Comment les Algériens trouvent notre recherche scientifique


Par Oualid CHINE

Un journal algérien,
généralement pas tendre avec les «prouesses tunisiennes», l’a écrit noir sur
blanc. Notre pays arrive en tête au niveau maghrébin, en termes de
«production scientifique». Pour pouvoir établir un comparatif, le
journaliste s’est basé sur les travaux du Centre de recherche de
l’organisation de la conférence islamique (SESRTCIC), situé à Ankara. Deux
éléments principaux ont été considérés pour les besoins de l’analyse.
D’abord, le nombre d’articles scientifiques publiés par pays, puis le
pourcentage du PIB consacré à la recherche.

 

Sur une période de dix
ans, entre 1996 et 2005, les chercheurs de la petite Tunisie auraient
publiés 70.453 articles scientifiques, quand nos voisins algériens se sont
contentés de 4.984. Les Marocains pointent en deuxième place avec leurs
10.035 papiers scientifiques publiés. En prenant en compte les populations
respectives des Etats du Maghreb central, la Tunisie a ainsi donc publié
758,2 articles par million d’habitants, quand les Marocains plafonnent avec
333,6 articles par million d’habitants, et les Algériens toujours en queue
du peloton, avec 156,5 articles/million d’habitants.

 

Nous voici donc propulsés
au devant de la scène, champions toute catégorie de la recherche
scientifique maghrébine. De quoi ranimer un moral pas toujours au beau fixe,
quand le sujet de la recherche est remis sur le tapis. Et l’analyse de se
poursuivre. La hiérarchie ainsi établie trouve son explication dans l’effort
économique fourni par les Etats pour soutenir leur recherche scientifique.
La Tunisie consacre ainsi, selon le même article, 0,63% de son PIB, à
financer la recherche scientifique, les Marocains nous sont donc très
proches avec 0,62%, et ce sont les Algériens qui, avec seulement 0,20%,
dépensent relativement le moins.

 

L’économie du savoir,
concept pourtant très à la mode, commence logiquement par la recherche et
ses produits dérivés. Comme autant d’applications possibles, d’outils
développés dans les incubateurs des temples du savoir, les universités. Dans
un pays aux ressources naturelles plus que limitées, le savoir est toujours
censé constitué la principale matière première. On n’a d’ailleurs que trop
souvent vanté la qualité de notre matière grise qui, du reste, s’exporte
aussi très bien. Or on a pourtant pris l’habitude de se lamenter, ces
derniers temps, sur le niveau de nos diplômés, et de l’état des institutions
en question.

 

Mais ces chiffres nous
permettraient-ils, ô surprise, de nous débarrasser des réflexes chagrins, et
de notre attitude pessimiste ? Après tout, avec ces informations, on
pourrait continuer à relativiser, en se disant, en bons Tunisiens, que
l’heure n’est pas si grave. Mais si ailleurs c’est pire encore, faut-il pour
autant pavoiser ? Parce que, a priori, on entend très rarement parler de ces
fameuses publications scientifiques tunisiennes, et moins encore de leur
auteur.

 

Certes, nos chercheurs ne
sont pas censés devenir aussi célèbres que nos footballeurs. Etre un
intellectuel n’implique pas nécessairement l’habileté des pieds. Toujours
est-il qu’à l’heure actuelle, ce n’est pas toujours l’esprit sain qui est
célébré. Que ce soit à Rabat, Tunis, ou Alger, le cours des idées s’est
globalement déprécié. Parce qu’il est clair, qu’on n’a plus besoin de savoir
pour avoir, ni d’être pour paraître et bien se faire voir. Peu importe,
donc, comment on trouve notre recherche !