[28/01/2008 09:51:54] FRANCFORT (AFP) Dirk Müller est courtier de son état, et les turbulences boursières de la semaine écoulée ont fait de lui une star. Sans agissements douteux ni perte abyssale, c’est par ses qualités photogéniques que “Monsieur Dax” s’est illustré, jusqu’à incarner la Bourse. En une du Herald Tribune, du Times, du Handelsblatt, de Libération mardi, pour n’en citer que quelques-uns, filmé sous toutes les coutures par les chaînes d’information financière, objet d’un montage pop à la Andy Warhol dans le Süddeutsche Zeitung, M. Müller, 39 ans, a incarné la Bourse et ses soubresauts toute la semaine. Vendredi le visage sombre et renfrogné de Jérôme Kerviel, courtier de la Société Générale accusé par cette banque d’être responsable de plusieurs milliards d’euros de pertes du fait de spéculations “frauduleuses”, est venu lui faire de l’ombre sur les écrans de télévision.
Mais pour beaucoup, surtout en Allemagne, la Bourse, c’est Dirk Müller, son visage sympathique, sa barbiche poivre et sel, sa brosse soignée, ses chemises blanches et surtout, ses mimiques expressives qui en font le chouchou des objectifs et des caméras. Quand le Dax, indice phare de la Bourse de Francfort, plonge, Dirk Müller se prend la tête entre les mains, lève les yeux au ciel. Quand il remonte, il est tout guilleret, ce qui lui vaut la couverture du Financial Times Deutschland mercredi. A la télévision, il parle un langage simple qui fait mouche. L’intéressé s’amuse de sa nouvelle notoriété, surtout d’avoir été comparé à l’ourson du zoo de Berlin, Knut, par un journal autrichien, et explique à l’AFP: “Pour les gens, la Bourse reste abstraite, ce sont des ordinateurs, où sont brassés de très grosses sommes d’argent, où il se passe quelque chose d’étrange. Moi j’essaie d’expliquer avec des mots simples”. Et alors que l’affaire de la Société Générale jette le discrédit sur toute une profession, Dirk Müller trouve même des mots pour défendre le courtier français incriminé. “Il était jeune, assumait beaucoup de responsabilités et avait la possibilité de gagner beaucoup d’argent avec de produits financiers qui n’ont rien à voir avec des investissements sérieux”, explique-t-il. “Ce n’est pas à lui qu’il faut reprocher ce qui s’est passé mais au système financier. Qui ressemble parfois plus à un casino et n’a plus grand chose à voir avec l’économie réelle!”
Si Dirk Müller le dit, on est enclin à le croire. La passion de la Bourse l’a saisi très jeune. Il travaille dans la salle des marchés depuis 1992, et depuis dix ans pour la maison de courtage ICF. C’est d’ailleurs ce qui a fait démarrer sa carrière médiatique, d’abord à petite échelle: dans la salle des marchés, l’emplacement alloué à ICF est juste sous le tableau qui dessine l’évolution des cours, et donc dans le champ des caméras. La bonne volonté du courtier à se faire filmer et interviewer a fait le reste. Comme ses collègues, Dirk Müller dit avoir vécu une semaine éprouvante. Mais il s’attendait depuis longtemps à une correction sévère sur les marchés. “Une grande partie de la chute vient des spéculations d’un seul courtier de la Société générale. Sans lui, elle n’aurait peut-être pas été aussi forte ni aussi longue. Mais il y a de toute façon une crise structurelle aux Etats-Unis”, dit-il. Et de livrer son avis sur la philosophie de la Bourse: “Avant c’était l’endroit où se rencontraient une bonne idée et l’argent pour la financer. Aujourd’hui, elle est envahie par des produits financiers que même le marché ne comprend pas”. |
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