La Fondation Mohamed Ali El Hammi  (FMAH) anciennement Acmaco,  a tenu, les 1, 2 et 3 septembre 2023, à Hammamet, sa traditionnelle université d’été, sur le thème «Polycrise et approche citoyenne Quels rôles des élites, des acteurs sociaux et de l’Etat ?».

Le premier panel de cette université a rendu un vibrant hommage légitime à la FMAH qui fête son 30ème anniversaire.

Dans une communication intitulée «30 ans d’Université d’Eté : quel bilan ? Quel avenir? Quels acquis? Quels défis ? », Jacques Ould Aoudia, économiste- chercheur français a qualifié la fondation de « lieu unique sur la rive Sud de la Méditerranée, un espace de liberté de pensée, un espace ouvert sur les partenaires nationaux et internationaux, au bilan impressionnant : un gisement de connaissances accumulées ! ».

A l’écoute des préoccupations des Tunisiens

Selon le conférencier, ce think tank a été « à l’écoute du monde, de ses évolutions, une capacité d’identifier les problèmes cruciaux que se posent les sociétés, du Sud mais aussi du Nord de la Méditerranée : mondialisation, Partenariat Euromed, recul du mouvement syndical dans le monde, montée de l’autoritarisme… ».

Au nombre des thèmes phares sur lesquels les universités d’été de la FMAH s’est longuement attardée, le chercheur a cité, l’élaboration d’un « modèle de développement » politique, social, économique, environnemental alternatif, la recherche d’un nouvel équilibre entre les trois acteurs de développement : un Etat stratège et son administration, les secteurs privés et public et le tiers secteur avec comme composante essentielle la société civile ».

Parmi les réalisations intellectuelles de la FMAH, Jacques Ould Aoudia a évoqué la réflexion sur la modernité qui a débouché sur un ouvrage collectif de prospective « Pour un renouveau du Projet Moderniste Tunisien : Tunisie 2040 » finalisé en 2010. Cet ouvrage a fourni, d’après lui, les bases de la réflexion et a armé l’ACMACO pour analyser ce qui allait se passer en 2010-2011.

La FMAH a accompagné intellectuellement la transition démocratique

Les universités d’été de la FMAH après 2011 ont été, justement, consacrées aux problématiques de la transition démocratique. La FMAH a apporté le plus en accompagnant intellectuellement cette transition.

Le conférencier a rappelé les principaux thèmes des débats qui ont eu lieu à ce propos :  Analyse de la signification de la « révolution de 2011 » : un mouvement à trois composantes : politique (liberté, démocratie), sociale (non aux prédateurs), identitaire (respect de notre identité).

Au rayon des acquis, il a cité les libertés publiques (presse, création de partis, d’associations…). Il a rappelé aussi les débats houleux sur la Constitution de 2014 qualifié par les participants à l’université d’été de 2018 de « piège paralysant ». Avec un équilibre des pouvoirs entre la Présidence, le Parlement et le Gouvernement, l’action publique est figée. Dans ce contexte, l’Université d’été de 2021 a été consacrée à l’évènement du 25 juillet 2021.

Intervenant sur ce sujet, Habib Guiza, président de la FMAH a fait remarquer qu’« après 12 années de transition vers la démocratie, la Tunisie vit un contexte de polycrise qui empêche l’émergence d’un modèle de gouvernance crédible. Après une première parenthèse de règne des partis (particratie) et une seconde période de « démocrature », le pays connait des dysfonctionnements du système politique et un flou de gouvernance qui menacent les quelques acquis de liberté et entachent l’autonomisation des acteurs sociaux et l’émergence des forces de rénovation et de reconstruction de l’économie et de la société…”.

Ouverture de la FMAH sur le monde

Jacques Ould Aoudia a fait ressortir dans sa communication l’ouverture de la FMAH sur le monde. Pour preuve l’université d’été de 2023 a invité les ambassadeurs du Brésil et de l’Afrique du Sud pour donner des éclairages sur le BREXIT dont leurs pays font partie des fondateurs.

« Dans un monde en mutation profonde, avec l’émergence de puissances qui contestent la domination absolue de l’Occident et la montée du populisme et ses corollaires (recul de la démocratie, retour des régimes autoritaires, repli identitaire…), note le chercheur, l’enjeu de nos jours est d’inventer une nouvelle gouvernance endogène attentive à la paix sociale, aux autosuffisances nationales dans tous les domaines, aux urgences environnementales et climatiques… ». Ce sera peut-être la prochaine thématique de la prochaine université d’été de la FMAH.