Mme Mongia Khemiri : ‘’Le Forum de Carthage pour un meilleur positionnement de la Tunisie’’

Par : Tallel

mongia1.jpgDe la Douane, où elle
occupait le poste de Chef de bureau des entreprises exportatrices, à la FIPA
en passant par le ministère du Développement et de la Coopération
internationale, Mme Mongia KHEMIRI a toujours été au contact avec les
entreprises et investisseurs étrangers. Elle possède une parfaite maîtrise
des dossiers liés à l’investissement, en général, et aux IDE, en
particulier.


 


A la veille du Forum de
Carthage sur l’investissement (21-22 juin), elle a accepté de nous parler de
ce forum, mais surtout de la Tunisie en tant que site d’investissement à
haute valeur ajoutée. Entretien !

 


Webmanagercenter :
Pourriez-vous présenter à nos lecteurs le désormais traditionnel Forum de
Carthage ?
 


 


Mongia KHEMIRI

: Le Forum de Carthage est une action de promotion générale visant à faire
connaître la Tunisie en tant que site d’investissement compétitif sur un
certain nombre de secteurs et de niches. Le Forum prépare en quelque sorte
l’action que nous faisons quotidiennement ici à FIPA, à savoir des contacts
directs avec des investisseurs étrangers, qui se font de plus en plus de
manière ciblée.

 

Donc, c’est un événement
de promotion générale, c’est pourquoi il est destiné
non seulement aux investisseurs étrangers, mais également à d’autres
partenaires, tels que les chambres de commerce, les chambres syndicales, les
associations professionnelles… que nous invitons -parce qu’elles constituent
un relais d’affaires important et des amplificateurs d’information de 
premier ordre tout comme les journalistes économiques tunisiens et
étrangers. Voilà ce qui donne une idée sur la définition et l’objectif
principal de l’organisation de cette manifestation : faire connaître la
Tunisie en tant que site d’investissement.

 

En outre, ce forum sert à
introduire la Tunisie dans la short list des opérateurs étrangers pour
montrer à ces derniers qu’il y a quelque part un «smart» pays qui offre
d’importantes opportunités d’investissement et qui peut servir de relais de
production pour eux.

 


Les deux thèmes majeurs
de cette 9ème édition, c’est l’outsourcing des services et
l’internationalisation industrielle. Pourquoi ?

 

En fait, il s’agit d’une
continuité de l’édition 2006 qui avait été placée sous le slogan ‘’Investing
in the future’’, et nous continuons sur la même lancée cette année. Cela
tombe à pic d’ailleurs, puisqu’on vient de présenter le 11ème
Plan de développement 2007-2011, et que la Tunisie ambitionne d’accéder à un
palier supérieur dans le développement et qui, par conséquent, se lance de
plain-pied sur des secteurs à haute valeur ajoutée. Pourquoi ? Parce que
toutes les études, tous les opérateurs internationaux sont unanimes pour
dire que les choix de la Tunisie sont fondés, parce que nous avons tout ce
qu’il faut, tous les atouts pour aller vers des secteurs à forte valeur
ajoutée, vers une intégration plus poussée du pays dans la chaîne de valeur
que ce soit dans l’industrie ou dans les services. C’est donc tout
naturellement que ces deux thèmes soient les thèmes majeurs du Forum de
2007.

 

Dans l’outsourcing, nous
allons essayer de montrer qu’on est parti du call center basique pour
arriver, aujourd’hui, aux plateformes technologiques, techniques, au
développement du logiciel, à la recherche et développement. Cela veut dire
que le site Tunisie est déjà capable de proposer une solution complète, un
produit complet qui s’inscrit dans la chaîne de valeur et qui monte de plus
en plus vers le haut de la chaîne.

 

Pareil pour l’industrie,
puisque nous sommes en phase de recevoir des investissements sur des
secteurs très pointus, tel que l’électronique –qui n’est certes pas nouveau
mais qui se spécialise de plus en plus pour aller vers l’électronique fine
destinée à l’aéronautique, aux télécommunications, aux composants
automobiles, etc.

 

Et puisqu’on parle
d’aéronautique, je dois souligner qu’on assiste à une forte dynamique dans
le pays dans ce secteur à travers l’implantation des entreprises
fournisseurs des secteurs qui définissent la Tunisie industrielle
d’aujourd’hui : un pays qui ne vend plus la main-d’œuvre mais plutôt du «mind»
œuvre. D’ailleurs, la Tunisie est présente au Salon aéronautique du Bourget
cette année, salon de référence dans ce secteur d’activités.

 


Alors, quel est l’état
des lieux par rapport aux inscriptions ?

 

mongia2.jpgLes inscriptions que nous
avons enregistrées démontrent l’intérêt que suscite le site Tunisie auprès
des investisseurs étrangers, car à la date d’aujourd’hui, nous avons 373
entreprises étrangères avec 450 participants ; le nombre d’entreprises
tunisiennes est de 207 et le nombre de participants tunisiens et étrangers
installés en Tunisie est de 342… Au total, un chiffre qui pourrait évoluer
vers 900 inscrits, représentant 22 pays essentiellement d’Europe,
d’Amérique, d’Asie.

 


Abordons maintenant la
question de la qualité de l’investissement, parce que parfois nous avons du
mal à interpréter les statistiques et les chiffres qu’on nous communique.

 

Vous avez tout à fait
raison… Il faut tout d’abord savoir que le concept ‘’IDE’’ est défini par
les instances internationales. Ainsi, l’IDE couvre le green field, les
fusions/acquisitions, les joint-ventures,  les
investissements dans les services, même le commerce est couvert par cette
définition.

 

Cependant, en Tunisie, à
travers FIPA, nous avons choisi le chemin le plus difficile, puisque nous
sommes l’un des rares pays à présenter des chiffres qui sont toujours
conformes à ceux annoncés par les instances internationales (CNUCED, Banque
mondiale, FMI…) ; c’est une concordance totale.

 

Mais je disais que nous
avons été trop sévères avec nous-mêmes, car nous ne comptons que le green
field, auquel il faut rajouter les joint-ventures et les
fusions/acquisitions  dans l’industrie et les services ; cela ne veut pas
dire qu’il n’y pas d’autres, comme les privatisations, la vente d’une part
du capital de Tunisie Télécom, des prises de participation dans des banques
tunisiennes… Donc tout cela entre dans la définition de l’IDE selon les
instances internationales. Mais en ce qui nous concerne à FIPA, nous
considérons cela comme des opérations ponctuelles qui, certes apportent de
la valeur ajoutée au pays, mais restent quand même des opérations
ponctuelles. Donc, nous ne comptabilisons que les investissements effectués
dans les secteurs productifs, c’est-à-dire des investissements de création,
d’extension, ou de joint-venture parce que ces investissements créent de la
valeur, des emplois, de la richesse ; ils sont là, pérennes, avancent,
grandissent…

 

D’ailleurs, le
pourcentage d’extensions enregistrées d’une année à l’autre est supérieur au
pourcentage de projets nouveaux. Autrement dit, celui qui a commencé par
exemple avec un million d’euros, se trouve deux ans plus tard à 5, 6 et plus
millions… Donc, ce sont des gens qui découvrent positivement le climat des
investissements en Tunisie. Voilà une partie de la réponse à votre question
sur le climat des affaires en Tunisie.

 

Pour rester dans la
question de la qualité, je vais vous donner deux indicateurs : le premier
concerne la FIPA, le second a trait aux statistiques elles-mêmes.

 


Et au niveau de FIPA ?

 

Concernant la FIPA, la
stratégie adoptée montre qu’on va vers la qualité ; cette stratégie consiste
à adopter deux types d’actions, celles que nous appelons proactives et
celles réactives. En effet, les actions proactives, consistent en un
programme fixé d’avance, étudié avec notre staff ici et nos bureaux à
l’étranger après analyse  des différents rapports internationaux sur les
IDE, des statistiques internationales, après avoir regardé les statistiques
des banques centrales des pays que nous ciblons, mais également les
entreprises et leurs demandes. Dans ce cas, ce qui nous intéresse le plus ce
sont les entreprises évoluant dans le domaine des TIC, tout ce qui utilise
l’informatique avancée comme outil de travail, le développement de
logiciels, les plateformes techniques, les fonctions R&D, ça c’est dans les
services ; pour l’industrie, c’est l’électronique, les composants
automobiles (un secteur qui produit de plus en plus de l’emploi).

 

De même la Tunisie est en
train de se situer en tant que site qui produit en ‘’just in time’’ et du
sur-mesure pour les grandes marques. Le textile haut de gamme continue
également de figurer dans nos priorités, sans oublier les segments à haute
valeur ajoutée dans l’industrie agroalimentaire, un secteur important dans
tous les pays avancés.

 

Pour le reste, c’est une
action réactive, c’est-à-dire ceux qui viennent sont les bienvenus, nous
leur fournissons l’information et l’assistance nécessaires.

 

Tout ceci veut dire que
nous avançons dans la qualité. Dans nos statistiques, nous comptons deux
indicateurs importants : nous remarquons l’augmentation du nombre de cadres
bac+2 employés par des entreprises de nouvelles créations, des extensions.
Et sur notre base de données, nous constatons que le taux d’encadrement
augmente de plus en plus dans les entreprises, cela veut dire qu’on monte
dans l’échelle de la qualité. 

 

Concernant la pérennité,
il s’agit de l’acquisition de terrains et locaux industriels par les
entreprises, ce qui représente un facteur stabilisateur des activités de
celles-ci et un signe du développement qu’elles connaissent en Tunisie.
D’ailleurs, on entend de plus en plus parler d’entreprises étrangères ayant
opté pour la Tunisie comme site de départ pour leur développement à
l’international

 

Toutes ces données sont
revues –et corrigées si nécessaire- deux fois par an pour voir si l’on est
bien dans notre stratégie.

 


A travers tout ceci
madame, quels sont les points forts de la Tunisie et quels sont ses points
faibles ? 


 

Dans chaque décision
d’investissement, les investisseurs regardent un ensemble d’éléments qu’ils
mettent en balance en valeur absolue et en valeur relative selon le secteur
d’activité. Mais il y a quelques facteurs qui sont systématiquement mis dans
la balance .Ces facteurs sont notamment la stabilité politique et sociale et
la crédibilité du pays.

 

A cet égard la
réputation de la Tunisie n’est plus à démontrer.
la Tunisie jouit d’une reconnaissance internationale quant à ses 
performances, à la compétitivité de son économie : La Tunisie a ainsi été
classée 29ème sur 128 pays dans le monde dans le
nouveau
“rapport sur la compétitivité africaine 2007”, élaboré conjointement par le
Forum Economique Mondial, la Banque Mondiale et la Banque africaine de
développement.

 

La Tunisie peut également compter sur sa forte intégration dans 
l’économie mondiale, et l’amélioration constante de l’environnement des
affaires grâce notamment à un support gouvernemental
constant.

 

Par ailleurs, tous les
investisseurs étrangers implantés en Tunisie, avec une expérience confirmée
du terrain, s’accordent à reconnaître la qualité des ressources humaines
tunisiennes et leur capacité à assimiler rapidement les nouvelles
technologies. Ces jeunes cadres et employés tunisiens produisent aux normes
internationales de qualité avec des salaires très compétitifs.

 

La proximité culturelle
et géographique de l’un des plus grands marchés du monde, à savoir celui de
l’Union européenne, constitue également un atout majeur pour la Tunisie. Cet
atout est renforcé par les différents accords de libre-échange signés par la
Tunisie avec différents partenaires.

 

En ce qui concerne les
points faibles, on peut relever l’absence d’un véritable marché maghrébin,
en cours de mise en place d’une manière graduelle grâce aux efforts déployés
par le président de la République.  Zine El Abidine Ben Ali, il nous est
reproché l’exiguïté relative du marché intérieur. Mais ceci est tout de même
compensé par la multiplication des accords bilatéraux et multilatéraux de
libre-échange et par l’amélioration constante du pouvoir d’achat des
Tunisiens.

 

Une meilleure adéquation
entre les qualifications des ressources humaines et les besoins de
l’entreprise a été mise en place, renforcée par les différents programmes de
modernisation de l’enseignement, la synergie amorcée entre le secteur privé
et l’université et le renforcement de la composante R&D, tout ceci est de
nature à améliorer les atouts de la Tunisie.

 

Ceci étant dit, il faut
continuer à renforcer nos efforts de  communication  sur les déterminants de
l’attractivité du site tunisien. Le Forum de Carthage sur l’Investissement
est l’une des manifestations qui ambitionnent de donner une vision crédible,
factuelle des caractéristiques du site. 

Propos recueillis

par Tallel BAHOURY