JCCUne sélection de films coups de cœur du comité d’organisation de la session exceptionnelle organisée en 2020.

FINYE : LE VENT(MALI) -1982- de Souleymane Cissé

Enjeux interprétatifs de la féminité dans l’écriture de Souleymane Cissé:
Décrivant différents domaines de la vie en société, les films de Cissé montrent en effet que les femmes ont parfois des comportements assez inattendus. Le premier domaine concerné, c’est celui du travail. Dans Baara (1978), M’Batoma n’exerce aucune profession parce que son ingénieur de mari ne le veut pas — «par là, j’ai voulu indiquer que [l’ingénieur] n’était pas un héros positif», explique le cinéaste.

ALI ZAOUA, LE PRINCE DE LA RUE(MAROC) -2000- de Nebil Ayouch

Les enfants sont d’un maniement délicat à l’écran. Il est si facile de s’en servir pour arracher larmes ou sourires attendris. Surtout quand ils sont pauvres. Or il n’y a guère plus pauvre qu’Ali et ses trois amis, Kwita, Omar et Boubker, des petits garçons qui attendent l’adolescence en vivotant dans les rues de Casablanca. Au tout début du film, Nabil Ayouch montre le quatuor saisi par la caméra d’une journaliste de télévision compatissante à souhait. Ali raconte qu’il s’est enfui de chez lui parce que sa mère voulait vendre ses yeux.

Un temps, l’on peut croire que Nabil Ayouch pose cette séquence à l’entrée de son histoire pour faire monter les enjeux mélodramatiques. Cette vérité horrible va se compliquer, de par la volonté du cinéaste de ne pas réduire ses personnages au statut de victimes. Mais aussi de par la brusque convulsion dramatique qui fait basculer Ali Zaoua à peine les personnages installés dans le décor.

LE SULTAN DE LA MEDINA(TUNISIE) -1992- de Moncef Dhouib

Le film Ya Soltane El Médina repose presque entièrement sur le mouvement.
En effet dès les premières images, le film nous plonge au cœur des ténébreuses profondeurs du monde des squatters, las bas-fonds de la médina. Dans un foisonnement de mouvements quasi ininterrompus, la caméra suit les segments de parcours croisés de ces personnages singuliers, saisit ce huis clos labyrinthique qu’est le palais squatté.

De fait, dès les deux premiers mouvements d’appareil qui suivent le générique, un travelling sur Fraj, annonce un parti pris de la caméra…les mouvements de la caméra n’anticipent point, ne se désengagent pas du récit, ils suivent les parcours croisés des personnages. La caméra découvre ce que le sujet voit, en même temps que lui. Elle est solidaire du personnage. Elle est à la limite trop proche de lui…filmer les sujets squatters de la médina en mouvement, dans un espace qui n’est pas le leur, clos sur lui-même parce que usurpé, est en réalité un parti pris dans le film.

LES SABOTS EN OR(TUNISIE) -1988- de Nouri Bouzid

Réalisé en 1988, Les Sabots en or n’est sorti en Tunisie qu’en 1989, après que la censure, qui exigeait de Nouri Bouzid qu’il sacrifie trois minutes de film, eut obtenu du réalisateur trente-cinq secondes de coupes (consenties dans une scène d’amour et une autre de torture). Présenté au Festival de Cannes 1989, dans la sélection « Un certain regard », le film sort aujourd’hui seulement en France, sans que cet écart soit réellement préjudiciable à son intérêt. De Nouri Bouzid, ont déjà été présentés L’Homme de cendres (1986) et Bezness (1992) qui, chacun à sa manière, témoignaient de l’audace d’un cinéaste que rien ni personne ne semble devoir impressionner (en 1968, il a été condamné à six années d’emprisonnement, en tant qu’un des responsables du mouvement « Perspectives »).

C’EST EUX LES CHIENS (MAROC) -2014- de Hicham Lasri

En plein « printemps arabe », une équipe de télévision vient rendre compte de la colère de la rue. Dans le champ de la caméra, un homme apparaît en arrière-plan et on ne voit que lui. Vêtu d’un costume démodé, un bouquet de fleurs à la main, une roue de tricycle dans l’autre, il est immobile, hagard. Intrigué, le journaliste tente de lui soutirer un commentaire sur la révolte qui gronde. Non seulement le pauvre hère (Hassan Badida, excellent) a oublié son nom mais il semble ignorer tout des événements.

DANS MA TÊTE UN ROND POINT(ALGÉRIE) -2016- de Hassen Ferhani

“A quoi tu sais qu’un garçon est amoureux d’une fille ?” Aux abattoirs d’Alger, les plus grands d’Afrique, Hacène Ferhani s’intéresse à l’âme plutôt qu’à la chair. Le jeune réalisateur de trois court-métrages, qui passe avec Fi Rassi Rond-Point au long, ne filme pratiquement pas le travail pénible des ouvriers. Sa caméra s’attarde plutôt sur les heures creuses, notamment les soirées. Elle plonge jusqu’à l’intimité de ces employés, que cet enfant du quartier – il a grandi à Ruisseau – jure de ne pas avoir dirigés. A l’écran, ils sont eux-mêmes, dans leur entière vérité. Pour gagner la confiance et le cœur tourmenté de ces hommes, Hacène Ferhani et son preneur du son Djamel Kerkar ont passé plus de deux mois dans cette bâtisse en décrépitude.

EXAMEN D’ÉTAT(RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO) -2014- de Dieudo Hamadi

Un an après la présentation de son film Atalaku, le réalisateur congolais Dieudo Hamadi revient aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM), avec Examen d’État, un documentaire de 92 minutes qui pointe les circonstances parfois difficiles dans lesquelles des jeunes tentent de s’accrocher à l’ascenseur social qu’est l’obtention de diplômes.

Après un film sur la présidentielle en République démocratique du Congo (RDC), le cinéaste Dieudo Hamadi a braqué ses caméras sur un autre dossier d’État : l’avenir de la jeunesse, entre expectatives et déconvenues. Loin des arènes du pouvoir, le réalisateur se concentre précisément sur l’examen qui permet à bon nombre de Congolais d’obtenir leur sésame pour l’université, et pourquoi pas un meilleur avenir.

(Source : JCC édition 2020)