OPINION Impératif de mettre la Tunisie au dessus de tout intérêt partisan

Si les enjeux majeurs pour la Tunisie se jouent dans les choix fondamentaux pour
la Constitution, aujourd’hui c’est autour de la mise n place d’un gouvernement
d’Union nationale qu’ils s’expriment.

Erreur dans le débat, jeux d’influences et de stratégies ou immaturité
politique? Ennahdha au pouvoir veut assurer le consensus, et c’est vital. Pour
mettre le pays sur le chemin qu’il se doit, aucune ressource ni aucun moyen ne
doivent être occultés. Et précisément, l’opposition fait partie de cette force
constructrice. Elle est une condition sine qua non pour la survie de la
démocratie naissante.

A l’heure où les partis modernistes se remettent difficilement de leur débâcle
et ont passé une partie de leur week-end à afficher leur «mea culpa» public, il
est important que tous les intervenants dans la vie politique tunisienne
délimitent leurs camps, mettent au clair leurs positions et informent, au risque
de les perdre, leurs bases.

Ce n’est pas pour rien que l’on observe des militants quitter le PDP pour se
réfugier chez Ennahdha. Du côté d’Ettajdid, certains en appellent à se détacher
du PDM. A Ettakatol, on fait pression pour et contre une participation immédiate
à l’exécutif. Devant le siège d’Ennahdha à Tunis ou dans la ville de Kairouan,
des militants réclament tout simplement l’application de la «charia», car ils ne
se retrouvent plus dans des discours trop conciliants et modernistes de la
direction de leur parti.

Les conservateurs ont joué sur le plan religieux, les modernistes se sont
trompés de discours et d’outils, le CPR et Ettakatol ont ratissé large chez les
révolutionnaires, et ceux qui ont compté sur l’ancien système ont aussi
déchanté… Bien! Et maintenant ?

Les urnes ont parlé. Nous connaissons l’échiquier politique tunisien et tous les
partis mesurent désormais -en principe- leur poids. Ils ont surtout pris
conscience du potentiel d’électeurs qu’ils peuvent aller chercher afin de les
rallier à leurs positions et projets. Peut-être ne savent-ils pas encore qui les
lâchera en cours de route… Mais c’est bien là le superbe jeu de la démocratie et
de l’alternance à construire.

Aujourd’hui, ce sont les Tunisiens qui n’ont pas voté autant que ceux qui ont
voté par sanction ou dont les voix n’ont pas été comptées qui sont dans
l’attente. Une patience démocratique qui ne doit pas durer longtemps car la
nouvelle politique, «made in Tunisian democracy», a de quoi décontenancer. Et
d’ailleurs, quoi de plus normal!

Les Tunisiens, qui ont pris de court leur leadership car ils ne parvenaient pas
à les représenter, ne risquent-ils pas très vite se désolidariser des nouvelles
têtes d’affiche de la vie politique et de la société civile qu’ils ont
découvertes ces derniers mois? Que restera-t-il de ces nombreux leaders d’un
jour, de cette centaine de partis et plus d’un millier d’associations? Les
Tunisiens observent déjà des voix se taire, des égos s’aplatir, des projets en
déconfiture…

Que cela soit dans le camp des modernistes ou des conservateurs, les Tunisiens
attendent les premiers signes forts de la reprise en main d’une machine qui a
tant à faire et tellement de besoins à assouvir.

Certains pensent qu’Ennahdha pourrait se passer de tout le monde pour gouverner
et disposerait de toutes les ressources pour, et qu’il faut la laisser monter au
créneau. C’est un avis qui se fracasse contre l’obligation de mettre la Tunisie
au dessus de tout intérêt partisan.

Quand bien même il pourrait le faire, le parti Ennahdha attend, négocie, hésite,
et pour cause! Gérer un pays est un métier. Un métier que même fort de ses
milliers de compétences au sein de l’Administration centrale, il ne veut
affronter seul. Ennahdha n’a aucun intérêt à être l’unique ou le principal
acteur du gouvernement à former. Assumer seul l’échec ou la déception est
difficile. Faire face aux attentes des Tunisiens est encore plus laborieux.

A l’heure où les négociations battent leur plein, les rumeurs de répartition de
portefeuilles et de responsabilités vont bon train. La semaine écoulée, riche en
évènements, a permis à Ennahdha de s’essayer au pouvoir sans y être encore.
Aujourd’hui, l’intérêt de la Tunisie est de rassurer ses citoyens.

Après l’effervescence de ces élections, les politiques tunisiens doivent faire
face à de nombreuses interrogations et impatiences. Peser les choix, sonder les
forces, motiver les troupes et faire le bon choix pour son propre avenir est
important. Il est capital pour l’intérêt de la Tunisie de ne pas se tromper dans
la voie à prendre. Un nouveau modèle en dépend. Un modèle qui ne peut qu’augurer
de jours meilleurs.

*mille-et-une-tunisie.com