Le secteur agricole en Tunisie : Peut mieux faire !!

L’agriculture, l’enfant chéri des pouvoirs publics !!,
apporte-t-elle tout le potentiel de sa contribution à la communauté nationale ?
Peut-on parler d’un secteur en phase avec les défis du nouveau millénaire ? Tout
le monde se demande si les solutions du passé sont encore d’actualité alors que
le pays, dont 35% de la population est d’origine rurale, se prépare, pour les
périodes des 11ème et 12ème Plans (2007-2016), à faire face à la libéralisation
progressive de certaines activités agroalimentaires sous monopole de droit ou de
fait des offices et à l’émergence des nouveautés dans les goûts des tunisiens et
des consommateurs occidentaux, exigeants sur l’itinéraire, la transparence de la
chaîne d’approvisionnement, la traçabilité des produits étalés dans leurs
supermarchés et le respect des normes environnementales.

Les performances du secteur

D’après les sources du Ministère de l’Agriculture et des Ressources
Hydrauliques, le secteur agricole, à qui l’Etat consacre 7% de son budget, a
contribué, tout au long du Xème Plan, à hauteur de 12,6% du PIB national,
représenté 9,6% du total des exportations du pays et participé pour 16%, durant
cette période, à la création d’opportunités d’emplois. En dépit des aléas
climatiques et des effets de sécheresse transitoires, les rendements par
hectare, indique un rapport de l’Agence Française de Développement, se sont
accrus, durant la dernière décennie, de 2,8% par an, grâce à la compétence des
agriculteurs, à l’expansion des cultures irriguées, à l’usage des engrais
chimiques, à la mécanisation et à l’emploi judicieux de semences améliorées.

En ce qui concerne la balance commerciale alimentaire, le taux de couverture
des importations par les exportations s’est situé, souligne le dernier Rapport
national sur l’Etat de l’environnement, à environ 79% en 2007 contre 120% en
2006. Les revenus des dattes ont enregistré, l’année écoulée, un chiffre record
(211 millions de dinars) ainsi que ceux de la pêche(en augmentation de 3%), des
légumes frais et congelés(en hausse de 68%). Quant au volume global des
investissements consentis dans le secteur agricole en 2007, il a atteint 980
millions de dinars, ce qui représente 9,26% de la valeur des sommes d’argent
injectées dans les différentes filières de l’économie nationale.

Au premier abord, les performances du secteur, en dépit des caprices de la
dame nature, semblent fortes avec la pénétration de nouveaux territoires, des
revenus plus élevés et des taux de pauvreté plus faibles. Toutefois, si l’on
gratte la surface, il existe de multiples exemples attestant de l’inefficacité
de certains organismes professionnels et autres services d’appui à
l’agriculture.

A la recherche d’un second souffle

La réussite de notre agriculture, soulignent les analystes de la Banque
mondiale, est obtenue moyennant des coûts exorbitants, pour le reste de la
société tunisienne, à cause d’une politique de subventions, qui annihilent,
chaque année, les deux cinquièmes de la croissance d’un secteur où la hausse
tendancielle de la productivité est en baisse dans certaines filières, pourtant
potentiellement compétitives comme les fruits et les légumes.

Ces constats nous poussent à poser la question suivante : De quelle manière
peut-on libérer l’agriculture nationale de ses boulets de canon ? D’abord la
protection douanière dont jouit des produits comme le lait, la pomme de terre,
le blé tendre et la viande bovine incitent le cultivateur tunisien au moindre
effort, assuré d’être sur un terrain où l’Etat Mamma lui garantit un marché à
l’abri des «affres de la concurrence étrangère», ce qui coûte, estiment des
experts internationaux, 4% du niveau de vie du consommateur et 0,8% du PIB
national.

En fait, maintenir une personne employée dans le secteur céréalier ou laitier
est une forme de chômage déguisé, coûtant à la nation «plus de quatre fois le
revenu du pays par habitant en termes de production perdue», conclut M.
Alexander Kremer, économiste principal à l’Agence française de développement,
pour qui les pratiques protectionnistes, héritières vermoulues de l’Etat-providence,
affaiblissent la compétitivité, empêchent l’éclosion du marché et découragent
les acteurs du monde rural à se prendre en charge, à hiérarchiser les priorités
et à se restructurer afin de faire face aux réalités d’un monde globalisé,
réfractaire, par essence, aux entraves à la circulation des biens et des
services.