont eu à
développer des stratégies de partenariat avec la rive sud de la Méditerranée.

En clair, cette disposition risque de compromettre les implantations en Tunisie
de griffes célèbres telles qu’Aubade, Lacoste, Benetton, et autres….

Les centrales d’achat et hypermarchés qui s’approvisionnent en produits textiles
dans les pays du sud de la méditerranée en produits textiles à des prix
compétitifs avant de leur greffer leurs enseignes, risquent également d’en
pâtir.

Pour les parlementaires européens, l’absence de règlement est préjudiciable à la
fois aux consommateurs européens, qui ne peuvent être certains de l’origine et
de la qualité des produits qu’ils achètent, et à l’industrie européenne qui
souffre de la concurrence déloyale des pays ayant adopté des règles concernant
l’indication d’origine. Aux Etats-Unis, Canada, Chine et Japon, le lieu
d’origine des produits importés doit être obligatoirement indiqué.

Pour les pays sud-méditerranéens, ce règlement ne sert aucunement le
codéveloppement prôné par le processus Euromed. La Tunisie a proposé une
alternative et plaidé, en vain, pour un «made in
Euromed». Ce règlement régional
aurait pourtant pour avantage de protéger toute la zone des importations sud-est
asiatiques et de consacrer dans les faits la solidarité entre les rives sud et
nord de la Méditerranée.