Crise : les géants de Detroit crient au secours, les marchés d’Asie reculent

[19/11/2008 21:51:59] PARIS (AFP)

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éhicules Ford à vendre sont entreposés sur un parking de Detroit (Michigan), le 18 novembre 2008 (Photo : Spencer Platt)

Le secteur automobile, chaque jour plus sinistré, multiplie les appels à l’aide en Europe comme aux Etats-Unis, alimentant le marasme des marchés financiers concernant la durée et l’ampleur de la panne de croissance économique mondiale.

Deux nouveaux indicateurs ont montré mercredi à quel point les Etats-Unis s’enfoncent dans la crise:

– Les mises en chantier de logements et le nombre de permis de construire, respectivement en recul d’un mois sur l’autre de 4,5% et 12%, ont chuté en octobre à leur plus bas niveau depuis 48 ans.

– Les prix à la consommation ont baissé en octobre de 1,0% par rapport au mois précédent, accusant la plus forte baisse mensuelle jamais vue.

Ce brusque recul de l’indice des prix alimente les craintes de déflation, un phénomène pernicieux de baisse prolongée des prix et de la consommation.

Ces chiffres “semblent indiquer une récession plus profonde que certains ne l’avaient anticipé”, relevait Anthony Conroy, de BNY ConvergEx Group.

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ège de General Motors à Detroit (Michigan), le 18 novembre 2008 (Photo : Spencer Platt)

Après “la crise financière, même si elle est loin d’être terminée, la crise économique a pris le relais”, a estimé le directeur général du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn.

Pour le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, la crise financière est désormais “aussi une crise de l’emploi”, qu’il faut combattre en développant les investissements pour l’environnement.

La France et l’Allemagne vont de leur côté tenter d’accorder leurs violons. La chancelière allemande Angela Merkel sera à Paris le 24 novembre à l’occasion d’un conseil franco-allemand largement consacré à la mise au point de “mesures concrètes” pour relancer l’économie mondiale.

En Europe, où les valeurs automobiles et bancaires ont particulièrement souffert, la Bourse de Londres a lourdement chuté de 4,82% en clôture, Paris perdant 4,03%, Francfort 4,92%, Madrid 3,74% et Milan 2,90%.

A la Bourse de New York, le Dow Jones perdait 2,18% et le Nasdaq 3,07% vers 17H00 GMT.

Dans l’automobile, les patrons des “Big Three” américains General Motors, Ford et Chrysler tentent toujours de convaincre le Congrès de leur accorder un crédit-relais de 25 milliards de dollars pour éviter la faillite.

Favorable à cette demande, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, veut toutefois assortir cette aide de “conditions très strictes”: gel des primes et utilisation de technologies moins gourmandes en carburant.

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étaire américain au Trésor Henry Paulson (g) et le président de la Fed Ben Bernanke, le 18 novembre 2008 à Washington (Photo : Karen Bleier)

Le PDG de Chrysler, Robert Nardelli, avait agité mardi l’épouvantail d’une faillite entraînant la suppression de 56.000 emplois, “sans un soutien financier immédiat” de l’Etat fédéral. Il s’est même dit prêt à se contenter d’un salaire annuel d’un dollar.

Mais le secrétaire américain au Trésor, Henry Paulson, refuse qu’une partie des 700 milliards de dollars affectés au sauvetage du système financier serve à soutenir le secteur automobile.

Mercredi, le premier constructeur automobile japonais Toyota a annoncé l’arrêt de sa production dans toutes ses usines aux Etats-Unis et au Canada pendant deux jours en décembre en raison de la chute de la demande.

En Europe également, les constructeurs automobiles réclament des mesures de soutien, craignant d’être désavantagés face à leurs concurrents américains si ceux-ci reçoivent une aide publique.

Le président du groupe Fiat, Luca Cordero di Montezemolo a jugé mercredi “nécessaires” des mesures de soutien à l’industrie européenne, tandis qu’en Grande-Bretagne le secteur automobile a écrit une lettre en ce sens au gouvernement.

Face aux difficultés du secteur automobile, l’un des plus gros employeurs d’Europe, l’Union européenne s’oriente vers des mesures de soutien ciblées, pour encourager une reconversion vers les véhicules “verts”, de préférence à un plan de sauvetage classique.

“Il n’y aura pas de subventions, et d’ailleurs l’industrie ne demande pas de subventions”, a assuré le commissaire européen à l’Industrie Günter Verheugen.

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à Tokyo (Photo : Yoshikazu Tsuno)

L’association des constructeurs européensk, ACEA, a réclamé début octobre 40 milliards d’euros de prêts à taux réduit pour financer le développement de véhicules plus verts, ainsi que des primes incitant les automobilistes à changer de voiture.

La Banque européenne d’investissement est prête à accroître sensiblement sa ligne de crédits.

Tous les moyens sont bons pour soutenir l’automobile: le président roumain Traian Basescu va échanger sa Volkswagen contre une Dacia Logan (groupe Renault) fabriquée localement.

En Allemagne, le groupe allemand d’énergie solaire Solarworld a créé la surprise en annonçant qu’il voulait racheter pour un milliard d’euros les sites allemands du constructeur automobile Opel, afin de devenir le premier producteur européen de voitures “vertes”.

Cette offre survient au moment où Opel, victime de la réduction de la demande et des difficultés de sa maison mère américaine General Motors, demande aux pouvoirs publics une garantie financière pour assurer sa survie. L’Etat régional allemand de Hesse (ouest) a déjà adopté mercredi une loi portant sur l’octroi d’une garantie allant jusqu’à 500 millions d’euros.

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ésident de la BCE Jean-Claude Trichet, le 18 novembre 2008 à Londres (Photo : Carl de Souza)

Le président de la Banque centrale européenne (BCE) Jean-Claude Trichet a donné la mesure de l’ampleur des difficultés : “C’est la première fois que le coeur de la finance des pays industrialisés est en jeu”, a-t-il déclaré. “C’est la première fois depuis la Deuxième guerre mondiale”, a-t-il insisté.

Il a préconisé “des efforts conjoints des autorités, banques centrales et gouvernements” et du secteur privé qui “a un rôle essentiel à jouer pour sortir de cette situation”.

D’autres secteurs entrent à leur tour en crise.

Le numéro un mondial de la chimie BASF a annoncé un plan de réduction de sa production avec notamment un arrêt temporaire de 80 usines, touchant 20.000 salariés.

Confronté à la baisse de la demande des clients automobiles, le groupe chimique français Rhodia va réduire de 40% sa production sur ses trois sites français.

L’Espagne a désormais un pied dans la récession, avec la confirmation que son produit intérieur brut s’est contracté de 0,2% au troisième trimestre par rapport au précédent.

Le moral des industriels britanniques a continué de se dégrader en novembre, l’indice tombant à son plus bas niveau depuis 1980.

Les marchés asiatiques avaient terminé plus tôt en baisse, Tokyo perdant 0,66%, Hong Kong 0,77% et Séoul 1,9%. Shanghai a bondi de 6,05%.