Artisanat : Notre patrimoine est-il exportable ?


Par Maryam OMAR

Si nous avons été assez impressionnés par le 25ème salon de
l’artisanat, il n’en reste pas moins que le secteur souffre de lacunes
graves… à commencer par un budget de promotion qui se monte à un ridicule
1,3 million de dinars ! Pas de quoi faire des percées dignes de ce nom sur
les marchés étrangers et donc pas de quoi booster l’exportation des produits
de l’artisanat tunisien.

 

Mais avant d’en arriver à la promotion, parlons d’abord de qualité, car une
grande partie des produits de notre artisanat ne se s’est pas encore
débarrassée de l’image peu flatteuse qui persiste dans les esprits. Certes,
les officiels disent volontiers qu’ils souhaitent aller de plus en plus vers
la valeur ajoutée et affirment leur conviction que la commercialisation est
tributaire de la haute qualité, mais il suffit d’observer les produits
venant de l’Inde, de la Syrie, de la Turquie… (sans aller vers le Japon, la
Finlande et les autres pays occidentaux où le ‘’Hand Made’’ est respecté
au-delà de toute mesure) pour comprendre que tout reste à faire. Et ce n’est
pas vraiment un atout pour développer les exportations du secteur.

 

De fait, le 25ème salon de l’artisanat renferme une telle somme
de créativité et de ‘’perfection’’ artisanale qu’il pourrait conduire à se
méprendre sur les réalités. Ce qu’on y voit, c’est le ‘’top’’… mais qui n’a
malheureusement rien à voir avec ce que le client trouve sur le marché.
Ceci, évidemment, à part quelques institutions du genre de la SOCOPA ou le
village ‘’Ken’’ où l’on peut trouver des choses, sinon époustouflantes, du
moins très convenables, soutenant la comparaison avec ce qui se fait
ailleurs.

 

Revenons à la commercialisation. D’abord pour rappeler que, dans notre
système actuel, elle est la responsabilité de nombreux acteurs : la tutelle
avec toutes ses ramifications (pour l’encadrement), les organes d’appui
(pour le soutien, la normalisation, l’information…), les structures
professionnelles (pour d’autres formes d’encadrement), l’artisan lui-même
(qui doit savoir ‘’lire’’ le marché et en tirer les conclusions), le
consommateur (tunisien et étranger et qui pèse par sa prérogative de
choisir)… Tout ce joli monde doit, bien sûr, parler le même langage et être
capable de communiquer et de coordonner les efforts. Et là aussi, nous en
sommes loin alors que, pour exporter, la machine doit être huilée à souhait.

 

Ensuite, il faudrait à notre artisanat un plan marketing pour toute l’année,
sans périodes creuses, sans pause, sans flottements, sans pénurie de moyens…
Il lui faudrait une stratégie qui pourrait, par exemple, s’inspirer de la
soixantaine de décisions présidentielles qui ont été prises à son bénéfice
depuis deux décennies. Il lui faudrait des idées claires et un solide sens
de la mondialisation car telle est l’aune à laquelle tout se mesure
aujourd’hui. Sinon, son ambition d’atteindre 8% de la totalité des
exportations tunisiennes restera un simple vœu pieux !