La BCE risque encore une déconvenue avec son nouveau mégaprêt aux banques

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érence de presse à Francfort (Photo : Daniel Roland)

[11/12/2014 06:43:23] Francfort (AFP) La Banque centrale européenne (BCE) risque d’essuyer jeudi une nouvelle déconvenue avec un gigantesque prêt très bon marché proposé aux banques, ce qui accentuerait la pression pour puiser dans ses dernières réserves de soutien à la zone euro.

La BCE veut réenclencher la machine du crédit -et par ricochet l’inflation et la croissance- sur le Vieux Continent en mettant des liquidités en abondance à disposition des établissements de crédit.

A cet effet elle a annoncé en juin huit prêts géants de long terme (ou TLTRO pour “Targeted Long-Term Refinancing Operations”) aux banques d’ici 2016, dont deux cette année. Après un premier en septembre dont les résultats ont déçu, les banques peuvent souscrire depuis mardi à cette deuxième édition. Son résultat doit être dévoilé à 10H15 GMT, mais personne n’en attend monts et merveilles.

“Il est très très difficile d’estimer précisément quel sera l’allocation du TLTRO”, a reconnu la semaine dernière Mario Draghi, président de la BCE.

Lors du premier prêt, 255 établissements de la zone euro ont emprunté 82,6 milliards d’euros, nettement en deça des espérances des acteurs de marché.

– QE plus probable –

Cette fois-ci, la plupart des analystes tablent sur un emprunt d’environ 150 milliards. Le volume cumulé des deux opérations serait ainsi faible au regard des ambitions de la BCE: Mario Draghi était prêt à mettre 400 milliards sur la table dès cette année.

En cas de nouveau revers, l’Italien, qui veut injecter 1.000 milliards d’euros dans le circuit économique et financier, sera sous pression pour en faire plus. La zone euro connaît une inflation atone depuis des mois, qui menace de basculer vers une déflation, spirale auto-entretenue de baisse des prix et des salaires.

La BCE a déjà envoyé ses taux directeurs au plancher (0,05% pour le taux central depuis septembre) et rachète certains actifs financiers. Si le soutien actuel ne suffit pas, ne lui reste plus que l’option “bazooka”, selon beaucoup: un “assouplissement quantitatif” à l’américaine (QE selon l’acronyme anglais). Il s’agit d’achats massifs d’actifs, comprenant des titres de dette privée et/ou publique.

“Un faible résultat (du TLTRO de jeudi), sous les 150 milliards, rendrait la perspective d’un QE de dette souveraine encore plus probable”, résument les analystes du bancassureur ING.

Les gardiens de l’euro ont pourtant tout fait pour susciter l’appétit des banques et s’assurer que les fonds distribués profitent à l’économie réelle. Le taux des TLTRO est fixé à 0,15%. En outre, contrairement aux précédentes éditions en 2011 et 2012, l’octroi des fonds est “ciblé”: les banques emprunteuses se doivent d’augmenter leurs prêts à entreprises et ménages.

La sanction prévue pour les établissements qui ne remettraient pas l’argent en circulation est un remboursement anticipé de leur TLTRO, dès l’automne 2016 au lieu de septembre 2018.

– Demande balbutiante –

La BCE organisera six autres TLTRO entre mars 2015 et juin 2016, au cours desquels les établissements pourront emprunter jusqu’à trois fois le montant net des crédits supplémentaires accordés au secteur privé. Mario Draghi espérait ainsi injecter entre 450 et 850 milliards dans l’économie.

Mais dans une zone euro convalescente, la demande de crédit est encore balbutiante.

“La liquidité n’est pas le problème des banques, il y en a à foison, ce qui compte c’est la solvabilité des emprunteurs”, explique Johannes Gareis, économiste chez Natixis. Du coup, “les banques vont-elles jouer le jeu?”, se demande l’économiste.

Elles pourraient être tentées d’emprunter jeudi simplement pour rembourser à un coût moindre leurs précédents prêts de long terme. Certains d’entre eux arrivent d’ailleurs à échéance la semaine prochaine, ainsi qu’en janvier et février.

Mario Draghi a lui-même identifié le problème, en soulignant l’importance de “l’allocation nette” du deuxième TLTRO plutôt que son résultat nominal. Commerzbank estime à seulement 60 milliards l’injection nette de liquidités à attendre de ce deuxième méga-prêt. Un montant final plutôt limité pour profiter vraiment à entreprises et ménages.