Au plus haut depuis 20 mois, l’euro ravive les inquiétudes sur la croissance Par Damien STEFFAN

 
 
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Le siège de la BCE à Francfort (Photo : Oliver Berg)

[27/11/2006 12:44:29] LONDRES (AFP) L’euro a atteint lundi matin son plus haut niveau depuis vingt mois, largement au-dessus de 1,31 dollar, profitant de la glissade continue du billet vert, et faisant repartir de plus belle les inquiétudes pour la croissance en zone euro.

Pendant les échanges asiatiques lundi, la devise européenne a grimpé jusqu’à 1,3161 dollar, un niveau qu’elle n’avait plus atteint depuis le 22 mars 2005.

Vers 10H30 GMT (11H30 à Paris), un euro valait 1,3116 dollar, contre 1,3094 vendredi vers 19H00 GMT.

“Ce mouvement reflète le changement des perspectives de taux d’intérêt aux Etats-Unis depuis le milieu de l’année: alors qu’on s’attendait à des hausses, on s’attend désormais à des baisses”, expliquait Peter Frank, économiste de la banque ABN Amro.

La Réserve fédérale américaine (Fed) pourrait en effet baisser son taux d’intérêt directeur – actuellement fixé à 5,25% – au premier trimestre 2007, alors qu’au contraire les taux en zone euro devraient atteindre 3,50% en décembre et rester sur la pente ascendante en 2007. Cette divergence réduit au bénéfice de l’euro le différentiel de taux d’intérêt entre les deux monnaies, et entretient la progression de l’euro contre le dollar.

La placidité des cambistes contrastait avec l’inquiétude des responsables politiques et des industriels de la zone euro, pour qui l’appréciation de la monnaie unique n’est pas la bienvenue car elle risque de renchérir les exportations et de fragiliser la croissance.

Lundi matin, le ministre français de l’Economie, Thierry Breton, a jugé que la dépréciation du billet vert appelait une “grande vigilance collective”, sans plus de précisions. Le sujet est d’autant plus sensible que la France est en pleine période électorale, six mois avant la présidentielle, et que sa croissance a stagné au troisième trimestre.

Les responsables politiques européens ne sont pas sur la même longueur d’ondes que la Banque centrale européenne (BCE), qui a à charge de conduire la politique monétaire. La BCE répète à l’envi qu’elle a pour mission la stabilité des prix, mais les politiques voudraient qu’elle diversifie ses objectifs et y intègre par exemple des considérations sur la croissance.

Face au dollar, l’euro reste cependant à une certaine distance de son pic historique de 1,3666 USD atteint fin décembre 2004, et qui avait poussé Jean-Claude Trichet, le président de la BCE, à parler de mouvements “malvenus et indésirables”.

C’est pourquoi, selon l’économiste d’ABN Amro, l’Union européenne devrait pour l’instant se garder de faire pression sur la BCE. Mesuré contre un panier de devises représentant de manière équilibrée ses partenaires commerciaux, “l’euro reste au milieu de sa marge d’évolution des trois dernières années”, a-t-il fait valoir.

Pour Gavin Friend, économiste à la Commerzbank, il devrait être difficile pour les dirigeants politiques d’entraver une progression de l’euro qui répond aux fondamentaux de l’économie.

“Si les ministres des Finances de la zone euro (réunis lundi soir à Bruxelles à partir de 18H00 GMT) critiquent sa vigueur, nous pourrions assister à des prises de bénéfices, mais l’euro ne reculera pas plus bas que 1,2980 dollar.” “Tant que la BCE poursuit son cycle de hausse des taux, on voit mal pourquoi l’euro faiblirait”, a-t-il jugé.

 27/11/2006 12:44:29 – © 2006 AFP