Tunisie – Loi de finances 2014 : Eviter les projections aléatoires


loi_finance-2014.jpgL’outil
budgétaire rythme la vie économique. C’est lui qui donne le tempo et les
tendances de l’année. Son décryptage doit être clair et net. Tout flottement
laisse la sensation désagréable d’un gouvernement qui pilote à vue, le nez sur
l’événement.

Intervenant lors du séminaire de la CONECT (Confédération des entreprises
citoyennes de Tunisie) sur les principales orientations budgétaires, Nabil
Abdellatif (président du Conseil de l’Ordre des experts-comptables) a été
catégorique, appelant à une fiabilisation du processus budgétaire. Une
discipline dans la gestion des finances publiques n’est pas un luxe, car c’est
la grille de lecture de la politique économique et financière du pays. Plus
d’exigence en la matière, c’est plus de confiance dans le climat
d’investissement et d’affaires.

Le standard budgétaire: éviter les projections aléatoires

L’actualité donne raison à Nabil Abdellatif. Le budget de l’Etat reçoit des
modifications en cours de route. C’est mauvais signe, pour les milieux
d’affaires. Il y a un impératif de rigueur en la matière. La manipulation des
comptes budgétaires n’est pas un symptôme de bonne santé économique.

En 2012, le budget a été réaménagé par une loi de finances complémentaire. Voilà
qu’on réédite la chose en 2013. Ce n’est pas du meilleur effet pour l’image de
la puissance publique. Fallait-il établir le budget de 2013 sur une hypothèse de
croissance de 4,5% pour devoir la retoucher en plusieurs occasions pour enfin se
rabattre sur un taux encore incertain de 3%?

Les réajustements induits par cette projection imprécise troublent les esprits
et ce sont les contribuables qui paient les effets de rattrapage ultérieurs. Les
augmentations du prix de l’énergie, carburants compris, sont de cet ordre là.
Ces mesures exaspèrent le bon peuple et sont un facteur d’instabilité dont il
faut se prémunir au maximum.

La “soutenabilité“ de la dette: associer la société civile

L’état de confusion, induit par l’hésitation budgétaire, conduit souvent à agir
dans la précipitation. Une fois acculé, l’Etat n’a plus d’autre recours que la
dette. Un budget doit être bouclé, quelles que soient les circonstances qui
prévalent dans le pays. Or, si elle sauve la face de l’Etat, la dette ne
manquera pas de grever les revenus des contribuables et parfois peut accabler
les générations futures.

Le creusement du déficit et l’emballement de la dette, c’est-à-dire les
déterminants de la soutenabilité de la dette, peuvent-ils relever strictement de
la seule volonté de la puissance publique? Le président du Conseil de l’Ordre
des experts-comptables, au vu de la gravité de l’endettement public, appelle à
associer la société civile.

En l’apparence, notre encours actuel, qui est inférieur à 50% du PIB passe pour
être soutenable, n’était qu’il a servi, en partie, à financer les salaires des
fonctionnaires. Nabil Abdellatif sous-entend que la société civile peut faire
écran aux écarts, en la matière.

Débusquer l’épargne thésaurisée

Le pays ne manque pas de ressources d’épargne. Mais, regrette le président du
Conseil de l’Ordre, elle est abondamment thésaurisée. L’immobilier lui sert de
refuge, au détriment de l’investissement productif. Il rappelle que les sociétés
de placement sur le mode PONZI ont drainé des ressources considérables.

Un bon arbitrage entre politique monétaire et politique budgétaire contribuerait
à la réinjecter dans le système. Il faut s’y atteler!

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