La transmission des entreprises et du patrimoine personnel : incitations, solutions et mode d’emploi

Par : Autres

La décision de Monsieur le Président de la République à
l’occasion du 21iéme anniversaire du 7 novembre de simplifier davantage les
modalités de cession des entreprises et sa concrétisation rapide par la
promulgation de la loi de finances 2009 qui vise l’assouplissement de la
transmission des entreprises bénéficiaires d’avantages financiers et fiscaux en
cas d’engagement de poursuivre l’activité (lois de finances 2009, JORT n° 104 du
29/12/2008), ont incité MOKDADI Hamadi (DG UBCI Finance), comme à l’accoutumé
avec précision, perspicacité et professionnalisme d’aborder le sujet aussi
complexe que celui de la transmission des entreprises et du patrimoine
financier. Il plaide ouvertement d’apporter aux candidats potentiels des
éléments de réponse et leur permettant de se « débroussailler » le chemin avant
de s’y engager, tout en demandant l’assistance des professionnels, qui avec un
regard extérieur et leur propre expérience, auront à les amener à préciser leurs
choix et à surmonter les difficultés qui peuvent surgir. Voici son constat et
son analyse.

h-mokdadi1.jpgNous
le savons malheureusement que trop : la transmission d’une entreprise ou
d’un patrimoine individuel financier ou immobilier constitue souvent une
étape très délicate : défaut d’information, manque de préparation,
difficulté de réaliser la transmission…, sont d’autant de facteurs qui en
font une opération à satisfaire avec courage et bonne prédisposition.

Certes, des efforts ont été engagé par les pouvoirs publics notamment en
matière d’imposition et l’allégement des contraintes juridiques :
donation-partage, réduction des droits d’enregistrement, perfectionnement
de l’exonération des + values entre autres.

Tout au long de cette réflexion, je vais essayer premièrement de faire
valoir les recommandations issues d’une rencontre organisé par la BVMT, avec
le soutien de l’UTICA, le 26 mai 2008 sur la transmission et pérennité de
l’entreprise : défis pour l’entreprise tunisienne.

En second lieu, j’aborderai la transmission du patrimoine individuel
financier et immobilier : participation, actions cotées ou non et biens
fonciers, en présentant des solutions qui peuvent être prises en charge par
tous les professionnels.

En effet, la question de la pérennité des entreprises se pose bien
souvent dans le cas des entreprise personnelles ou familiales lorsque vient
le temps de la succession ou du départ des fondateurs.

Enfin, je ne manquerai pas de résumer une intéressante étude, élaborée
entre 2003/2007 par le réseau des professionnels de la création et de la
reprise français et par l’ordre des experts comptables français, qui
présente un certain nombre d’éléments comparables et de grande utilité.

Nous pouvons affirmer que toute succession s’accompagne d’une double
préoccupation :

– La détermination de la valeur des biens physiques ou financiers à
céder,

– Le paiement des droits de succession.

Ainsi, lors de la rencontre évoquée plus haut, on retient : « qu’une
transmission ne s’improvise pas, elle ne se subit pas, elle se conduit comme
un véritable projet d’entreprise » tout en analysant les interactions cédant
– repreneur et les causes des échecs ainsi que les enjeux pour optimiser les
résultats sans occulter bien sûr les enjeux économiques et les modalités
pour vendre l’entreprise et son histoire, tout en mettant en exergue l’effet
de levier.

Le cadre juridique a fait débat, surtout les articles 111, 411 et 417 du
code des sociétés commerciales ainsi que la transmission structurelle : la
holding (avantages et risques), l’apport de l’actif, la transformation et la
fusion et la scission.

Un point qui me semble intéressant a été évoqué qui est la transmission
financière, où :

– La cession simple (article 321 du CSC), la nue propriété (c’est-à-dire
le démembrement des actions entre l’usufruit et la propriété), article 142
CDR.

– La vente avec clause de réserve de propriété,

– Le stock option

– La donation

– Les actions ADP (actions à dividendes prioritaires sans droit de vote)

– Les certificats d’investissement et certificats de droit de vote.

Enfin, les régimes fiscaux étaient abordés à cette occasion, « le coût
fiscal d’une transmission dépend du schéma de transmission retenue et du
régime fiscal applicable » : régime général ou régime de faveur, institué
par la loi 2006/85du 25/12/2006, portant loi de finances pour la gestion
2007.

Complété, d’après ma lecture de la loi de finances 2009, article 16, par
l’amélioration de l’article 53 du code d’incitation aux investissements
(voir loi de finances 2009).

Il faut retenir aussi, d’après les intervenants, que « le nouveau régime
fiscal constitue, certes un acquis important, marquant un progrès
considérable dans la fiscalité de transmission des entreprises, tout en
rappelant qu’il faut que le législateur tienne compte du coût de « la non
transmission ».

D’autres possibilités co-existent à savoir :

– La cession de l’entreprise, coté cédant et cessionnaire : TVA, + value,
fusions, provisions, déficits et amortissement, droits de mutation et le
délai de dépôt de la déclaration d’activité.

– La donation : loi n° 2006-69 du 28 octobre 2006 relative à
l’exonération des donations

– L’héritage, la transmission d’une entreprise sociétaire : les régimes
de faveur institués par les dispositions de l’article 12 à 20 de la loi n°
2006-85 du 25/12/2006 portant loi de finances 2007 et complété par la loi
relative à l’initiative économique du 27/12/2007,

– La transmission des titres : cas d’incapacité de poursuivre la gestion
de l’entreprise (décret 2007-934 du 16 Avril 2007), tout en rappelant les
avantages additionnels institués par la loi relative à l’initiative
économique (LRAIE).

Par ricochet, j’estime que pour la transmission immobilière, il existe
aussi un cautionnement de l’immobilier dans une structure indépendante, ce
qui permet de constituer un patrimoine personnel utile pour parfaire le
niveau de la future retraite ou mieux organiser de manière plus souple sa
succession auprès de sa famille.

L’encouragement pour la création des sociétés civile et immobilière
(SCI), avec un certain avantage fiscal souvent utilisé dans les marchés
développés peut constituer une solution adéquate.

Le relais entre la promotion immobilière et les acquisitions groupées est
ainsi établi pour la bonne fin des projets immobiliers source de
développement économique intrinsèque.

Parallèlement, l’assurance-vie peut constituer un outil de gestion du
patrimoine pour mieux préparer la succession, il s’agit d’un support
juridique et fiscal favorisant une épargne à long terme, il bénéficie
d’avantages fiscaux et successoraux non négligeables.

Ceci étant, à part ces éléments évoqués, on peut faire référence à une
étude réalisée en France entre 2003/2007, portant sur la reprise et la
cession des entreprises et les interlocuteurs privilégiés, auprès d’un
échantillon de 590 dirigeants repreneurs ou cédants potentiels, dont les
résultats étaient comme suit :

* Les constats :

– Présence d’entrepreneurs dans la famille : 42% des repreneurs ont un
gêne familial de l’entreprise.

– Les raisons de ne pas reprendre / céder l’entreprise à un membre de la
famille : Ils préfèrent explorer d’autres activités.

– L’expérience antérieure de création ou de reprise d’entreprise : 23%
des repreneurs sont des « multirécidivistes » de l’entreprise.

– La personne à laquelle l’entreprise a été reprise / pourrait être cédée
: L’entrepreneuriat individuel a la préférence des cédants et repreneurs.

– Moyens utilisés pour trouver : Primauté aux réseaux personnels et aux
annonces, et montée en puissance des organismes consulaires.

– Les motivations pour la reprise / cession : Les acheteurs évoquent le
plaisir avant l’argent, les vendeurs en majorité en départ à la retraite.

– La prise de décision pour la reprise : Les repreneurs se lancent de
moins en moins au hasard.

– Le jugement sur le déroulement de la reprise : Des reprises de plus en
plus faciles

– Les opportunités fiscales : Des mesures qui commencent à être connues
surtout par les repreneurs.

– La principale crainte ou difficulté : La crainte des lourdeurs
administratives ou juridiques en recul.

– Les lourdeurs administratives / juridiques : Au-delà des «
paperasseries », la lenteur fait peur aux acheteurs, les questions fiscales
aux cédants.

– Les aides possibles : Les formations et les réseaux semblent dans l’air
du temps.

– Les critères les plus importants pour la reprise / cession : Les
repreneurs sont d’abord motivés par le challenge, les cédants par la
pérennité de leur affaire et le prix de vente.

– Le délai de préparation de la cession : Leur optimisme les empêchent de
bien prendre le temps de se préparer.

* Les interlocuteurs jugés les plus aptes dans les différents domaines
évoqués ci après sont :

– Conseil et accompagnement dans cette démarche : Les experts comptables
(52%), Avocats et les Chambres de Commerce et d’Industrie / chambres de
métiers (14 %), les Notaire (11%) et Banquiers (5 %) ;

– Conseils au meilleur rapport qualité-prix : Les experts comptables
(49%), les chambres de métiers (27 %), banquiers et notaires (6%) ;

– Le plus garant de la confidentialité d’un projet de cession : Les
experts comptables (38%), les CCI / chambres de métiers (27 %), Avocats
(18%) et les banquiers (8%).

* Les interlocuteurs les plus compétents pour la cession dans les
différents domaines suivants sont :

– Evaluation de la situation financière / du portefeuille commercial de
l’entreprise : Les experts comptables (73%) et les banquiers (15%) ;

– Evaluation de l’organisation de l’entreprise et son personnel : Les
experts comptables (56%), les CCI / CM (21%), les avocats (7%) et banques
(1%) ;

– Evaluation de la situation légale de l’entreprise : Les experts
comptables (44%), les avocats (25%), les CCI / CM (11%) et les banques (3%)
;

– Evaluation du potentiel de développement et du marché de l’entreprise :
Les experts comptables (40%), les CCI / CM (37%) et les banques (6%) ;

– Information et orientation sur les démarches à accomplir : Les experts
comptables (39%), les CCI / CM (26%), les avocats (15%) et les banques (4%);

Quant à l’acteur privilégié reste sous condition les experts comptables,
mais la concurrence bouge de la part des banques spécialisées, des cabinets
de conseil et des intermédiaires financiers. Il faut à ce niveau ne pas
négliger le rôle des différentes fédérations professionnelles et unions
régionales du patronat, ainsi que des chambres de commerce, qui peuvent être
les catalyseurs en capitalisant les relations établies avec leurs adhérents.

Enfin, nous avons voulu par cette contribution, collationné toutes les
données disponibles, parce que cet événement important nécessite la mise en
œuvre de tous les moyens nécessaire : le temps et l’énergie associé aux
compétences des professionnels.

Sans oublier que si le cédant est dans l’obligation de ne pas
déstabiliser son personnel ou sa famille, ainsi que l’image de son
entreprise, et s’il est aussi soucieux de la sécurité de ses affaires, c’est
pourquoi un conditionnement des équipes est de l’entourage est de nature à
améliorer sa sérénité.

Disant in fine, que si l’âge légal d’une entreprise est de 99 ans, ce que
l’homme selon sa structure physiologique ne peut pas atteindre avec capacité
totale, la solution est de reconsidérer la transmission à travers le cycle
de vie comme un «BIEN NECESSAIRE».