L’OIE réclame une lutte accrue contre la grippe aviaire sur tous les continents

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Hyderabad en Inde, le 15 avril 2015 (Photo : Noah Seelam)

[19/05/2015 17:24:30] Paris (AFP) L’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) a appelé mardi à renforcer la lutte contre la grippe aviaire qui s’étend désormais à tous les continents, provoquant la mort de dizaines de millions de volailles et d’importantes pertes économiques et alimentaires.

L’OIE est manifestement inquiète de la rapidité avec laquelle plusieurs foyers de différentes souches de grippe aviaire ont surgi ces derniers mois, de l’Asie à l’Afrique de l’Ouest et l’Amérique, obligeant les éleveurs à abattre leurs animaux quand ils ne succombent pas au virus.

Le virus se transmet principalement par la migration des oiseaux sauvages mais également par les échanges commerciaux, a rappelé mardi l’organisation en demandant aux 180 pays membres d’appliquer scrupuleusement les “mesures de biosécurité préconisées par l’OIE” dans les élevages et sur les marchés.

Après l’épidémie de H5N1 apparue début 2004, qui avait provoqué plusieurs centaines de cas humains souvent mortels, les foyers avaient semblé circonscrits. Mais une nouvelle souche est apparue début 2013 en Chine, la H7N9, faiblement pathogène (entraînant peu de mortalité) mais capable d’infecter l’homme. Elle a entraîné plus de 100 cas en quelques mois.

Malgré des mesures provisoires comme la fermeture des marchés en plein air, une nouvelle souche aviaire, “hautement pathogène” pour les volailles celle-là, la H5N8, a été détectée en 2014 en Chine et en Corée puis rapidement au Japon. Avant de se propager, probablement par le biais des oiseaux migrateurs, vers l’Inde, l’Europe, le Canada et aujourd’hui les Etats-Unis.

Si les craintes de voir le virus muter pour se transmettre directement d’homme à homme sont actuellement écartées, l’impact économique de l’épizootie, difficile à chiffrer, est préoccupant.

En plus du H5N8, le territoire américain fait face à une épidémie de grippe H5N2. Au total, le virus a causé la mort (naturelle ou par abattages préventifs) de plus de 35 millions de poules, dindes et canards en quelques mois.

Mi-mai, le département américain de l’Agriculture (USDA) a annoncé une révision à la baisse de la production d’oeufs pour la première fois depuis 2008: l’Iowa, premier producteur, est le plus lourdement touché avec la perte de 25 millions de volailles, soit 40% de ses poules pondeuses, affirme le New York Times.

– Importations suspendues, méfiance des consommateurs –

L’ensemble de la filière volailles et oeufs outre-Atlantique est estimée à 48 milliards de dollars, mais les dégâts restent à estimer, d’autant que de nombreux importateurs de volailles américaines comme la Chine – dès le mois de janvier -, le Japon ou le Mexique ont suspendu leurs approvisionnements.

Simultanément, de “nombreux foyers de H5N1”, une souche qui peut contaminer les humains, ont également été détectés ces derniers mois dans de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest, selon l’OIE. Le H5N1 continue à affecter l’Egypte de manière endémique et de nouveaux cas sont apparus au Moyen-Orient, en Israël et en Palestine.

“La résurgence de la grippe aviaire (au Nigeria) a déjà de sérieuses conséquences compte tenu de l’importance de l’industrie de la volaille dans l’économie des foyers et la sécurité alimentaire” affirme Louise Setshwaelo, la représentante de la FAO dans ce pays, le plus peuplé d’Afrique.

Car le poulet est pour de nombreux pays la première source de protéines et la moins chère à produire. L’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) indique que c’est la viande la plus commercialisée au monde (112 millions de tonnes environ prévues en 2015), soit 40% du commerce mondial de viandes.

En hausse de 55% sur la décennie écoulée, elle voit sa croissance ralentir depuis 2012. Cette dernière devrait se limiter à +2,6% en 2015, estime la FAO.

C’est qu’en Chine notamment, où les épisodes de grippe aviaire sont récurrents, “ces crises à répétition (et les scandales liés à l?usage d?antibiotiques) ont entamé la confiance des consommateurs” explique Jean-Marc Chaumet, spécialiste du marché chinois à l’Institut de l’élevage (Idele). La production de volaille a baissé de 3% sur l’année en 2014, après une baisse en 2013, selon les chiffres officiels, précise-t-il. “Même si la production d??ufs semble avoir été moins atteinte, elle aurait au moins stagné en 2014”.

La fermeture de certains marchés et la désaffection d’une partie des consommateurs aurait engendré des pertes et fini par “créer une surcapacité dans certaines entreprises du secteur”. Même si l’embargo sur les volailles américaines pourrait redonner un peu d’air à la filière locale.