Pour combattre l’inflation, Moez Hadidane appelle à une coordination gouvernement-Banque centrale

Le conseil d’administration de la Banque centrale de Tunisie (BCT) sera contraint, durant sa prochaine réunion, de relever son taux directeur, qui est actuellement de 7%, pour maîtriser l’inflation.

C’est en tout cas ce que prévoit l’expert en économie et marchés financiers, Moez Hadidane.

“Mais cette mesure ne suffira pas pour contenir l’inflation, et le gouvernement devra prendre une panoplie de mesures”, affirme l’expert, qui réagissait à l’annonce de l’augmentation de l’inflation à 8,6% au cours du mois d’août 2022.

Le taux d’inflation (8,6%) a dépassé le taux directeur de la BCT (7,03%) en août 2022, ce qui a engendré un taux réel négatif de 1,6%

Dans une déclaration à TAP, il a ajouté “le silence de la BCT face à cette situation montre que l’inflation n’est plus seulement une question de politique monétaire mais aussi de politiques plus larges nécessitant une intervention du gouvernement”.

Le taux d’inflation (8,6%) a dépassé le taux directeur de la BCT (7,03%) en août 2022, ce qui a engendré un taux réel négatif de 1,6%, explique Hadidane. Pourtant, la BCT n’a pas communiqué, depuis le 10 juin 2022, sur la situation.

Le Conseil d’administration de la BCT, qui s’est tenu 5 fois depuis début 2022, avait décidé lors de sa dernière réunion de maintenir le taux directeur principal à 7%.

“Une augmentation de ce taux ne suffira pas pour maîtriser l’inflation parce qu’il ne s’agit pas d’une inflation monétaire soumise à la politique de la BCT mais plutôt une inflation importée et liée à des problèmes structurels”, a tenu à rappeler l’universitaire.

Il a, à cet effet, insisté sur la nécessité de coordonner entre le gouvernement et la BCT pour combattre l’inflation à travers la mise en place de politiques liées à la balance commerciale, des réformes structurelles, la révision du système des prix et l’examen des causes réelles de l’inflation.

Selon lui, “le silence de la BCT prouve que l’inflation commence à se sortir de sa sphère, d’où la nécessité d’engager des réformes profondes”.

Une augmentation de ce taux ne suffira pas pour maîtriser l’inflation parce qu’il ne s’agit pas d’une inflation monétaire mais plutôt une inflation importée et liée à des problèmes structurels

L’expert a ainsi plaidé en faveur d’actions pour fortifier ” l’immunité ” de l’économie nationale et faire face aux retombées des crises exogènes à travers la consolidation des fondements de l’économie, le renforcement du secteur industriel et la libéralisation des prix.

En ce qui concerne les réserves en devises de la Tunisie, Hadidane estime que le déficit commercial a contribué à épuiser les réserves qui ne couvrent pour l’heure que 115 jours d’importation, une moyenne qu’il qualifie de “faible”.

Le pire déficit commercial aura lieu fin 2022

D’après l’expert, la Tunisie connaitra à la fin de l’année 2022, le pire déficit commercial de son histoire. Celui-ci atteindra 22 milliards de dinars, ce qui va influer sur les réserves en devises du pays et les rendra insuffisantes à rembourser les dettes de la Tunisie sur le marché financiers durant la période 2022-2025.

Revenant sur l’accord entre la Tunisie et le FMI, Moez Hadidane fait observer qu’une fois conclu, il permettra d’accroitre le volume des réserves en devises du pays, mais reste une solution conjoncturelle et non une solution radicale pour cette crise.

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Par ailleurs, l’expert a imputé les inquiétudes exprimées, récemment, par la BM, aux avertissements de l’Union Européennes, partenaire principal de la Tunisie qui tablent sur une récession de l’économie européenne au cours des mois prochains.

Pour mémoire, le gouverneur de la BCT, Marouane El Abassi, avait insisté, dans le préambule du rapport sur l’activité de la BCT pour l’année 2021, rendu public le 25 août 2022, qu’une reprise de l’économie nationale requiert une rupture avec l’attitude d’attentisme qui persiste. Il a souligné que la période post-covid-19 est décisive et qu’il faut que la Tunisie atteigne un taux de croissance plus élevé. “La réalisation de cet objectif n’est possible qu’à travers des réformes structurelles avec le rattrapage du retard résultant de l’instabilité politique au cours de cette dernière décennie”, a-t-il dit.

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