Dhafer Saïdane : «Il ne s’agit pas de sur-réglementer le secteur bancaire mais plutôt d’encourager les bonnes pratiques»

dhafer-saidane1.jpgDans une interview publiée récemment sur le journal la Voix du Nord, le Tunisien Dhafer Saidane, docteur enseignant à l’Université Lille III et à la Skema Business School, parle de l’après-crise et de la physionomie des finances internationales qui, malheureusement, n’a pas évolué vers le mieux. Extraits :

 «Les grandes banques de financement et d’investissement qui ont été le relai et l’amplificateur de la crise n’ont pas fondamentalement changé ni d’activités ni de méthodes de travail. Elles se sont plus simplement adaptées aux changements sur les marchés…. Il y a de leur part une résistance au changement et il fallait s’y attendre car tout simplement leur “Business Model” demeure profitable en termes de retour sur investissement», assure Dhafer Saïdane.

Selon lui, les Etats-Unis d’Amérique représentent toujours une menace pour le monde car ils sont en retard en matière de conception et de pilotage des systèmes financiers… En matière de réglementation on note un retard très clair des banques US par rapport aux banques européennes. Contrairement à ce que l’on prétend parfois, les banques américaines sont restées, jusqu’au déclenchement de la crise, cloisonnées sous l’influence du Glass-Steagall Act de 1933. La banque commerciale est restée séparée de la banque de financement et d’investissement (BFI). Le Gramm-Leach-Bliley Act, libérant les banques et permettant une diversification salutaire, n’a été adopté qu’en 2000. Les banques américaines seraient restées, d’après Dhafer Saïdane, et à l’exception de Citigroup, enfermées dans leurs modèles d’origine et n’ont pas adopté celui de la banque universelle comme cela a été le cas pour les banques européennes. «La raison en est simple, ce modèle de BFI (Banque d’affaires) était le plus profitable dans les circonstances du moment. Ainsi, Merrill Lynch, Morgan Stanley et Bear Stearns, mais aussi Lehman Brothers (avant sa faillite), sont-elles restées fidèles à leur modèle d’origine. Le modèle bancaire américain a donc été récusé par la crise par manque de diversification. Ces pratiques n’ont toujours pas changé».

Quelle importance d’une réglementation bancaire ?

D’après les déclarations de M. Saïdane, la réglementation bancaire reste fondamentale. Elle permet d’amortir les ondes de choc. Elle fait référence au respect de certaines règles prudentielles liées aux fonds propres, à l’assurance des dépôts et à la liquidité des actifs. Toutefois et toujours selon lui, les banques doivent évoluer vers de meilleures pratiques bancaires… Le principe du «Too Big to Fail» n’est plus  acquis. Lehman Brothers pesait plus de 650 milliards de dollars d’actifs et employait 25.000 collaborateurs.

Améliorer la transparence des marchés financiers, oui, sur-réglementer non,  pour ne pas casser le dynamisme bancaire, moteur de l’économie. Une meilleures gouvernance et de meilleures pratiques, c’est ce qu’il faut concrétiser sur le terrain, estime Dhafer Saïdane.

Ce qu’il faudrait, selon lui, est :

Le respect de principes issues de la règle des 3 «p» qui fonde la «Finance durable» du 21ème siècle, à savoir une finance de «proximité» centrée sur les individus, une finance «performante» garante de sa pérennité, et une finance «propre» respectant une éthique.