Avec désormais un tandem à sa tête, Hermès poursuit sa bataille contre LVMH

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ès (Photo : Joel Saget)

[04/06/2013 14:25:47] PARIS (AFP) Hermès s’est doté mardi d’un tandem de direction avec la nomination d’Axel Dumas aux côtés de Patrick Thomas, et le groupe a affiché un objectif ambitieux dans sa bataille contre LVMH: faire annuler en justice une partie des parts que le géant détient dans son capital.

L’assemblée générale des actionnaires a entériné la nomination comme co-gérant d’Axel Dumas, héritier Hermès de 42 ans, qui formera un duo avec Patrick Thomas, 65 ans, jusqu’au départ de ce dernier au plus tard “fin janvier 2014”, a indiqué M. Thomas à l’AFP.

Les actionnaires ont longuement applaudi M. Thomas, aux commandes depuis 2004. Sous sa houlette, le groupe a considérablement grandi, réalisant l’an dernier 3,48 milliards d’euros de ventes et un bénéfice net de 740 millions d’euros, avec une marge opérationnelle record de 32,1%.

M. Thomas a détaillé avec satisfaction les performances depuis l’introduction en Bourse, il y a 20 ans, le 3 juin 1993: chiffre d’affaires multiplié par 8, résultat net par 23, résultat opérationnel par 18, marge opérationnelle qui a doublé…

Pourtant, entrer en Bourse a été “une erreur”, selon lui.

Car elle a permis l’entrée surprise de LVMH au capital fin 2010.

LVMH détenait 22,6% de Hermès fin 2012 (contre 72% pour la famille Hermès).

A ce sujet, la lutte continuera: “On a toujours dit que l’arrivée de LVMH au capital n’est ni désirée ni désirable, nous nous inscrivons dans cette continuité-là dans les rapports avec LVMH”, a prévenu Axel Dumas.

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ès Patrick Thomas (g) et Axel Dumas, le 3 juin 2013 à Paris (Photo : Eric Piermont)

Vendredi, LVMH était sur le gril: une amende de 10 millions d’euros, la plus forte possible, a été requise contre le groupe dirigé par Bernard Arnault devant la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF), pour dissimulation comptable et défaut d’information du marché. Une décision est attendue d’ici le 31 juillet.

Cette réquisition “semble confirmer ce que nous disions depuis deux ans”, à savoir que LVMH est entré “de manière frauduleuse” dans Hermès, a commenté M. Thomas, tout en soulignant qu'”il faut attendre la décision finale”.

Une amende de 10 millions d’euros serait toutefois assez indolore pour LVMH – dont le bénéfice net a atteint 3,43 milliards d’euros en 2012. Sauf en terme d’image.

Mais Hermès espère obtenir mieux devant la justice. Sa plainte pour délit d’initié et manipulation de cours a débouché sur l’ouverture d’une information judiciaire. Et “le but ultime d’Hermès est de faire annuler la conversion des swaps (contrats de produits financiers dérivés) qui ont permis à LVMH d’acquérir 12% d’Hermès”, a déclaré M. Thomas à l’AFP.

Hermès estime que LVMH a réalisé “une plus-value indue” de plus d’un milliard d’euros au détriment d’actionnaires minoritaires.

Interrogé sur la vente à LVMH, selon l’AMF, de titres de l’actionnaire familial Nicolas Puech, M. Thomas a jugé “extrêmement difficile d’y voir clair”. “Personne aujourd’hui n’a encore exactement compris comment les swaps avaient été couverts et par qui”, a-t-il affirmé.

Nicolas Puech, qui a toujours fait preuve d’indépendance par rapport au reste de la famille, détenait 5,76% fin 2012.

Hermès réclame le départ de LVMH de son capital et a “rencontré plusieurs fois l’été dernier” ses dirigeants, a dit M. Thomas devant des journalistes.

Mais les discussions n’ont pas abouti.

“C’était avant de lancer une action pénale, on s’était rapprochés d’eux”, a expliqué l’avocat d’Hermès, Philippe Ginestié.

Quant à l’éventualité, soulevée par le vice-président de LVMH Pierre Godé devant l’AMF, que LVMH puisse revendre sa participation, Patrick Thomas y a vu une “déclaration d’intention de sortie” et estimé qu'”il serait bon que Hermès, de tradition parisienne, reste français. Il faut des solutions techniques, cela dépend de leurs intentions”.

Hermès souhaite éviter toute nouvelle intrusion indésirable.

Le groupe n’a aucun “intérêt pour des fonds spéculatifs ou des fonds d’investissement chinois”, a dit le président du Conseil de surveillance Eric de Seynes.

Mais comme l’a concédé l’avocat Philippe Ginestié devant des journalistes, aujourd’hui, “parmi ceux qui sont capables de faire un chèque, il y a peu de fonds à part les étrangers…”

Par ailleurs, l’assemblée a entériné l’arrivée de la présidente d’AXA Private Equity, Dominique Senequier, au Conseil de surveillance, que l’ancien “patron des patrons” Ernest-Antoine Sellière a quitté.

Et Hermès va “réfléchir” à une division de son cours de Bourse, demandé par des actionnaires.