Tunindex rebondit mais sans vigueur. Le bilan de la Bourse pour l’année 2021 rompt avec la baisse de 2020 mais manque de panache. Le Marché alternatif pourrait donner un coup de fouet à la physionomie boursière. Sa réactivation est suspendue à … une décision administrative.

Point de presse périodique à la Bourse de Tunis. Avec revue des indicateurs et des principales rubriques d’activités. Le marché renoue avec la hausse. Le Tunindex au 12/11 a réalisé un gain de +2,32% contre –3,33% à la même période de l’année 2020. Cela représente un léger mieux. Cependant l’on devinait que dans l’esprit des dirigeants de la Bourse, derrière la revue des indicateurs d’activités, le souci majeur est de réactualiser la fonction de la Bourse dans le financement de l’économie.

Des indicateurs en augmentation…

Le Tunindex s’arrache à la monotonie économique nationale. Il point le nez avec un score modeste mais positif malgré tout, en rupture avec son trend de 2020. Alentour les Bourses arabes varient de +6,7% pour le marché du Caire à +36,9% pour la Bourse de Riyadh.

Et pour les principales places internationales, Shanghai ouvre le bal avec un maigre +1,9%, alors que Paris culmine à 27,7% snobant, et de loin, le Dow Jones lequel a tout de même réalisé +18%.

Par conséquent, il est difficile de parler d’embellie pour le Tunindex même si tout indique qu’il persiste à augmenter d’ici la fin de l’année. En réalité, le Tunindex rend un résultat économique biaisé car sa représentativité est tronquée.

En effet, des secteurs aussi importants que le tourisme, les télécoms ou l’agriculture ne figurent pas encore dans sa composition. La Cote est dominée par les valeurs financières à hauteur de 42% et celles des entreprises de biens de consommation avec 38,4%.

Sur les 10 premiers mois de 2021, on a échangé pour 1,4 milliard de dinars tunisiens, ce qui représente une augmentation de +21% par rapport à 2020.

Mais un marché avec certains handicaps

La capitalisation boursière est en progression de +0,54% par rapport à 2020. Elle se situe à 23,2 milliards de dinars. Cette caractéristique ne risque pas de tenter les fonds d’investissements internationaux car elle reste en dessous d’une masse critique attractive.

Outre cela, les indicateurs du marché exprimés en devises étrangères donnent de maigres résultats. Le Tunindex a augmenté de +3,4% en euros et de -2,8% en dollars US. D’ailleurs, la part de la participation étrangère dans la capitalisation boursière a baissé de 1,7% par apport à la même période de 2020.

De l’aveu même des dirigeants de la Bourse, la marché reste dominé par les petits porteurs car n’ayant pas atteint une taille critique. Cette faible profondeur grève son émancipation internationale.

La physionomie du marché

La Bourse de Tunis a tout de même de jolis atouts. Technologique, d’abord. Le marché tourne avec superCac qui est une solution fortement représentée sur Euronext et de nombreuses places émergentes telles Casa, Amman, Varsovie ou Sao Polo.

Le règlement du parquet est de bon niveau encore que l’on annonce une réforme imminente laquelle va améliorer ce cadre réglementaire. La discipline y est bien respectée. Les retards de Com’ des états financiers y sont sanctionnés. Les retardataires sont mis à l’index car listés sur un compartiment “S“ comme pour dire “sous surveillance“. Et cela les fait réagir.

Au mois d’octobre dernier, seules 2 entreprises sur les 78 listées au marché n’ont pas publié leurs indicateurs. L’on regrette qu’à ce jour la Cote soit restée figée sans avoir enregistré d’introductions nouvelles. Une probable introduction pourrait avoir lieu avant la fin de l’année, nous dit-on. Cela fait que tous les regards se tournent vers le Marché alternatif.

Le Marché alternatif : perspectives et réalités

L’on sentait bien que ce marché correspondait à une réalité nationale. En effet, le tissu économique est fortement composé de PME performantes friandes en financement. Et avides de croissance. Remarquez bien que c’est la PME qui embauche le plus. Le compartiment alternatif a bien démarré en 2007. Mais son profilage a manqué de rigueur. Les conditions d’introduction sont aussi sévères que pour les grandes entreprises. Ce qui est pénalisant au vu du gap de standing entre les deux entités. Et tous les investisseurs ont été admis à participer.

Le Marché alternatif est risqué et, par conséquent, certains retournements quand ils se produisent peuvent rebuter le gros du bataillon des investisseurs particuliers. Les dispositions légales adéquates ont été prises et seuls les investisseurs institutionnels sont autorisés à opérer.

Par ailleurs, seules les opérations de “cash in“ sont désormais recevables. Ces entreprises ont besoin de conforter le haut de leur bilan et c’est bien logique. Les opérations de “cash out“ sont prescrites. Ce marché est attractif car il permet aux valeurs prometteuses de conforter le haut de leur bilan, et d’échapper à la sous-capitalisation.

Les autorités de la Bourse ont soumis au ministère des Finances la proposition d’alléger la formalité d’émission d’un prospectus de 200 pages, frein rebutant pour les introductions. Il s’agit de le ramener à un format simplifié plus en ligne avec les moyens des entreprises concernées. L’autorisation du ministère ne vient toujours pas, pourtant la requête est tout à fait recevable. Si cette contrainte était levée, on aurait une meilleure affluence à coup sûr sur ce compartiment.

On peut toujours plaider aussi en faveur d’un compartiment NASDAQ pour nos nombreuses et vaillantes start up. On nous promet que cela ne saurait tarder !

Les avantages de la finance directe

Le clou de ce point de presse a été le message subliminal mais non moins perceptible et pertinent de la relance de la finance directe.

Rappelons qu’elle n’est pas inflationniste, atout majeur en ces temps de vulnérabilité de la politique monétaire et celle budgétaire. De surcroît, elle favorise l’actionnariat populaire, ce qui est une attitude de justice économique.

La Bourse est sûre de sa vocation bénéfique et plaide, une fois encore, arguments techniques en mains, pour avoir plus de champ dans le financement de l’économie. Il est vrai que les grandes entreprises trouvent aisément échos auprès du système bancaire. Mais le financement par crédit comporte des risques variés et divers et systémiques notamment. Cela surexpose le système de paiement du pays. Ce faisant, en s’arrangeant auprès du système bancaire, les grandes entreprises échappent aux contraintes de la transparence, non pas fiscale, mais managériale et de gouvernance. Rappelons tout simplement que ce n’est pas un comportement de bonne éthique.

Par ailleurs, la finance directe dispose des actifs dédiés aux entreprises tunisiennes. Nous citerons le certificat d’investissement, le Global Depositary Reciept (GDR), l’action à dividende prioritaire (ADP). Pareil pour les obligations convertibles en actions. Nous regrettons que chacun de ces actifs ait connu une expérience exclusive qui n’a pas été rééditée. On peut aisément les dupliquer au service du renforcement autant du haut du bilan des entreprises que de leur trésorerie.

Voilà une possibilité réelle de se servir des leviers de rupture et d’aller vers un nouveau modèle économique.