Les “cybercasinos” dénient à la justice française le droit de les juger

[08/02/2010 18:57:30] PARIS (AFP)

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Des joueurs de poker dans un casino de Toulouse, le 12 octobre 2007 (Photo : Pascal Pavani)

Quatre sites étrangers de jeux d’argent en ligne ont dénié lundi à Paris à la justice française le droit de pouvoir trancher le litige les opposant à une centaine de casinos de l’Hexagone qui les accusent de “concurrence illégale”.

Les sociétés contrôlant les sites Bwin, Unibet, Sportingbet et 888 et quatre de leurs dirigeants sont cités devant le tribunal correctionnel de Paris par trois grands groupes (Barrière, Tranchant et Joagroupe) représentant 104 des 197 casinos français en “dur” et par le syndicat Casinos de France.

Emmenées par Georges Tranchant, 80 ans, ancien député RPR et créateur du groupe de casinos (16) éponyme, ces parties civiles mettent en cause l’activité de ces sites étrangers qui proposent machines à sous, black-jack, roulette ou poker en ligne à des dizaines de milliers de clients français.

Sous la bienveillante autorité de la présidente de la 11e chambre Annie-Claude Selvi qui avoue que l’organisation des holding qui coiffent ces sites “n’est pas d’une clarté aveuglante”, avocats de la défense et des parties civiles s’affrontent sur la compétence du tribunal.

Olivier Gutkes, l’un des avocats de Bwin affirme que l’usage de la langue française (l’une des 22 langues de Bwin) “ne donne pas au juge français la compétence” de se prononcer sur les faits reprochés à ce site basé à Malte.

L’avocate de Sportingbet Martine Karsenty-Ricard assure que le serveur du site assimilable à “une maison de jeux de hasard”, dont les casinos français dénoncent “l’illégalité”, n’est pas situé en France. Le site ne peut donc faire l’objet d’un procès en France.

Pour Me Dominique Santacru, conseil d’Unibet, les casinos français se sont substitués à l’Etat français “car ce dont ils se plaignent – violation de l’activité de maisons de jeux ou pertes de recettes fiscales pour l’Etat qui par ailleurs leur impose une lourde fiscalité – relève de l’ordre public et de la protection de l’intérêt général”.

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à Londres d’une personne posant devant un site de paris en ligne (Photo : Leon Neal)

L’avocat d’Unibet affirme par ailleurs que les casinos français “n’ont pas subi de préjudice direct dont ils n’évaluent pas d’ailleurs le montant”.

Thierry de Montbrial, au nom des parties civiles, avance que les “casinos sont délégataires d’un service public” puisqu’ils doivent, en échange de l’autorisation d’exercer, prévoir non seulement la tenue de table de jeux mais aussi organiser des spectacles et proposer de la restauration dans tous leurs établissements.

Reconnaissant bien volontiers son incapacité à chiffrer le montant du préjudice subi par ses clients, notamment parce que “personne ne connaît le chiffre d’affaires des cybercasinos en France”, Me de Montbrial demande un euro symbolique de dommages et intérêts.

Ce procès se déroule à quatre mois de l’ouverture à la concurrence du marché français des jeux en ligne (paris hippiques et sportifs, poker) selon le projet de loi que doit examiner le Sénat à partir du 23 février après l’adoption du texte par les députés le 13 octobre 2009. Cette ouverture ne concerne pas les jeux de loterie et les autres jeux de casinos que le poker.

Ces quatre sites devraient d’ailleurs tous faire acte de candidature à un “agrément” (licence d’exploitation délivrée pour l’un des trois domaines de l’ouverture) qui sera délivré par la future Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel) pour une durée de cinq ans, assortie d’un cahier des charges très strict et d’une fiscalité moins légère que dans d’autres pays européens.