Hausse de la TVA : une mesure au nom de la compétitivité, mais contestée

d0439ad8895c3fcfbd6fa6e08912397262173361.jpg
édiaire de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) vont augmenter au 1er janvier (Photo : Philippe Huguen)

[30/12/2013 21:45:22] Paris (AFP) Les taux normal et intermédiaire de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) vont augmenter au 1er janvier, une mesure décidée il y a un an au nom de la compétitivité des entreprises mais qui est contestée en période de baisse du pouvoir d’achat.

. Les augmentations

Le taux normal de TVA passe de 19,6% à 20% et le taux intermédiaire, appliqué à l’hôtellerie, à la restauration ou aux transports publics, de 7% à 10%. Le taux réduit sur les produits de première nécessité (alimentation, énergie) reste en revanche à 5,5%, alors que le gouvernement envisageait initialement de le ramener à 5,0%.

Les travaux de rénovation thermique, les travaux induits par des rénovations énergétiques et les travaux de rénovation dans les logements sociaux bénéficient du taux réduit.

Idem pour les tickets de cinéma et la cession des droits de films destinés à être présentés dans des ciné-clubs ou des festivals.

Les engrais agricoles d’origine organique seront, comme les amendements calcaires utilisables en agriculture biologique, soumis, eux, au taux intermédiaire de 10%.

Une des hausses les plus contestées, mais qui a été imposée après la condamnation de la France par la justice européenne en 2012, est le passage de 7 à 20% de la TVA sur les centres équestres. Le gouvernement s’est engagé à obtenir à terme de Bruxelles un taux réduit et a dans l’immédiat annoncé des mesures d’accompagnement de la filière.

. La raison de cette augmentation

c4180942eed35f13d761a8713b6170ff8504ef22.jpg
Graphique sur ce qui change au 1er janvier 2014: TVA, Smic, RSA, retraites (Photo : K.Tian / E.Vaissière)

Le gouvernement l’a fait adopter par le Parlement dans le dernier collectif budgétaire de 2012. Il s’agit de financer sa principale mesure en faveur de la compétitivité des entreprises: un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) qui vise à faire baisser de 4% en 2014 – et de 6% en 2015 – le coût du travail des salariés gagnant jusqu’à deux fois et demi le SMIC. Cela représente un effort de 10 milliards d’euros en 2014, dont environ les deux tiers financés via la seule TVA, et de 20 milliards en 2015.

Le gouvernement mise beaucoup sur le CICE pour relancer la compétitivité des petites entreprises, surtout quand elles exportent. Il espère également un effet sur les embauches à moyen terme. Une conviction que ne partagent ni l’Insee ni la plupart des économistes pour qui le crédit d’impôt intervient dans un contexte où le taux de marge des entreprises est historiquement bas. Elles risquent donc de commencer par restaurer leur rentabilité avant d’engager de nouveaux investissements et des embauches.

. Des risques immédiats sur le pouvoir d’achat…

Alors que l’Insee a confirmé mardi que le pouvoir d’achat des Français s’était replié de 0,1% au troisième trimestre, l’impact d’une augmentation de la TVA sur la consommation des ménages pourrait tirer encore plus celle-ci vers le bas début 2014.

“Aujourd’hui, la consommation ne fonctionne pas bien et clairement, ça ne va pas soutenir les dépenses des ménages”, même si la hausse principale de 19,6 à 20% n’est “pas spectaculaire”, estime Philippe Waechter, directeur de la recherche économique chez Natixis. Pour lui, “il y aura un effet spécifique sur le début de l’année qui ne sera probablement pas compensé par des négociations salariales”.

C’est pourquoi, ajoute-t-il, la reprise ne pourra pas venir de la consommation, qui traditionnellement se maintient bien en France, mais davantage de l’investissement des entreprises, lui-même encouragé par le CICE.

Certains acteurs de la distribution, comme Leclerc, ont néanmoins déjà annoncé leur intention de ne pas répercuter l’augmentation de TVA immédiatement dans les prix. “Dans nos magasins, on va temporiser, on va différer cette hausse”, avait annoncé Michel-Édouard Leclerc le 11 décembre.

. …mais peu d’impact attendu sur l’inflation

Selon l’Insee, l’entrée en vigueur concomitante au 1er janvier de la hausse de la TVA et du CICE va avoir un “impact opposé” sur le taux d’inflation. Si les entreprises répercutent immédiatement et entièrement les hausses de TVA, l’inflation gonflerait de 0,5%. Mais lors des précédents augmentations déjà, beaucoup d’entreprises ont préféré rogner sur leur marge pour ne pas modifier les prix TTC. L’impact de la TVA sur le taux d’inflation serait donc selon l’Insee de 0,4 point.

Parallèlement le CICE devrait avoir un impact positif sur le taux d’inflation (-0,2 point).

Au total, selon l’Insee, les deux effets conjugués pèseront pour 0,2% sur les prix, et l’inflation devrait atteindre 1,1% à la mi-2014 (0,9% en 2013).

. Le choix d’un transfert des entreprises vers les ménages

Augmenter la TVA presque sans toucher au taux de prélèvements obligatoires, comme c’est le cas en 2014, revient pour l?État à opérer un transfert de charges des entreprises vers les ménages. En d’autres termes, la fiscalité des ménages augmente quand celle des entreprises baisse et ceci afin de relancer la croissance par l’investissement et l’emploi.

L’idée d’une TVA sociale telle qu’elle avait été instaurée à la toute fin du quinquennat Sarkozy a donc finalement été reprise par le gouvernement.

Mais à Bercy on rappelle volontiers que l’effort consenti en faveur des entreprises est presque deux fois plus important que dans le projet Sarkozy et qu’il n’est financé qu’en partie via la TVA, le reste étant pris en charge par des économies.

La TVA sociale telle qu’elle avait été laissée par la précédente majorité (et aussitôt annulée par la nouvelle équipe socialiste) représentait une baisse des cotisations sociales de 13 milliards entièrement financée par une hausse de 1,6 point du taux normal de TVA.