Tunisie : Le déficit de vision stratégique et de planification… en matière de développement régional

Par : Tallel

planif-1.jpg

Vision, planification, programmation ou les trois référents de l’action individuelle

Toute action individuelle en matière de développement régional devrait s’inscrire dans un programme donné. Tout programme devrait être conçu à partir d’un ordre de priorités donné. Tout ordre de priorité devrait relever d’une planification donnée. Toute planification devrait être élaborée à partir d’une vision longue donnée. Vision, planification, programmation sont donc les trois cadres dans lesquels devrait s’inscrire l’action individuelle. L’efficience de celle-ci, sa cohérence et sa pertinence en dépendent. Si la vision de long terme est défaillante, la planification devient un simple acte formel de projection dans le temps, la programmation un exercice technique sans plus, et l’action individuelle, si spectaculaire et médiatisée qu’elle soit, une initiative sans référents, sans lendemains. Une part non négligeable de l’œuvre gouvernementale en matière de développement régional est faite hélas d’actions et d’initiatives sans repères.

Les six types de distorsions de la planification et de la programmation du développement régional en Tunisie

La planification du développement régional en Tunisie est percluse de six types de distorsions:

* l’absence d’une définition claire du concept même de ‘développement régional’;

* le manque d’une vision stratégique, permettant une programmation des priorités de développement régionales et inter- régionales, à moyen et long termes;

* une insuffisance patente de concertation et de coordination entre toutes les parties prenantes, publiques et non publiques (société civile, secteur privé, organisations professionnelles);

* une politisation injustifiée du processus d’allocation des ressources publiques et de la gestion des programmes, se traduisant par un interventionnisme excessif du système de l’Etat- parti, de l’Etat-RCD et de son administration étatique au double niveau central et régional;

*l’opacité des actions menées hors budget, notamment celles financées par le Fonds 26-26;

* l’absence de statistiques et de comptabilité régionales.

Le double vide statistique et comptable qui afflige l’économie régionale en Tunisie est, à lui seul, à l’origine de cinq déficits majeurs de la politique de développement régional appliquée: un déficit d’information sur les stocks de richesses naturelles, et donc de potentiel productif comparatif, des diverses régions tunisiennes; un déficit d’information sur les transferts unilatéraux de richesses d’une région à une autre ainsi que sur les échanges économiques, sociaux, culturels et autres entre les régions; un déficit d’évaluation critique sincère des programmes de développement exécutés; un déficit de planification globale sur le moyen et le long terme; et un déficit de transparence.

Certes, et comme nous le mentionnions plus haut, à travers la succession des plans quinquennaux de développement, au cours des deux dernières décennies, la dimension régionale dans les stratégies économiques et sociales appliquées a acquis une ampleur et une consistance réelles. Des réformes ont été introduites, notamment au niveau institutionnel, comme celles relatives à la composition des Conseils régionaux pour le développement. Mais les distorsions structurelles évoquées ci-dessus n’ont pas été corrigées pour autant. L’approche reste dominée par un saupoudrage inéquitable d’aides, de subsides et de projets, qui ne reflète ni les urgences ni les besoins à long terme des diverses régions, notamment des plus pauvres d’entre elles.

Prochain article: La mal-gouvernance régionale et locale