Un accord de partenariat favorisant un transfert technologique de grande qualité dans un domaine de pointe, la microélectronique vient d’être conclu entre l’université de Carthage (L’Institut National des Sciences Appliquées et de Technologie (INSAT) et l’université de Grenoble Alpes. En vertu d’une convention signée, le 15 mai 2023, lors des journées d’information et de sensibilisation en « Microélectronique », organisées par les deux universités, des ingénieurs tunisiens seront formés aux compétences microélectroniques, particulièrement, dans les Kits de matériel électronique spécialisés ‘STM 32 LoT node » (internet of things), fournis par l’entreprise STMicroelectronics-Tunisie.

Objet de cette convention, la microélectronique désigne l’ensemble des technologies de fabrication de composants qui utilisent des courants électriques pour transmettre, traiter ou stocker des informations.

Les technologies de la microélectronique sont, en grande partie, à l’origine des formidables progrès réalisés ces dernières décennies dans le domaine entres autres de l’informatique, des télécommunications et de l’imagerie.

Concrètement, la microélectronique joue un rôle très important dans la digitalisation de la société de demain. L’industrie microélectronique (Intel, Samsung, TSMC, STMicroelectronics, Siemens, etc..) développe les circuits à base de semi-conducteurs, indispensable pour les applications du monde de numérique.

La microélectronique : un moteur de progrès dans les domaines de l’informatique et des télécommunications

Nouveau cursus de formation des ingénieurs

Pour revenir à la convention, elle prévoit particulièrement, un accompagnement de l’INSAT, par l’université de Grenoble Alpes pour la mise en place d’une option en « microélectronique » en 4eme et 5eme de la formation ingénieur de l’Institut. Entendre par là la formation d’un plus grand nombre d’ingénieurs en la matière.

L’INSAT formera des ingénieurs avec une compétence « en microélectronique » ayant un spectre de connaissances étendu, allant de la physique de matériau, de l’électronique analogique-numérique, du traitement des données, du système embarqué et des ¬capteurs à la conception de circuits et systèmes intégrés mixtes. Une attention particulière est donnée aux outils de conception numérique pour les architectures 2D et 3D en technologie CMOS, la formation en salle blanche pour les étudiants de l’INSAT sur des technologies de pointe pour la fabrication des dispositifs semi-conducteurs et la formation des formateurs.

Globalement, le projet est d’une grande envergure pour les deux parties en ce sens où il y aura le soutien pédagogique et matériel de STMicroelectronics-Tunisie, de CIME-nanotech, de l’INP-Grenoble et du laboratoire de Technologie Microélectronique.

Du reste, l’accord vient consacrer l’ouverture de l’université sur l’industrie. Plus exactement l’établissement d’un partenariat entre l’INSAT, établissement public spécialisé dans la formation de techniciens supérieurs et d’ingénieurs dans l’informatique, chimie et biologie et STMicroelectronics-Tunisie société basée à la technopole d’El Ghazala et spécialisée dans développement, fabrication et commercialisation des puces électroniques. C’est une filiale d’un des tout premiers acteurs mondiaux du secteur économique de la production de composants à semi-conducteurs.

En plus, ce projet permettra aux structures de recherche de l’université de Carthage de collaborer avec les clusters en « microélectronique » de la région du Grenoble.

Les futurs enjeux de la microélectronique

Ce partenariat intervient à la veille de l’élaboration par les majors de la microélectronique (CEA, Soitec, Global-Foundries et STMicroelectronics), de la mise au point d’une nouvelle génération de cette technologie (FD-SOI, silicium sur isolant totalement déplété).

Selon le communiqué rendu public à cette occasion, les semi-conducteurs et l’innovation FD-SOI ont une valeur stratégique pour la France et l’Union Européenne ainsi que pour les clients du monde entier.

Le FD-SOI apporte des avantages significatifs aux concepteurs et aux systèmes clients, notamment une consommation d’énergie réduite ainsi qu’une intégration simplifiée de fonctionnalités supplémentaires telles que la connectivité et la sécurité, une fonctionnalité clé pour l’automobile : les applications IoT et mobiles.

En Tunisie, du fait de l’importance croissante que les composants électroniques et microélectroniques vont prendre dans tous les produits, il est stratégique que ces technologies soient mises à disposition de l’économie tunisienne pour les années à venir.  Dans ce domaine, la Tunisie a des opportunités à exploiter dans l’avenir en s’appuyant sur des entreprises multinationales.  En effet, les PMI peuvent se développer dans le domaine dit du « Back End Of Line» (fabrication finale), du test et des systèmes utilisateurs de puces et du prototypage de systèmes (assemblage de circuits, conception et réalisation de systèmes électroniques et mécatroniques, conception et réalisation de composants micro-optoélectroniques pour des applications spécifiques et des micro-capteurs MEMS). Cette industrie nécessitera principalement des ingénieurs « concepteurs » chargés de concevoir l’architecture des circuits, de définir leur fonctionnalité, puis de faire réaliser les prototypes, de les tester et de les valider. Ils utilisent, à cette fin, des outils informatiques spécialisés permettant de définir la constitution des différentes briques des circuits et la simulation de leurs comportements.

Un soutien pédagogique et matériel pour la collaboration entre l’INSAT et STMicroelectronics-Tunisie

Le non-dit de cet accord

Par-delà ces éclairages, cette convention appelle trois remarques.

Premièrement, nous pensons que ce transfert technologique de qualité pourrait s’expliquer, à priori, par la tendance de la France à relocaliser en Tunisie une partie de son industrie suite au mouvement de recomposition des chaînes de valeur générée par deux crises successives : la pandémie du corona virus covid 19 et la guerre russo-ukrainienne.

Deuxièmement, nous ne pouvons pas nous interdire d’exprimer certains inquiétudes qanat à la destination finale des ingénieurs une fois formés à la faveur de cette convention Et pour cause. La France avec sa stratégie de pays recruteur et chasseur de talents n’aurait accepté de transférer ce know how de pointe en faveur de l’INSAT, réputé du reste d’être producteur d’ingénieurs informaticiens exportables, que parce qu’elle est sûre de profiter, à terme de leurs services dans l’hexagone.

La microélectronique, une priorité stratégique soutenue par la France et l’Union Européenne

La Tunisie, qui n’a pas les moyens de les payer selon les normes internationales, ne pourrait pas les retenir.

Troisièmement, ce scénario, la France ne le cache aucunement. La microélectronique est une priorité stratégique pour ce pays.  Dans une brève rendant compte de cette convention publiée par le service économique de l’ambassade de France à Tunis, on lit en substance : le secteur microélectronique est « un secteur sous tensions qui bénéficie d’un soutien politique et financier, particulièrement, important en France ». Dont acte.