Emploi et mouvements de compétences

Emploi et mouvements de compétences

Je souhaiterais réagir à l’article de Maryam Omar,
intitulé “Emploi: Attention à la fuite des compétences”!”. Je confirme en
effet qu’il y a une demande croissante, notamment en France, pour des cadres
de haut niveau tunisiens (mais pas seulement). Et j’ajouterais que cela
concerne pour l’essentiel de grandes PME, voire de grandes entreprises ou
des multinationales.

Là où, en revanche, je ne partage pas son message, c’est lorsqu’elle
sous-entend qu’il faille s’en méfier. Je dirige un cabinet de conseil, basé
en France, qui conseille et accompagne les entreprises françaises qui
veulent développer leur activité, notamment en Tunisie. A ce titre, le plus
souvent, lorsque nous sommes sollicités pour trouver des compétences
tunisiennes, c’est pour qu’elles assument des responsabilités de premier
plan en Tunisie, au sein d’une filiale, chez un partenaire stratégique ou
chez un sous-traitant.

Plus encore, ces entreprises acceptent même de financer en France la
formation de ces cadres afin qu’ils soient mieux préparés pour assumer, dans
les meilleures conditions, leurs futures responsabilités. Et ça, c’est un
transfert qualifiant de savoir-faire qui sert nos compétences et notre
économie Evidemment, toutes ces entreprises qui font appel aux Hi-Po (pour
High Potential) tunisiens n’envisagent pas de s’implanter en Tunisie et
certaines font le choix de rester en France et de recruter pour rester en
France.

Mais là encore elles contribuent positivement à l’économie tunisienne, ne
serait-ce que par les transferts d’argent que ces compétences transfèrent
chaque année au pays; plus encore, ces recrutement à l’étranger permettent
aussi de développer le potentiel de ces Tunisiens qui ont du talent et qui
n’ont pas toujours l’occasion d’exprimer leur talent en Tunisie.

Alors, être attentif, oui; faire carrément attention, non. Cela nous amène à
aborder une problématique liée à notre sujet : au-delà de la contribution
indéniable de la nation à former cette élite, basée sur une stratégie qui,
depuis l’indépendance, met la formation au centre du développement du pays,
que font aujourd’hui les entreprises tunisiennes, dans leur ensemble (car je
ne parle pas de cas particuliers) pour développer et garder les compétences
qu’elles ont ? Ont-elles mis en place, à leur intention, un système
d’intéressement au résultat ? Une politique de formation continue ? Des
salaires suffisamment élevés pour les dissuader d’aller voir ailleurs ?
Quelle place notre société accorde-t-elle à nos enseignants ? Nos chercheurs
? Rappelons-nous qu’il y a 50 ans, les instituteurs figuraient parmi les
membres les plus respectés par la communauté, justement parce qu’ils
détenaient le savoir et le transmettaient…

La Tunisie a consacré plus d’un demi-siècle à faire en sorte que la
connaissance soit la chose la mieux partagée dans le pays. Et aujourd’hui
cet effort est reconnu au-delà de ses frontières et nous devrions nous en
féliciter. Mais le monde change et la Tunisie doit s’adapter, dans l’intérêt
de tous! Ainsi devrions-nous continuer à former, en améliorant bien sûr les
méthodes, en adaptant les contenus aux nouvelles réalités; mais il faut
également généraliser une politique qui permette à nos Hi-Po de ne pas avoir
à choisir entre leur épanouissement (qui passe aussi par leur confort
matériel) et les liens affectifs qu’ils entretiennent avec leur pays.

Aslem Smida


Réaction à l’article :
Emploi : Attention à la fuite de compétences !

Contact :
webmaster@webmanagercenter.com