Avec le gaz norvégien, les Européens jouent la carte de la diversification

 
 
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Le premier ministre britannique Tony Blair (d) et son homologue norvégien Jens Stoltenberg lors de l’inauguration symbolique du gazoduc sous-marin Langeled, le 16 octobre 2006 à Londres (Photo : John D McHugh)

[25/10/2006 09:01:08] OSLO (AFP) Soucieux de satisfaire une demande croissante et de réduire leur dépendance à l’égard de la Russie, les pays européens se tournent avec gourmandise vers le gaz naturel norvégien qui irrigue le Vieux Continent via un réseau de gazoducs en perpétuelle expansion.

En l’espace de six ans, la Norvège a quasiment doublé ses exportations annuelles de gaz pour les porter à 90 milliards de m3, ce qui en fait le deuxième fournisseur de l’Union européenne (UE) avec une part de marché de 16%.

Une nouvelle étape a été franchie au début du mois avec la mise en service entre la Norvège et la Grande-Bretagne de Langeled, le plus long gazoduc sous-marin au monde, qui permettra à terme de couvrir environ 20% de la demande britannique.

Le pays scandinave subvient déjà à 30% des besoins français et 25% des besoins allemands.

“En raison de la hausse généralisée de la demande en Europe (…) il y a clairement un intérêt croissant pour le gaz norvégien, c’est pour cela que nous augmentons notre production et nos exportations”, explique à l’AFP le ministre norvégien du Pétrole et de l’Energie, Odd Roger Enoksen.

De 50 milliards de m3 en 2000, les exportations norvégiennes devraient passer à 130 mds de m3 en 2010.

Cette montée en puissance est bienvenue pour les pays européens sensibles à la question de la sécurité des approvisionnements et désireux de diversifier leurs fournisseurs au-delà de la Russie, qui couvre 25% de leurs besoins.

La “guerre du gaz” entre Moscou et Kiev avait révélé leur vulnérabilité l’hiver dernier: en raison d’un contentieux financier, la Russie avait fermé ses vannes vers l’Ukraine, affectant l’Europe de l’Ouest par ricochet.

“La Norvège est depuis longtemps un acteur gazier important et elle va le rester. Mais c’est la perception de la Norvège qui a changé à Bruxelles”, estime Arnstein Wigestrand, analyste d’Enskilda Securities.

Au nom de la libéralisation du marché, l’UE s’est un temps opposée aux accords de fourniture à long terme pratiqués en Norvège, réclamant une remise à plat des liens entre fournisseurs norvégiens et clients continentaux afin de rendre le marché plus fluide, rappelle-t-il.

“Mais aujourd’hui, l’UE a viré sa cuti. A Bruxelles, on doit maintenant se frotter les mains pour chaque m3 que les Norvégiens livrent”, ajoute l’analyste.

D’autant que la Russie tente ostensiblement de se rapprocher de l’Algérie, troisième fournisseur de l’UE avec une part de marché de 11%, éveillant la crainte de voir émerger un cartel gazier.

La création d’une “Opep du gaz” semble encore très hypothétique mais la Norvège exclut d’ores et déjà de s’y rallier.

“Une grande partie de notre production est écoulée via des contrats à long terme, nous sommes membres de l’EEE (Espace économique européen de libre-échange) et nous avons complètement libéralisé et ouvert nos livraisons de gaz. Nous n’avons donc pas l’intention d’emprunter ce chemin”, affirme M. Enoksen.

Selon lui, Norvège et Russie ne sont pas en concurrence en Europe.

“Nous dépendons l’une de l’autre pour fournir le marché européen aussi bien que possible”, souligne-t-il.

“La Russie sera, elle aussi, un fournisseur important et fiable à l’avenir (…) Si l’on ne fait pas ce qui est nécessaire pour garantir la sécurité d’approvisionnement, les pays consommateurs risquent de se détourner du gaz au profit d’autres sources d’énergie”, ajoute-t-il.

Langeled n’est pas encore complètement fini que déjà le pays scandinave songe à construire un nouveau gazoduc vers l’Europe qui s’ajouterait aux 7.800 kilomètres de conduites déjà existantes ou prévues. Parmi les destinataires cités, la Belgique, les Pays-Bas ou, de nouveau, la Grande-Bretagne.

 25/10/2006 09:01:08 – © 2006 AFP