L’entreprise citoyenne, … encore un mirage en Tunisie


Par Abou SARRA

L’évènement : un colloque
international sur la «la responsabilité sociale des entreprises : nouveaux
enjeux, nouveaux comportements», a été organisé, lundi, à La Manouba, à
l’occasion de la célébration du 20ème anniversaire de l’Ecole
supérieure du commerce (2 juin 2008).

 

Ce colloque ne manque pas
d’enjeux pour le devenir des entreprises locales qui, en dépit des
nombreuses réformes engagées pour les adapter aux nouvelles exigences de
l’économie de marché (programme de mise à niveau, plan national de la
qualité, programme de modernisation industrielle), n’ont pas la capacité
requise pour se développer avec leurs propres moyens, au double plan local
et mondial.

 

Dans l’ensemble, les
chefs d’entreprise tunisiens, réputés pour être des chasseurs professionnels
de primes et de subventions, n’ont jamais investi ni dans la culture
d’entreprise ni dans la promotion de nouveaux comportements, tels que la
responsabilité et la gouvernance sociale, l’éthique des affaires, le
management responsable, la performance sociétale, la performance économique,
le marketing sociétal.

 

Pour revenir au colloque
lui-même, l’objectif affiché est, certes, d’instaurer un dialogue entre les
acteurs publics et privés intervenant dans le domaine de la responsabilité
sociale des entreprises et les chercheurs et hommes d’affaires, avec pour
ultime but de jeter les bases d’une nouvelle étape de partenariat entre
l’université et l’entreprise.

 

En fait, il s’agit de
sensibiliser les entreprises tunisiennes, soucieuses de pérenniser leurs
activités et d’améliorer leur compétitivité, à l’enjeu d’adopter les
nouveaux comportements d’une entreprise citoyenne. Celle-là même qui prend
en compte les dimensions sociale et environnementale dans ses activités et
dans ses relations avec ses partenaires (salariés, clients, fournisseurs et
co-traitants, actionnaires…).

 

De ce fait, elle montre,
de par son fonctionnement, que les finalités économiques et sociales ne sont
pas incompatibles. L’entreprise citoyenne a différents rôles : économiques,
sociaux, environnementaux et culturels, dont découlent ses responsabilités
dans l’intérêt général de tous (société et particuliers).

 

L’émergence de la
thématique de la responsabilité sociale de l’entreprise vient consacrer
l’approche développementale, en l’occurrence la corrélation entre
l’économique et le social, une approche dont la Tunisie officielle en a fait
son crédo et une des principales raisons du succès de son modèle de
développement.

 

Le colloque a eu le
mérite de montrer les limites de l’expertise tunisienne en matière de
promotion d’«entreprises citoyennes».

 

Au niveau international,
la Tunisie a adhéré au pacte mondial «Global compact», initié en 1999 par
l’ex-secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan. Ce pacte, qui a pour
objectif de consacrer la dimension sociale de la mondialisation, vise à
inciter chefs d’entreprise, composantes de la société civile et marché de
l’emploi à valoriser les dix commandements en matière des droits de l’homme,
des normes de travail, de lutte contre la corruption et de sauvegarde de
l’environnement.

 

De l’avis des
observateurs, l’adhésion à ce pacte mondial respectueux des normes sociales
et environnementales est tout juste, un premier pas, sur la voie de la
consécration de l’entreprise citoyenne et de la capacité de conquérir, selon
les règles de l’art, de nouveaux marchés où les consommateurs refusent de
consommer les produits d’entreprises qui ne respectent pas les législations
sociales (notamment en ce qui concerne le dumping social) et les normes
environnementales.

 

Ce colloque de
sensibilisation s’inscrit dans le cadre d’une série de manifestations
organisées, ces derniers temps, en prévision de la libéralisation des
échanges des produits agricoles et après l’adhésion, depuis janvier 2008, de
la Tunisie à la zone de libre-échange euroméditerranéenne pour les produits
manufacturés.

 

Il intervient, notamment,
après le séminaire de formation sur la législation européenne applicable aux
fruits et légumes (Tunis, 28-29 mai 2008), et participe aux objectifs
d’amélioration de la sécurité des aliments et de protection des
consommateurs.

 

Pour mémoire, en matière
d’agroalimentaire, la Tunisie a adopté, sur un total de plus de 2000
directives européennes, une seule, celle concernant les fruits de mer.
Conséquence : nous sommes loin, loin, trop loin du compte.