La France n’est pas techniquement en faillite mais doit moins dépenser

 
 
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L’économiste et directeur de recherche au CNRS Elie Cohen, en mars 2004 au Théâtre du Rond-Point (Photo : Gabriel Bouys)

[22/09/2007 20:08:21] PARIS (AFP) La France n’est pas techniquement en faillite, comme l’a affirmé vendredi le Premier ministre François Fillon, mais elle doit moins dépenser pour arrêter de gonfler sa dette, considèrent samedi des économistes.

“Je suis à la tête d’un Etat qui est en situation de faillite sur le plan financier, (…) qui est depuis 15 ans en déficit chronique, (…) qui n’a jamais voté un budget en équilibre depuis 25 ans. Ca ne peut pas durer”, a déclaré vendredi en Corse le chef du gouvernement.

“Techniquement, ça n’a pas beaucoup de sens”, a estimé samedi l’économiste Elie Cohen sur France Info, car “pour qu’un pays soit en faillite, il faudrait qu’il ne puisse plus emprunter sur les marchés internationaux”. Or “les prêteurs se bousculent pour prêter de l’argent à la France”.

En outre, “les niveaux de dettes que nous avons sont certes élevés mais ils se comparent tout à fait à ceux des autres pays développés”. La France est ainsi “beaucoup moins endettée que le Japon” où la dette a atteint 186% du PIB en 2006, “et personne ne dit que le Japon est en faillite”, a observé l’économiste.

Pour autant, la France “a accumulé des déficits puis de la dette”, a-t-il souligné.

Après plusieurs années de dépassement, la France a ramené depuis 2005 son déficit public (Etat, Sécurité sociale et collectivités locales) sous la barre de 3% du produit intérieur brut (PIB) fixée par le pacte de stabilité européen. Ce déficit représentait 2,6% du PIB fin 2006 et le gouvernement prévoit de le ramener à 2,4% fin 2007 et 2,3% fin 2008.

En revanche, son taux d’endettement dépasse depuis plusieurs années le plafond de 60% du PIB préconisé. La dette a atteint en septembre 1.150,3 milliards d’euros, soit 64,2% du PIB. Pour 2007, le gouvernement entend la stabiliser à ce niveau.

Une situation qui a un “coût”, a noté Valérie Rabault, membre du Collectif économiste pour l’action politique (Cepap).

Le “service de la dette”, c’est-à-dire le remboursement des intérêts annuels des sommes empruntées, dépasse 40 milliards d’euros chaque année, ce qui en fait le deuxième poste budgétaire, juste derrière l’Education nationale.

“Les investisseurs semblant devenir de plus en plus sélectifs sur la dette de certains pays”, tels que la France, le montant des intérêts à rembourser pourrait encore s’alourdir de 800 millions d’euros par an, selon Mme Rabault.

Et comme la croissance ralentit, “il va falloir serrer la dépense” et “imaginer un budget beaucoup plus strict que prévu pour 2008 et encore plus pour 2009”, estime M. Cohen.

Le gouvernement doit présenter mercredi son projet de budget pour 2008, alors que plusieurs organismes internationaux ont revu à la baisse leurs prévisions de croissance pour la France en 2007.

L’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) table sur 1,8%, contre 2,2% auparavant. La Commission européenne prévoit désormais 1,9%, contre 2,4% précédemment

Dans ce contexte, M. Cohen juge “inadapté” le paquet fiscal de plus de 10 milliards d’euros adopté cet été. “Autant dans un contexte où la croissance était là, où la réduction du chômage était là, on pouvait imaginer qu’il (le président Sarkozy) distribue quelques sucreries à son électorat, (…) autant dans le contexte actuel cette politique apparaît inadaptée”, déclare-t-il.

 22/09/2007 20:08:21 – © 2007 AFP