Opportunités algériennes

Par : Autres


Opportunités
algériennes

 

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Proximité
géographique et culturelle, complémentarité économique, croissance… Les
entreprises tunisiennes gagneraient beaucoup à

s’intéresser de
plus près au marché de leur grand voisin de l’Ouest. Depuis l’arrivée au
pouvoir d’Abdelaziz Bouteflika, en 1999, Tunis et Alger entretiennent des
relations assez bonnes, et qui s’améliorent d’année en année. Les deux
gouvernements viennent d’ailleurs de s’entendre sur la relance de leur
coopération bilatérale. Mais, réunis à Alger le 30 septembre 2004 pour la
quatorzième session de la Haute Commission mixte, les premiers ministres
algérien et tunisien avaient regretté que leurs relations économiques ne
soient pas à la hauteur de leurs rapports politiques.

 

Les échanges
entre les deux pays ne représentent que 250 millions de dollars, soit à
peine plus de 1 % des commerces extérieurs respectifs*. Pourtant, les
opportunités d’affaires ne manquent pas. « Au contraire, relève Hassen
Zargouni, consultant international et directeur du cabinet Sigma Conseil,
leader maghrébin des études marketing et médias, la structure des deux
économies est beaucoup plus complémentaire qu’on l’imagine. »

 

L’économie
tunisienne est nettement plus diversifiée que celle de son grand voisin de
l’Ouest et possède un tissu très dense d’industries manufacturières et
agroalimentaires, ainsi que des sociétés de services performantes. Alors que
l’économie algérienne repose essentiellement sur les hydrocarbures (97 % des
exportations) et l’industrie lourde. Le pays est un gros importateur de
biens d’équipements et de produits agroalimentaires

 

Rien n’est fait
d’ailleurs pour décourager les importations puisque entre 35% et 40 % des
crédits bancaires sont attribués aux importateurs, au détriment, là encore,
de la production locale. Au cours des onze premiers mois de 2004, l’Algérie
a vendu à la Tunisie pour l’équivalent de 85,873 millions de dinars
tunisiens (1 DT = 0,62 euro). Le gaz (43,9 %), l’acier (32,6 %) et
l’ammonite – un engrais chimique – (10,8%) composent le tiercé de tête de
ses exportations, constituées de 268 types de produits différents. Sur la
même période, la Tunisie lui a vendu pour 119,055 millions de DT. La
typologie des exportations tunisiennes vers l’Algérie, plus complexe, se
compose de 892 produits différents. Le ciment est, avec 18 % de la valeur
totale, le premier poste d’exportation, mais ce chiffre est à relativiser
dans la mesure où les deux pays possèdent une cimenterie en commun,
implantée en Tunisie, et dont les ventes sur le marché algérien sont
comptabilisées au titre des exportations tunisiennes.

 

Les produits
chimiques (8,4 %), les machines-outils (7,9 %), les ouvrages en acier (6,9
%), les couches pour bébé (5,8 %), les composants automobiles (5,6 %), les
composants électroniques (5,1 %) et les plastiques (4,5 %) complètent le top
7 des exportations tunisiennes. Jusqu’en 2003, la balance commerciale de
l’Algérie avec la Tunisie était excédentaire (167,5 millions de DT
d’exportations, contre 133,4 millions d’importations). Aujourd’hui, du moins
pour les onze premiers mois de 2004, cette tendance s’est complètement
inversée.

 

Quels
enseignements tirer de ces statistiques ? Que les entreprises tunisiennes
ont vraiment à gagner à s’intéresser davantage au marché

algérien. « Pour
plusieurs raisons, explique Hassen Zargouni. D’abord la conjoncture.
L’Algérie enregistre des taux de croissance à la chinoise, et son PIB va
dépasser 80 milliards de dollars l’année prochaine. C’est un pays solvable,
inondé de produits étrangers et où les multinationales sont très offensives.
Mais il y a de la place pour tout le monde, car la demande est forte et les
besoins sont immenses. Une société tunisienne comme Saida, le fabricant de
biscuits, vient d’y réussir une belle percée. Autre argument, la taille du
marché algérien : 30 millions de consommateurs et un revenu national par
habitant d’environ 2 300 dollars par an, soit à peine 550 dollars de moins
que celui des Tunisiens. Et les Algériens seront 48 millions en 2050 !
L’étroitesse du marché tunisien (10 millions de consommateurs, 13 millions
en 2050), est un frein à l’expansion des entreprises nationales. Pour se
développer, elles devront chercher des relais croissance à l’étranger. 
Elles ont beaucoup – voire trop – misé sur l’Europe. L’Algérie leur offre
une chance de diversification à ne pas négliger. » Bien sûr, les obstacles
ne manquent pas. Juridiques : la législation algérienne n’est pas toujours
très accommodante pour le rapatriement des bénéfices. Commerciaux : la
chaîne de distribution n’est pas encore très structurée en Algérie, il faut
trouver le bon partenaire, le bon réseau de vente. Trop de grossistes se
contentent d’acheter et d’écouler les produits sans se soucier ni de
politique commerciale, ni d’image de marque, ni de positionnement du
produit. Pour une société qui souhaite s’inscrire sur le long terme, c’est
fâcheux. Mais les torts sont partagés, car, dans le passé,  le
comportement des exportateurs tunisiens n’a pas toujours été exemplaire.

 

Loin de là.
Enfin – cet aspect est plus vrai dans le secteur des services -, le chef
d’entreprise algérien peut se montrer « culturellement réticent » à
s’adresser à une société ou à un consultant tunisien. « Sa première réaction
sera de se tourner vers des Français, des Allemands ou des Américains »,
déplore un chef d’entreprise tunisien. Mais, malgré les freins et les
pesanteurs institutionnelles, les entreprises tunisiennes qui ont tenté
l’expérience en Algérie n’ont pas eu à le regretter. C’est le cas du
laboratoire Jasminal, ou du fabricant de biscuits Sotubi. Le groupe familial
Bayahi (distribution) est lui aussi un précurseur. Il a apporté son
savoir-faire pour le lancement de Djezzy, le premier réseau de téléphonie
mobile (2,8 millions de clients), et il gère actuellement 20 % des boutiques
de vente. Toujours dans le négoce, on peut également citer le groupe El-Arem
ou encore Loukil, qui écoule une gamme très large de produits, allant des
poids lourds aux machines-outils. Le bureau d’études Dirasset, spécialisé
dans l’ingénierie et l’urbanisme, s’est imposé sur le créneau des marchés
publics. Il a su valoriser une expérience acquise en Tunisie dans
l’aménagement des zones littorales et touristiques. Autre success story,
celle de la société Oxia, spécialisée dans l’analyse des systèmes
d’information et la gestion intégrée de l’entreprise, des domaines dans
lesquels les firmes algériennes accusent un réel retard.

 

Enfin, quelques
industriels du textile, l’un des secteurs phares de l’économie tunisienne (2
050 entreprises, 240 000 emplois), commencent aussi à regarder vers l’Ouest.
Le démantèlement des accords multifibres qui garantissaient un accès
privilégié sur le marché européen – le débouché naturel des exportations
textiles tunisiennes -, pousse en effet à la diversification. Aramys Group
commence à s’intéresser à l’Algérie et Megastone vient d’ouvrir une boutique
sur Didouche-Mourad, l’une des principales artères commerciales d’Alger,
l’ont compris avant les autres. En revanche, les professionnels du tourisme,
eux, ont su davantage exploiter les complémentarités entre les deux pays :
800 000 Algériens viennent chaque année passer leurs vacances du côté de
Tabarka, Hammamet ou Sousse, ce qui a largement compensé la crise du marché
allemand, traditionnel émetteur de touristes. Et, aujourd’hui, les relations
se développent rapidement entre opérateurs des deux pays, car les synergies
existent. Un partenariat structuré permettrait d’imaginer et de
commercialiser en Europe des circuits sahariens tuniso-algériens, et les
hôteliers tunisiens pourraient faire profiter leurs homologues algériens de
leur savoir-faire dans ce domaine.

 

 

* Chiffre
qui ne tient pas compte des échanges « informels » (la contrebande des
régions frontalières), estimés à environ 40 % de ce total.

 

 

(Source : par SAMY GHORBAL
JEUNE AFRIQUE
L’INTELLIGENT
– 17 janvier 2005)

 


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05- 02 – 2005 à 10:00

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