Divorce : “gérer” ses enfants en ligne pour apaiser les tensions

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à Paris (Photo : Patrick Kovarik)

[06/05/2015 08:47:22] Paris (AFP) Lily a gym lundi, Nico va chez le dentiste jeudi, Lucien dort chez Théo, Léa a besoin d’un ordi… Planning, budget, autant de casse-tête pour les parents séparés que des sites proposent d’aider à gérer sans s’étriper ni oublier un rendez-vous.

“Nous sommes des +facilitateurs+ de vie de famille en résidence alternée!”, explique à l’AFP Nicolas Guillou, cofondateur de Family Facility, première plateforme participative 100% française, dont la commercialisation a débuté fin 2014.

Cet outil (www.family-facility.com) “permet d’organiser en ligne le quotidien des enfants, de stocker tous les contacts et données les concernant, de dédramatiser les questions liées aux dépenses, de partager instantanément les informations. Le site est totalement sécurisé”.

Après une séparation, les enfants se trouvent souvent au centre des conflits: “Comment as-tu pu oublier qu’ils allaient chez mes parents vendredi soir? As-tu pensé aux certificats médicaux de Laurène? Pourquoi n’avait-elle pas ses affaires de danse mercredi? Tu ne m’avais pas parlé du prix du stage de Simon!”.

“L’objectif, c’est d’apaiser les tensions, de tout planifier plus sereinement et d’aider à renouer le dialogue entre les ex-conjoints sans que le côté émotionnel n’interfère. Quand les parents ne se parlent pas, cela évite aussi à l’enfant le rôle si inconfortable de messager”, ajoute M. Guillou.

L?idée de cette plateforme “est née d?un échange avec un ami, père de famille, qui vivait une séparation très difficile depuis un an”.

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ères déploient de bannières le 6 juillet 2013 sur une cheminée haute de 70 mètres à Grenoble, réclamant leur droit de visite à leurs enfants (Photo : Jean-Pierre Clatot)

Pour l’instant en français, Family Facility sera également en anglais à la fin de l’été 2015 et est utilisable depuis l’étranger. Il existe une offre “Freemium” gratuite avec quelques services. L’accès à l’intégralité de la plateforme coûte 2,50 euros par mois et par parent.

Nounous, baby-sitter, grands-parents, oncles et tantes peuvent être aussi de la partie.

D’autres outils de ce type ont déjà été créés en Suisse (www.easy2family.com) ou en Belgique (www.2houses.com) et comptent de nombreux utilisateurs, tout comme aux Etats-Unis.

Chaque jour en France, quelque 365 divorces sont prononcés (Insee 2011), sans compter les séparations.

Selon une étude du ministère de la Justice publiée en janvier, les décisions des juges aux affaires familiales en faveur de la garde alternée ont doublé en 10 ans, même si la résidence chez la mère reste majoritaire, passant de 12% en 2003 en cas de divorce, à 21% en 2012. Quand les parents n’étaient pas mariés, la proportion s’élève à 11%.

– Préserver aussi des face-à-face –

En quelques clics, ces “facilitateurs de vie” aident à la gestion du budget consacré aux enfants, avec un tableau de bord récapitulatif, permettent de demander une participation à des dépenses exceptionnelles (hors pension alimentaire), de gérer les emplois du temps et les rendez-vous de chaque bambin avec un agenda multi-fonctions, d’organiser le partage des vacances…

Autant de sujets de crispation et de disputes entre parents que la médiation d’internet peut dédramatiser.

“C’est dématérialiser pour mieux +rematérialiser+ la famille”, relève Nicolas Guillou.

“Internet est un instrument très efficace, surtout dans de telles situations, mais il doit savoir rester un simple outil”, estime Jean-Claude Kaufmann, sociologue de la famille.

“On oppose trop facilement la +vraie vie+ et internet. Dès que l’on poste un message, on entre dans une véritable relation sociale. La mise à distance fait disparaître en partie l’interlocuteur alors que le face-à-face réactive toutes sortes de réflexes émotionnels qui peuvent pousser très vite à élever la voix”, dit-il à l’AFP.

Selon le sociologue, “la relation médiatisée par internet permet d’être plus sélectif et efficace d’un point de vue technique. Il faut seulement souhaiter que cela n’empêche pas par ailleurs les rencontres en face-à-face. C’est un risque réel”.