Espagne : Zapatero confronté à la fin d’un âge d’or économique

 
 
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José Luis Rodriguez Zapatero, au siège de PSOE, le 10 mars 2008 à Madrid (Photo : Philippe Desmazes)

[10/03/2008 15:08:27] MADRID (AFP) De grands défis économiques attendent José Luis Rodriguez Zapatero, reconduit dimanche au pouvoir, la forte croissance qu’avait connue l’économie espagnole ces dix dernières années ayant subi depuis l’automne un net ralentissement.

Inflation supérieure à celle de la zone euro, chômage en progression, moteur du bâtiment grippé, déficit commercial de plus au plus profond… Le tableau de bord de l’Espagne vire depuis quelques mois chaque fois plus au rouge.

“Cette législature aura pour principal objectif l’impulsion économique”, a déclaré lundi matin le chef du gouvernement socialiste, au lendemain de sa seconde victoire aux législatives.

“Le principal défi est la croissance, il va y avoir moins de création de richesses”, a déclaré José Villacis, professeur d’économie à l’université San Pablo CEU, à Madrid.

Après une décennie euphorique qui l’a propulsée dans la cour des grands pays européens, l’Espagne est en train de flancher, sous l’effet conjugué du contexte international et de la fin du boom de la construction.

Après une croissance encore forte de 3,8% en 2007, supérieure d’1,2 point à la moyenne de la zone euro, sa prévision officielle pour 2008 reste élevée, à 3,1%. Mais plusieurs institutions jugent ce pronostic optimiste. La Commission européenne prévoit plutôt 2,7%.

D’autant que la tendance s’accentue. “Les données les plus récentes montrent une décélération un peu plus prononcée de l’activité début 2008”, analysait fin février la Banque d’Espagne.

Autre problème de taille, car il frappe tous les Espagnols, l’inflation, traditionnellement plus élevée que dans le reste de la zone euro.

Dopé par le pétrole et les produits alimentaires, l’indice des prix a fortement augmenté ces derniers mois (4,4% sur un an en février), suscitant la grogne de ménages déjà très endettés par leurs emprunts immobiliers et qui peinent à boucler leurs fins de mois.

Pendant la campagne électorale, la droite a largement attaqué le gouvernement sur l’envolée du prix du lait ou des fruits, un paradoxe pour ce pays verger de l’Europe.

Josep Oliver Alonso, de l’université autonome de Barcelone, juge nécessaire des mesures conjoncturelles dans le secteur des grandes surfaces, comme en France.

La grande distribution est montrée du doigt: “le produit qui sort bon marché de chez le producteur arrive cher chez le consommateur”, résume M. Villacis.

Autre sujet d’inquiétude, le chômage. Bien qu’historiquement bas, à 8,6% en 2007, il est en train de repartir à la hausse.

Des légions de travailleurs du bâtiment, dont de nombreux immigrés, laissés sur le carreau par le ralentissement du secteur, gonflent les chiffres du chômage, après des années de frénésie où les bétonneuses fabriquaient le miracle économique.

M. Zapatero s’est engagé à créer deux millions d’emplois d’ici à 2012. Mais “la solution ne dépend pas directement du gouvernement, car c’est le secteur privé” qui crée du travail, rappelle M. Villacis.

Il pourrait agir indirectement via des baisses d’impôts pour relancer l’emploi. “Mais c’est dangereux, on risque le déficit budgétaire”, estime l’économiste.

Or, la bonne santé budgétaire du pays est un des points forts des socialistes. Les comptes publics ont affiché régulièrement des excédents, une performance rare en Europe.

Baisses d’impôts, augmentation des salaires et retraites minimum, M. Zapatero a promis de puiser dans ce magot pour aider les plus vulnérables à affronter un ralentissement qu’il promet “temporaire”.

Le commissaire européen à l’Economie, l’Espagnol Joaquin Almunia, a récemment mis en garde l’Espagne contre un relâchement de sa rigueur, l’appelant à “ne pas détruire un des excédents budgétaires les plus importants de la zone euro”.

 10/03/2008 15:08:27 – © 2008 AFP