Pour réussir sa mission, la Police de l’environnement doit applique les lois, dixit Jamel Boujeh

Après seulement 5 mois de son installation dans 74 municipalités, dont le Grand Tunis, la Police de l’environnement est entrée en activité et à verbaliser les contrevenants.

Les Tunisiens, lassés de voir leurs belles villes se transformer en poubelles à ciel ouvert, attendent beaucoup de ce nouveau corps de police. Mais le chef du Corps de la Police de l’environnement et chargé de mission auprès du ministre des Affaires locales et de l’Environnement, Jamel Boujeh, dans une interview accordée à l’agence TAP, estime que “sa réussite est tributaire de l’évolution du degré de civisme des citoyens et aussi de celui de l’application effective des lois contre les contrevenants”.

Comment fonctionne la Police de l’environnement 5 mois après son entrée activité? 

Jamel Boujeh: Nous sommes déterminés à appliquer la loi parce que la protection de l’Environnement est, à mon avis, une question de sécurité nationale. Un environnement pollué ne peut créer qu’un peuple malade. Pour cela, il faut faire face et sanctionner toutes les pratiques qui portent atteinte à l’environnement et à la propreté du milieu. Il est vrai que la Police de l’Environnement est encore un nouveau-né, mais nous sommes animés par la bonne volonté pour réussir notre mission et rendre nos interventions plus efficaces avec la contribution de toutes les parties, en particulier, le citoyen lui même.

Nous ne seront pas seuls dans notre lutte. Il y a d’autres corps et d’autres organismes qui luttent au profit de l’environnement et ceci montre que l’intérêt porté à ce secteur n’est pas nouveau en Tunisie. Nous travaillons de concert avec toutes ces parties et nous intervenons aujourd’hui dans plusieurs localités. Nous espérons que le corps de la Police de l’environnement sera mieux équipé et partant apte à fonctionner dans les 350 municipalités de la Tunisie.

Quand exactement, d’après-vous, la Police de l’environnement sera opérationnelle dans toute la Tunisie?

Il faut encore du temps, un budget et aussi l’engagement et le travail sérieux. Le ministère des Affaires Locales et de l’Environnement a débuté par 74 municipalités, dont le Grand Tunis en 2017. L’année prochaine (2018), 46 autres municipalités seront desservies pour porter le nombre total des municipalités à 120. Je crois qu’en 2020, la Police de l’Environnement sera présente et entamera son activité effective dans l’ensemble des municipalités du pays.

Ce corps sera renforcé par les équipements nécessaires (motos, quad, matériels scientifiques pour tester la conformité des produits offerts au public aux normes sanitaires…) pour pouvoir intervenir dans tous les quartiers.

Je suis convaincu et je le répète, la protection de l’environnement et de la santé publique est un fondement de la sécurité nationale tout comme la sécurité des frontières. Parce que, un peuple malade est le résultat d’un environnement insalubre et pollué et ce peuple ne peut en aucun cas protéger son pays et aider à la prospérité et à la croissance. Pour cette raison, nous allons faire de notre mieux pour réussir notre mission. Mais, pour réussir il faut la discipline, la transparence et le retour au travail. Il est temps de se mettre au travail.

Vous insistez sur le facteur propreté. Certains vous accusent, pour cela, d’interférence dans l’exercice d’autres organismes. Qu’en pensez-vous?

L’idée de création de la Police de l’Environnement est venue après la révolution, parce que les agents de la Police municipale ont été affiliés au ministère de l’Intérieur. Mais, on ne peut pas dire que la Police de l’Environnement va remplacer la police municipale. Les deux corps vont travailler de concert avec toutes les parties intervenantes pour une seule finalité: sauver le pays de la pollution et protéger la santé du citoyen.

Ce corps n’est pas là pour nettoyer les rues et les ruelles. Il ne jouera pas le rôle de la municipalité. Il est là pour faire appliquer la loi relative à la protection de l’environnement. Nous allons sanctionner tous les contrevenants conformément aux lois en vigueur. Tous ceux qui jettent les déchets en dehors des horaires prévues par les lois et dans des endroits publics seront sanctionnés. Nous allons agir avec tolérance zéro à l’égard de tous. Nous avons mené des campagnes de sensibilisation et des opérations blanches durant un mois, mais maintenant nous sommes entrés dans le vif du sujet et nous allons veiller à appliquer fermement les lois.

Nous allons travailler non pas suivant le principe pollueur-payeur, mais suivant la logique: celui qui porte atteinte à l’intérêt public doit être sanctionné pour se conformer et respecter les lois.

D’après vous, est ce que les amendes prévues par la loi relative à la Police de l’Environnement, suffisent pour dissuader les contrevenants?

Personnellement, je crois que 40 à 60 dinars sont des amendes de montants infimes par rapport aux infractions, mais il y’a aussi les amendes contre les délits qui varient entre 30 dinars et 1.000 dinars. Le plus important est de ne plus tolérer les atteintes, même celles qui ne semblent pas graves aux yeux d’une majorité des citoyens (crachats, jet de mégots de cigarettes…).

A titre d’exemple, il faut être très sévère avec ceux qui jettent les gravas, la nuit, dans les endroits publics et sur les bas-côtés des routes. Il faut saisir leurs véhiculent et leurs permis. Nous tenons à lutter contre ces pratiques d’incivisme aggravés par l’impunité.
Nous voulons arriver à un stade où la loi sera volontairement respectée et les gens ne seront pas obligés de l’appliquer.

Est-ce que vous avez le budget nécessaire pour mettre en œuvre vos programmes? 

Le budget consacré à la Police de l’environnement varie entre 3 à 4 milliards par an. Les équipements sont mobilisés par les municipalités. Mais, ce budget peut être révisé en fonction de l’évolution du corps de la Police de l’Environnement parce que nous envisageons d’acquérir de nouveaux équipements et matériels.

Certains vous accusent d’intervenir dans les quartiers huppés, où se trouvent, d’habitude, peu de problèmes liés à l’environnement au lieu de s’attaquer à d’autres quartiers qui nécessitent vos interventions? Est-ce vrai?

Non ce n’est pas vrai! Nous ne sommes qu’au début de nos interventions. Nous avons mené plusieurs opérations dans des quartiers huppés et d’autres populaires. A mon avis, tous les quartiers sont semblables, parce que dans les quartiers huppés, comme dans les quartiers populaires il y’ a des gens plus disciplinés que d’autres.

Tous les quartiers appartiennent à tous les Tunisiens, donc il faut intervenir dans tous les coins du pays, sauf qu’il y’a des quartiers dont l’accès est encore difficile pour plusieurs raisons. C’est pour cela, nous voulons acquérir des équipements et du matériel pour pouvoir y accéder.

Vos interventions semblent, quand même, semblables à celles de la Police municipale et des brigades sanitaires?

Nous travaillons ensemble. Nous menons ensemble des campagnes pour un seul objectif. Mais, bientôt, une circulaire sera publiée pour mieux définir nos interventions et les rendre beaucoup plus ciblées. C’est pour plus d’efficacité et aussi pour que chaque corps ou chaque organisme assume sa responsabilité.

Nous allons axer nos missions sur les mauvaises pratiques et les atteintes à l’environnement et nous allons sanctionner tous les contrevenants. Il y a du chemin à faire pour réaliser nos objectifs, mais nous n’épargnerons aucun efforts pour y parvenir.