Tunisie en détresse économique : Les chiens aboient, la caravane passe!

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L’étau se resserre autour de la Tunisie. Les bailleurs de fonds institutionnels se retirent les uns après les autres… La BAD a décidé d’annuler le prêt de 250 millions de dollars à la Tunisie avec décision de ne plus lui accorder aucun emprunt jusqu’à la visibilité totale du climat politico-économique; la Banque mondiale a résilié la troisième tranche du prêt de 1,5 milliard de dollars accordé en 2011 sur trois années.

Ainsi, la Tunisie ne pourra pas profiter des 500 millions de dollars de plus pour couvrir les dépenses de fonctionnement et de gestion qui se sont accrus de 50% en l’espace de 2 ans!

Les mille millions de dinars de sukuks islamiques ne seront pas émis de sitôt car, à la Constituante, on est plus préoccupé par les querelles entre partis que par la Tunisie. Par conséquent, sans l’adoption d’une loi-cadre, pour régir les activités de la finance islamique, point de sukuks et pas de liquidités pour parer à une dette publique de près de 50%.

Quant au FMI, qui avait accepté de réserver le montant de 1,7 milliard de $ (comme refuge de dernière minute), eh bien, suite au retrait de 150 millions de $ un jour après la signature de l’accord au mois de juin dernier, il va falloir que la Tunisie se soumette à ses conditions draconiennes pour avoir le reste.

Et en guise de conditions, le FMI ne lésine pas. Réformes fiscales et financières, refonte de la Caisse nationale de compensation, réduction des dépenses administratives et de fonctionnement et résolution des problèmes des banques publiques en prime. Et comme le FMI ne badine pas avec l’argent des autres, il envoie pour le mois de novembre prochain une délégation qui s’assurera de l’engagement du gouvernement au respect des conditions de tirage.

Rendons hommage à cette «révolution» sacrée du 14 janvier d’avoir libéré la Tunisie d’un dictateur et de l’avoir soumise à l’occupation des bailleurs de fonds mondiaux!

Les politiques jouent, l’économie coule…

Que peut-on attendre d’un pays où la crise politique s’éternise, où l’issue du dialogue national semble de plus en plus douteuse, où les gouvernants ne font que désinstitutionnaliser l’Etat? En témoignent les nominations en vrac, une administration de plus en plus laxiste parce que les notions du mérite, de la compétence et la valeur du travail, déjà douteuses avant le 14 janvier, ont complètement disparu aujourd’hui. Et cerise sur le gâteau, Monsieur Larayedh autoriserait même les commis de l’Etat à travailler ailleurs. A quoi bon se fatiguer à servir le contribuable lorsqu’on peut se préserver pour les autres?

Une décision qui suscite plus d’une question car pourquoi les fonctionnaires sont-ils autorisés à exercer dans les professions libérales? Est-ce pour justifier le fait d’avoir recruté des fidèles qui ont déjà des affaires dans le secteur privé? Est-ce pour vider une Administration déjà affaiblie du peu de compétences qui lui reste? Est-ce pour se débarrasser des compétences frigorifiées gênantes parce qu’elles maîtrisent ses rouages? Ou encore cela entre-t-il dans le cadre de la politique «d’attamkin» «empowerment» (traduction : maîtriser toute la mécanique administrative pour faire «ce que nous voulons de l’Etat»)?

Ali Larayedh, chef du gouvernement, ne donne ni l’impression d’être conscient des conséquences de ses décisions inconsidérées sur l’économie tunisienne ni même qu’il s’en soucie le moins du monde. C’est comme se maintenir dans la position de l’autiste fermé à tout ce qui n’est pas lui ou eux.

Le pays est incapable de rembourser les trois milliards de dinars de dettes d’ici la fin de l’année et M. Larayedh nous sort le chapelet du “tout va bien dans le meilleur des gouvernements“ qui assure tous azimuts. L’autorité de l’Etat tombe en lambeaux, les administrations sont désertées en l’absence de toute discipline, les hauts commis de la Troïka étant plus concentrés sur leurs affaires que sur celles de la Tunisie, les maladies «chargent» de partout, les villes sont infestées de déchets, de débris et de résidus ménagers, les communes sont absentes… mais qu’à cela ne tienne: pour Larayedh, «le gouvernement a réussi sur tous les plans».

Les autres, ceux qui critiquent, perdent leur temps car de toute façon, «les chiens aboient, la caravane passe». D’ailleurs, ces milliers de personnes qui descendent dans les rues expriment des revendications totalement ignorées par le gouvernement.

Pendant ce temps, des délégations partent en Europe et aux Etats-Unis pour solliciter l’aide des partenaires traditionnels et des institutions internationales à une Tunisie «dont le gouvernement assure».

Aux dernières nouvelles et suite à la visite du ministre des Finances et du gouverneur de la BCT à Washington, à l’occasion des assises du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, tenues du 8 au 10 octobre 2013, la dernière tranche du prêt de la BM a été de nouveau remis sur le tapis, mais aucune réponse n’a été donnée aux requérants.

La Banque mondiale ne bougera pas d’un pouce tant que le dialogue national reste au point mort.

Les internationaux ne sont pas aveugles sur ce qui se passe en Tunisie et le dernier discours du chef du gouvernement sur Al Wataniya I ne semble pas rassurant du tout, tout au contraire, il annonce le blocage de la situation politique, laquelle, si cela continue, aboutira indubitablement à effondrement économique craint mais éminent, d’après nombre d’observateurs.