Fred Foldvary, le visionnaire qui avait prédit en 2004 la récession pour 2009

Par : Tallel

Le monde, les gens, les médias, les officiels s’agitent autour
de la crise financière actuelle. Et quelques-uns de désigner des coupables.
C’est un peu facile, même si les institutions financières sont largement
impliquées. Elles n’ont fait que jouer avec les règles économiques et pratiquer
ce que Keynes appelait une finance de casino. Car c’est le système qui, sur le
long terme, a généré cet éternuement financier devant conduire à une récession
qui semble inhérente au système, une crise de croissance, prévisible pour ceux
qui savent jouer d’un esprit visionnaire.

foldvary1.jpgJustement,
Fred Foldvary, économiste, penseur et éditorialiste en chef sur le journal
numérique Progress Report, fait partie de ces intellectuels visionnaires,
atypiques, comme l’Amérique en produit ; par exemple Mike Davies, Ken Wilber,
Alvin Toffler… Politiquement, Foldvary se réclame des idées d’Henry Georges,
un politologue humaniste de la fin du XIXe siècle, qui n’est pas plus connu
là-bas que chez nous Léon Bourgeois, autre humaniste de cette époque, aux
idées radicales ; Foldvary est proche de Ralph Nader. Juste après les
attentats du WTC, il n’hésitait pas à demander qu’on lève l’embargo
alimentaire en Irak, que les forces américaines quittent l’Arabie Saoudite,
car le Koweït peut être protégé par d’autres dispositifs, que la sécurité
dans le golfe Persique soit assurée par une force internationale incluant
les pays africains et asiatiques, que les Etats-Unis s’excusent auprès du
peuple iranien pour avoir soutenu le shah et d’autres suggestions. Avec
comme principe l’usage de la politique plutôt que la force pour résoudre les
problèmes internationaux et éviter les tragédies civiles. Voilà un type
dingue et génial qu’on devrait écouter, même s’il n’est pas infaillible et
discutable sur bien des points. Un type qui affirme que les ressources
naturelles appartiennent à tous et n’ont pas à être entre les mains de
quelques groupes industriels !

Revenons à notre crise financière. Désigner des coupables paraît trop
facile. Foldvary avait prédit non pas cette crise, mais une récession à la
fin de notre décennie. En misant sur un cycle de dix-huit ans. La dernière
récession américaine datant de 1991. Entre-temps, il y eut une autre
récession, modeste, dont personne ne se souvient. En 2001, une récession
amorcée avant les attentats du WTC et qui a duré huit mois. Quatre causes
selon Foldvary, l’une contingente, les attentats du 11-Septembre, mais la
récession avait commencé bien avant. D’où les autres causes, le boom
technologique des années 1990 (nouvelle économie), la politique monétaire
de la Fed, injectant des liquidités et entraînant le dernier facteur, celui
des fonds de pensions, des traders, des banques d’affaires, des
institutions qui se greffent tels des parasites sur le système en pompant
par des voies légales l’argent de l’économie. Sur ce point, et c’est
important, Foldvary ne parle pas de cas véreux isolés, mais d’une réelle
culture de la corruption financière généralisée. C’est bon de l’entendre
car c’est bien cette corruption qui cause la débâcle financière actuelle.
Et si notre bon président veut sanctionner les coupables, alors c’est tout
le système qu’il faut mettre sous les verrous ou du moins à l’amende. Il y
a un an, la Fed a baissé ses taux d’intérêt pour aider le système, mais il
se peut bien qu’on découvre que ça n’a fait que l’aggraver (il y a selon
moi un vice majeur dans la politique monétaire mondiale, mais c’est un
autre sujet).

C’était donc prévisible, cette crise financière qui selon les
déclarations officielles va causer la récession alors que c’est autant la
récession en latence qui cause cette crise financière. Il est pratiquement
certain que, sur le fond caché des ressorts économiques, il n’y a pas cette
causalité si évidente qu’elle permet de désigner des fautifs aux yeux du
public alors que c’est le système qui est vérolé, comme le laisse entendre
Foldvary. Un sacré éditorialiste, évoquant la matière noire des physiciens
en forgeant la thèse d’une matière noire financière. C’est qu’il est fin
limier, notre artiste de l’économie. Ecoutez ceci. Entre 1975 et 2005, le
produit intérieur brut a augmenté de 3 points par an, alors que le revenu
médian des ménages américains n’a cru que de 0,8 points. Et donc la
question, où est passée le reste de la croissance ?

Bref, les officiels et les relais médiatiques mènent les populations en
bateau, surtout ces temps-ci. Ce bateau, c’est le Titanic comme l’affirmait
Foldvary dans son billet de janvier 2004, annonçant un désastre économique
pire que 1929 à la fin de la décennie, vers 2010. Titanic, oui, l’image est
parlante. Je reste sceptique sur un spectre à la 1929 au vu de la
conjoncture mondiale, mais le Titanic parle bien de la situation, certains
seront sauvés du naufrage et d’autres vont couler. On ne sait pas combien
car le Titanic économique ne dévoile que la face immergée. Tout dépend de
l’activité des secouristes et du sentiment humaniste présent dans la
société. La récession, elle épargne les uns, coule les autres et permet à
quelques-uns de faire des fabuleux profits. Et le public de continuer à
danser tant qu’il peut, bien ignorant du fonctionnement du système comme le
dit si bien Foldvary : «The only effective remedy is politically impossible,
because not one person in a hundred has any clue about the economic
realities. The remedy is to tap the land rent of the country for public
revenue. That would halt the speculative escalation of land prices. It would
finance the baby boomer demographic transition. It would eliminate the
federal budget deficit. It would prevent interest rates from rising too high,
and reduce the demand for excessive monetary expansion.

Land does not get produced, and its value comes from nature and community
and public works, so tapping it for government revenue does not hurt
enterprise, unlike taxes on wages and sales. No constitutional changes are
needed ; indeed the federal government several times taxed real estate as a
direct tax prior to the civil war. The US federal government paid for the
War of 1812 mostly by taxing land value. They could do it again, to avert
the fiscal and economic crisis.

But they won’t. The public is not demanding it. We are dancing on the
Titanic. The economic ship is now full steam ahead. Few see the waterfall
beyond the immediate horizon. Even most economists are clueless. You have
now been warned, but most who read this will not really believe it. Most of
those who believe it will do nothing about it. That’s why the cycle will run
its course, and it may be a worse economic disaster than the Great
Depression of the 1930s»

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