La ruée vers les logiciels libres commence…

Les logiciels libres constituent aujourd’hui une révolution
dans le monde des TIC. Les notions de gratuité et de liberté d’appropriation
qu’ils ont introduit font qu’ils représentent un concurrent sérieux pour les
logiciels commerciaux. Le fait est que leur dimension a dépassé celle
individuelle pour être universelle qui engage désormais les grandes firmes
technologiques. Certains parlent même d’une professionnalisation des logiciels
libres, une vocation qu’on aurait mal accepté au début de leur lancement
puisqu’elle rend abstraite la notion de gratuité absolue.

Une question qui a été fortement débattue au cour de 4ème édition du
séminaire annuel sur «les logiciels libres : une forte implication des acteurs
en TIC», organisé par le ministère des Technologies de la Communication a
organisé, le 16 décembre 2008. Ce séminaire destiné aux professionnels du
secteur (intégrateurs, constructeurs et éditeurs de logiciels libres) a
constitué une opportunité pour les initiés tout comme pour les néophytes de
bénéficier de prendre connaissance du potentiel que présentent les logiciels
libres à travers le monde.

En fait, si la gratuité est une notion indéniable aux logiciels libres et à
l’open source, M. Raouf Abrougui, représentant de Business & Decision Tunisie,
un intégrateur de solutions informatique, nous a indiqué qu’il n’en est rien. De
même pour son utilisation qui n’implique pas uniquement les communautés
d’utilisateurs mais aussi de grandes sociétés tels qu’Oracle, Sun Microsystems,
etc. Egalement, l’open source professionnel donne la possibilité de bénéficier
d’une assistance technique, qui représentait auparavant une crainte pour les DSI
et les décideurs.

Professionnalisation du libre

Actuellement, de plus en plus d’entreprises investissent dans cette
dimension. «Le libre doit devenir professionnel», nous indique, avec
enthousiasme, M. Khaled Ben Driss, représentant de la société Oxia. D’ailleurs,
les logiciels libres et de l’open source connaissent un succès irréprochable.
Linux, le fameux éditeur, accapare actuellement 31% du marché des serveurs.
Apache accapare 50% des serveurs web et PHP 32% des sites mondiaux.

Notre pays n’est pas en reste de cette dynamique et attire même des
entreprises étrangères. Une entreprise française vient de s’installer en Tunisie
depuis juillet 2008. Il s’agit d’une start-up spécialisée dans l’édition de
solutions Open Source de travail collaboratif (Portail, GED, CMS, …). Elle
travaille selon le principe de la souscription en fournissant du packaging
autour des logiciels libres. A ses clients, elle offre un abonnement annuel
autour de notre plateforme. Pour son jeune manager, Benjamin Mestrallet, le
choix de la Tunisie était motivé par sa géolocalisation, son réseau de vente,
ses lois favorables à l’installation en off shore et le potentiel de son marché
local.

D’ailleurs, Mme Lamia Chaffai Sghaër, secrétaire d’Etat chargée de
l’informatique, de l’Internet et du Logiciel Libre, a affirmé qu’il est
nécessaire de bien exploiter le potentiel des logiciels libres en Tunisie. Près
de 300 entreprises sont spécialisées dans la construction des logiciels et des
systèmes électroniques. La démarche du ministère est toutefois orientée vers
l’utilisation des logiciels libres dans le secteur public.

Retour d’expérience dans le secteur public

L’expérience de la STEG est révélatrice. Débutée il y a près de trois ans, la
migration vers les logiciels libres commence à crécolter ses fruits.
L’entreprise publique a déjà finalisé son projet clientèle. Son projet de
déploiement dans la gestion des ressources humaines est en cours de déploiement
ainsi que celui de son système financier et comptable. «Ceci nous a permis de
déterminer notre positionnement technologique. Tout projet nouveau sera déployer
en logiciels libres», a souligné Mme Fatma Baccouche, chef du département
système et réseau dans la direction informatique de la STEG.

Ce positionnement a, en fait, permis à la STEG d’optimiser ses coûts de
déploiement. Auparavant, chaque fois que la STEG ouvrait une nouvelle agence,
ses informaticiens étaient obligés d’acheter du nouveau matériel et de mettre à
jour le matériel ancien avec de nouvelles licences. D’ailleurs, Mme Baccouche
nous a indiqué qu’ils comptaient acheter un produit qui coûtait fortement cher,
près de 300 MDT, pour superviser le réseau. «Nous avons pris un produit libre et
nous l’avons adapté à la STEG. Ça nous a coûté seulement un PC», a-t-elle
précisé. L’entreprise publique a également joué la carte du communautarisme, en
effectuant des réunions avec d’autres entreprises publiques comme la SONEDE et
la CNRPS pour leur faire bénéficier de son expérience et d’une liberté de
manœuvre, qui n’est pas déployée par les logiciels commerciaux.

Certains considèrent même que les logiciels libres sont le moteur
d’alphabétisation digitale. Juan Roman Allegret, représentant de Sun
Microsystems, a signalé que les logiciels libres permettent de générer de la
valeur et contribuent à l’indépendance technologique et à la démocratisation du
savoir. «Je vous cite l’exemple de la région la plus pauvre d’Espagne,
Extramadour, dans laquelle on a décidé d’intégrer les logiciels libres dans les
établissements scolaires. Ceci a permis de créer un tissu industriel basé sur
les TIC», a-t-il ajouté.

Les logiciels commerciaux se trouvent, donc, devant un concurrent
infatigable. Pour se rattraper, certains oeuvrent même à un intégrer de l’open
source dans leurs logiciels pour contrecarrer l’offre. «Vous serez désormais
capables de développer des solutions open source sur Windows», a lancé M.
Stéphane Consalbie, représentant de Microsoft.