La crise financière débattue demain à Washington : le Sommet de tous les (dés)espoirs ?

Ce 15 novembre a lieu à Washington le sommet présumé
”réformer le système financier international”. Le président français Nicolas
Sarkozy a d’ores et déjà déclaré ne pas vouloir se contenter seulement de
déclarations de principes rappelant implicitement aux Américains leurs
responsabilités dans le déclenchement de la crise financière internationale à
l’origine de faillites à l’échelle de pays entiers.

Aux Etats-Unis, le taux de chômage n’a jamais été aussi fort. Il a augmenté
de 6,5% au mois d’octobre, un taux jamais atteint en 14 ans. «Nous vivons un
cauchemar», a déclaré Alan Ruskin, économiste au RBS à Greenwich, en ajoutant
qu’il y a des risques que le taux de chômage atteigne les 8%, ce qui n’est
jamais arrivé depuis 1980 d’autant plus que le marché américain est en pleine
récession et ne risque pas d’en sortir de sitôt.

M. Dominique Strauss-Kahn, le directeur général du Fonds monétaire
international, s’attend à ce que le prochain sommet des 20 opère des changements
radicaux dans les choix économiques à l’échelle planétaire. «Le Bretton Woods de
1944 n’est plus d’actualité», a-t-il précisé. Obama, quant à lui, a déclaré que
ses priorités dès sa prise de fonction seront d’examiner le programme
d’assistance financière aux banques. Il compte également mettre en place une
stratégie pour le développement et la dynamisation de l’industrie automobile
américaine en régression et dont la situation a empiré depuis le déclenchement
de la crise financière. Il compte, d’autre part, soutenir les PME, les plus
grandes pourvoyeuses d’emplois aux Etats-Unis. En attendant, il ne participera
pas au sommet du G20 ce 15 novembre.

«Sorti à la hâte…»

Commentant la prochaine réunion du G20, Béchir Ben Yahmed, fondateur de
l’hebdomadaire international Jeune Afrique a déclaré qu’on ne devrait pas en
attendre grand-chose «Sorti à la hâte d’on ne sait quel chapeau pour remplacer
un G8 discrédité, il n’est pas représentatif du monde d’aujourd’hui», écrit-il
dans le n°2495 de Jeune Afrique.

«Il existe deux “trous noirs” dans la gouvernance mondiale : la finance avec
ses bulles qui éclatent et les migrations, un secteur où il n’y a pas de bulle,
mais des drames quotidiens», assure Pascal Lamy, directeur général de
l’Organisation mondiale du commerce, faisant allusion à la crise financière. Il
décrète une régulation internationale de la finance avec des règles
contraignantes et un mécanisme de surveillance et de sanctions. «Un bovin malade
ou un briquet dangereux ne franchissent pas les frontières, un produit financier
le peut», déclare-t-il dans le journal Le Monde.

L’Europe, quant à elle, se serre les rangs en prévision de la journée du
samedi, c’est d’une seule voix qu’elle s’exprimera. La refonte du système
financier mondial sera mise sur la table même s’il est difficile de négocier en
l’absence des futurs maîtres de la Maison Blanche. L’Allemagne, première
économie de la zone euro, est entrée en récession suite à la renonciation de
Washington à son plan de rachat d’actifs invendables des banques, les bourses
allemandes ont chuté depuis que le secrétaire américain au Trésor, Henry Paulson,
a déclaré que les 700 milliards de dollars de son plan de sauvetage ne serviront
pas à racheter les crédits hypothécaires douteux mais seront plutôt investis
dans le capital des banques qui ont accordé les prêts en question.

Sur un tout autre plan, le distributeur américain de produits d’électronique,
Best Buy, a décrit la période actuelle comme étant la plus difficile pour les
consommateurs depuis sa fondation il y a 42 ans, annonçant une récession de la
consommation en cette période des fêtes, d’habitude, assez faste. Cette série de
mauvaises nouvelles a fait lourdement chuter jeudi les marchés d’Asie.

«Il est choquant de voir que le gouvernement américain n’utilisera rien des
700 milliards de dollars pour acheter des actifs adossés à des hypothèques, ce
qui était la première raison d’être du plan de sauvetage», a écrit un stratège
chez CFC Seymour à Hong Kong, et ajoute que «la chute des prix des maisons et
des titres adossés aux hypothèques est la cause principale de la crise actuelle.
Un abandon des tentatives pour résoudre ces problèmes de façon énergique
prolongera la récession».

Et l’Afrique dans tout ça ?

Les pays africains, en prévision du Sommet de Washington sur la crise
financière, réclament une participation plus importante dans la prise de
décision pour la refonte du système financier international. Représentés par les
ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales réunis à Tunis,
ils ont reconnu que la crise ne pouvait tomber à pire moment pour le continent.
«Elle compromet les progrès appréciables enregistrés ces dix dernières années et
accentue les effets de la récente montée en flèche des prix des produits
alimentaires et de la volatilité des marchés pétroliers», déclaraient-ils dans
un communiqué à l’issue de la réunion. Ils ont appelé les Institutions
financières internationales (IFI) à venir en aide aux pays émergents et se sont
entendus pour approfondir les réformes économiques. Tout comme ils ont reconnu
la nécessité de renforcer la règlementation et la surveillance des institutions
financières et d’accorder plus d’importance à la gestion des risques.

Les pays du G20, quant à eux, se préparent au sommet et attendent aux dires
de Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères français, «le début d’un
processus, d’un travail acharné et difficile d’experts pour une régulation de
cette économie de marché, que tout le monde connaît et approuve».

Les Américains, pour leur part, sceptiques, au début, quant à l’efficience du
Sommet, en attendent des résultats concrets.

Quant au Japon, c’est du concret et tout de suite, puisque son Premier
ministre, Taro Aso, compte annoncer un prêt au Fonds monétaire international
(FMI) pouvant atteindre les 100 milliards de dollars pour renflouer les pays
ruinés par la crise.