En 2020, 19 564 personnes ont essayé de quitter le sol tunisien sur des embarcations de fortune. Parmi elles, 14 489 étaient des Tunisiens et 5 075 des étrangers majoritairement des Subsahariens. 

En 2021, le nombre est passé du simple au double : 32 944 départs dont 18 853 tunisiens et 14 091.

En 2022 jusqu’au mois de novembre, ce sont 37 978 départs qu’on a empêchés. Le nombre de Tunisiens n’a pas varié : 18 853 contre 19 125 Subsahariens.

Ce qu’il faut relever est que le nombre de ceux qui ont réussi à partir est probablement le double de ceux qui ont échoué. Il faut donc compter que près de 80 000 individus ont rejoint les côtes européennes rien que cette année.

« En 10 ans (2011-2020), plus de 250 000 migrants traversent la Méditerranée en direction de l’Italie. La majorité invoque des raisons économiques, le manque d’avenir dans leur pays et l’espoir de trouver un travail en Europe »*.

Ces chiffres sont alarmants. Ils progressent régulièrement et, on l’a compris, les opérations d’immigration illégale ou sauvage sont l’œuvre de mafias très bien organisées en Afrique subsaharienne, en Tunisie et en Europe. C’est donc dans le cadre de partenariats gagnants/gagnants (sic) que ces activités criminelles sont organisées.

Sur le plan officiel, l’accord de partenariat privilégié, conclu en 2012 entre la Tunisie et l’Union européenne, pour un plan d’action s’étalant entre 2013 et 2017, n’a pas été clément envers la Tunisie. «L’ambition, selon une étude publiée par le site “Cairn. Info“ était claire : ouvrir la voie à l’externalisation des politiques d’asile et de retour de l’UE en Tunisie. C’est un plan pour la mise en place du “Partenariat pour la mobilité“ (PPM).

Le partenariat, qui a fait l’objet en 2014 d’une déclaration conjointe entre la Tunisie et l’UE, porte mal son nom », commente l’auteur de l’étude Cairn.Info : « En échange d’une politique de facilitation des visas, réservée à une petite élite ultra-qualifiée de ressortissantes tunisiennes, la Tunisie s’engagerait à signer un accord de réadmission par lequel elle faciliterait le retour sur son sol non seulement de ses ressortissants expulsés d’Europe, mais aussi des ressortissants de pays tiers ayant transité sur son territoire. Un accord qui ferait d’elle la “poubelle“ migratoire de l’Europe ».

C’était du temps d’Ennahdha prête à tout ratifier et tout accepter pour garder ses “amitiés“ et les appuis européens et être maintenue au pouvoir, et Marzouki, président obéissant qui s’est distingué par sa servitude et qui a été l’initiateur de l’élimination de nombre de visas facilitant l’accès des ressortissants africains à la Tunisie.

Aujourd’hui, alors que Tunis abrite une conférence régionale, organisée dans une totale discrétion par l’Union européenne pour débattre des moyens de lutter contre l’immigration clandestine, la criminalité transfrontalière et le terrorisme, on affirme de source crédible à l’OTE (Office des Tunisiens à l’étranger) que le nombre de Subsahariens arrivés en Tunisie s’élève à des centaines de milliers. Ces chiffres restent toutefois imprécis, du fait du nombre important de personnes en situation irrégulière qui atteignent les côtes ou qui entrent dans le pays par les frontières libyennes fort poreuses.

Le sale rôle du HCR, de l’OIM et des ONG tunisiennes devenues des mercenaires

Les membres de la communauté africaine, si on en exclut les étudiants arrivés par voie régulière et dont le nombre ne dépasse pas les 15 000, se regroupent dans des ghettos à Borj El Ouzir (gouvernorat de l’Ariana), à Laouina et Bhar Lazreg (gouvernorat de Tunis), à Sfax et dans les régions frontalières entre la Tunisie et la Libye. Ils appliqueraient leurs propres lois et auraient même créé des associations pour protéger leurs droits contre les “exactions des Tunisiens“ (sic). Les exactions, de source officielle au ministère de l’Intérieur, sont presqu’inexistantes : « Ce sont les arguments avancés par les immigrés en situation illégale pour amener les pays européens à les accueillir pour des raisons humanitaires et inciter les ONG sur place à prendre leur défense même quand ils sont en infraction ».

Dans le royaume de la communauté subsaharienne, les braquages sont de plus en plus fréquents, les kidnappings entre différents groupuscules avec demandes de rançons, des maisons closes, des lieux de distraction avec trafic de stupéfiants et des lieux de culte non autorisés, des réseaux sociaux pornographiques, etc. Ceci sans oublier le développement des réseaux de mendicité maquillée ou directe et les crimes financiers liés au trafic d’êtres humains.

« Nous assistons à des formes de criminalités auxquelles nous n’étions pas habitués », explique un officier de la police judiciaire.

Les Subsahariens en Tunisie sont protégés par le Haut comité des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et l’OIM (Organisation internationale pour les migrants) dont la seule mission est de faire en sorte que la Tunisie les garde sur son sol pour qu’ils n’atteignent pas les côtes européennes.

L’OIM et le HCR sont de toute évidence les bras sécuritaires de l’Europe en Tunisie. En voulant protéger ses frontières, l’Europe compte tout faire pour transformer la Tunisie en une “terre de résidence“ après avoir été une “terre de transit“.

Partir en Europe ou rester en Tunisie

Les réseaux mafieux qui organisent les déplacements des ressortissants africains leur offrent le choix du départ vers l’Europe ou de vivre en Tunisie. Ceci en l’absence totale d’une stratégie efficace de gestion du phénomène migratoire africain par l’Etat tunisien.

L’accord de 2012 avait préparé le terrain, les financements accordés avec beaucoup de générosité aux ONG “droits-hommistes“ ont permis de former une armée aux ordres de l’Europe pour mener des batailles médiatiques féroces à chaque fois que les autorités en place font allusion à la prise d’une quelconque décision relative au phénomène migratoire subsaharien devenu une menace pour la sécurité du pays.

« La Tunisie semble émerger comme la candidate privilégiée pour se transformer en terre de “stockage“ des indésirables », commente l’auteur de l’étude sur Cairn.Info.

En 2018, Tahar Chérif, ambassadeur tunisien à Bruxelles, clamait pourtant haut et fort le refus de la Tunisie d’accueillir sur son sol les “plateformes de débarquement régionales“ proposées par la Commission européenne totalement indifférente à l’impact de l’implantation d’une communauté africaine en Tunisie et aux risques du changement ethnique qui peut s’y produire. Sa voix est restée inaudible, et l’Europe, profitant de la fragilité économique du pays, continue à y appliquer son plan de “stockage“ des immigrés africains.

En Tunisie, aucune stratégie n’a été mise en place pour lutter contre l’occupation des diasporas africaines de l’espace géoéconomique nationale. Une partie de l’Administration publique sclérosée se refuse à autoriser ceux qui veulent rentrer dans leurs pays à le faire sous prétexte qu’ils doivent s’acquitter des indemnités de retard après avoir dépassé les délais de séjour définis. La frilosité, la peur des ONG prend le pas sur l’intérêt du pays. Il y a quelques mois, j’interpelais le gouverneur de Tunis : « Monsieur, trouvez-vous normal, ces tentes bordant des avenues résidentielles au Lac 1, couvrant les trottoirs, empêchant la circulation et dangereuses pour ceux-là même qui s’y nichent ? ».

La réponse a été des plus claires : « Nous ne pouvons pas intervenir, vous voulez que la foudre des ONG nous tombe sur la tête ? ».

Mais qu’attendre d’un gouverneur incapable de mettre de l’ordre dans sa propre ville transformée en un grand souk, laissant libre court au commerce parallèle et autorisant les étaux à couvrir les espaces publics ?

Quand on désigne des incompétents à la tête de postes importants et décisifs, ne nous attendons pas à des mesures efficientes pour protéger peuple et Etat.

Amel Belhadj Ali