L’événement en matière de logistique de transport minier a été créé, le 20 février 2020, avec la mise en circulation de nouvelles locomotives flambant neuves, pour le transport du phosphate. Mais fête, il n’y en a pas eu. hélas !

La nouvelle, qui aurait dû bénéficier d’une large couverture médiatique en raison des enjeux qu’elle sous-entend, a été fournie comme une vulgaire information sur la page tweeter du chef du gouvernement chargé de la gestion des affaires courantes, Youssef Chahed.

Ce dernier aurait dû, au nom du principe de la continuité de l’Etat, charger le ministre sortant de l’Industrie et des PME de rehausser de sa présence la cérémonie de mise en circulation de ce premier lot d’une dizaine de locomotives sur un total de 20 fabriquées par l’usine américaine Electro-Motive relevant du groupe Progress Rail dans le cadre d’un contrat de 165 millions de dinars attribué en décembre 2016.

Une opportunité pour réduire le déficit de la SNCFT

Abstraction de cet esprit d’irresponsabilité, au regard de ses multiples avantages, le retour au rail pour le transport du phosphate ne peut être perçu que comme un événement majeur et pour l’entreprise publique (la Société nationale des chemins de fer tunisiens) -qui exploite ce réseau- et pour la communauté du bassin minier -qui a beaucoup pâti de la pollution générée par le transport par camions.

Pour comprendre pourquoi on est arrivé à ce stade, sachez qu’au temps de Ben Ali, de hauts responsables du secteur minier, au lieu d’investir dans le renouvellement des locomotives, ont préféré sous-traiter au prix fort (25 dinars la tonne contre 8 dinars par voie ferrée), le transport de phosphate avec des camionneurs privés.

L’argument fourni à l’époque était que le parc ferroviaire ne satisfait pas les besoins. Autrement dit, le parc des locomotives est insuffisant, faible et obsolète. L’âge moyen des locomotives était de 33 ans. Les trains disponibles ne pouvaient transporter, en moyenne et par jour, que des quantités inférieures à 10 000 tonnes, soit environ 8 à 9 000 tonnes par jour, sur un total transporté quotidiennement de 18 000 tonnes, ce qui est insuffisant pour faire fonctionner à plein régime et dans des conditions acceptables les usines du Groupe chimique.

Ce retour à la voie ferrée pour le transport du phosphate est une bonne nouvelle pour la SNCFT en ce sens où elle va renouer, à travers l’acquisition de ces nouvelles locomotives, avec une activité fort rémunératrice et pérenne, en l’occurrence le transport du phosphate par le train, ce qui va lui permettre de réduire son déficit dans ce créneau.

L’acquisition de ces nouvelles locomotives, financée par un crédit de 167 millions de dinars fourni par un pool de banques tunisiennes (Attijari bank, BNA, UIB, ATB, BT, STB), va lui permettre de renouveler, de manière significative, son parc et d’accroître sa capacité en matière de transport de phosphate, et surtout d’améliorer le rendement du secteur minier et de réduire le coût de transport.

Il est prévu de porter, à la faveur de ce nouvel matériel, la capacité de transport à 3 200 tonnes contre 2 000 tonnes pour les locomotives anciennes avec une vitesse comprise entre 71 et 100 Km/h.

Mieux, ce nouveau matériel permettra, d’ici 2021, de transporter totalement le phosphate par voie ferrée et d’arrêter le transport par les camionneurs.

Le train est plus respectueux de l’environnement

Ce retour au rail est aussi une très bonne nouvelle pour la communauté du bassin minier et de ses environs en ce sens où le transport par train va améliorer, quelque peu, la qualité de l’environnement et réduire la pollution sonore et atmosphérique (échappement de poussière sur une grande échelle) générée par le trafic des camions.

Par ailleurs, la décision prise le 7 juin 2019 par un conseil ministériel en vue d’arrêter définitivement, vers 2021, le transport du phosphate par camions va réduire le nombre d’accidents de circulation provoqués par le dense trafic de ces engins lourds et toujours pressés.

Cela pour dire que l’option pour le transport exclusif du phosphate par voie ferrée ne peut être que saluée, car elle engrange plusieurs avantages pour la bonne santé financière d’une grosse entreprise publique stratégique comme la SNCFT et pour un meilleur environnement moins pollué pour les communautés du bassin minier.

Et pour être complet sur ce sujet, les nouvelles locomotives vont transporter le phosphate des six sites de production (Redeyef, Metlaoui, Moularès, Le Kef – Eddour, Mdhilla, Sehib) aux usines de transformation de phosphate à Mdhilla, Gabès, Skhira (Siape 2 et Usine TIfert).