Batam : une situation critique qui se confirme

Nous avons, à tort
semble-t-il, cru que la stabilité allait enfin régner à Batam, après la
signature du PV de la passation sociale le jeudi 8 mai 2008.

Une petite visite dans les locaux de la société vous confirmerait ces propos
: une trentaine d’employés à la société -rachetée depuis quelques mois par
Samir Dhiab et Mohammed Makni- se sont rassemblés le jeudi 4 septembre 2008
au siège de Batam pour exprimer leur colère et refus face à une situation de
plus en plus dégradée, semble-t-il. Le port du brassard rouge est l’une des
façons d’exprimer cette colère «silencieuse» qui mijote au fond de chacun
des employés.

L’ouverture des magasins initialement prévue pour le mois de mai dernier n’a
pas eu lieu. Après un nième report, on n’avance toujours pas de date fixe
pour cette ouverture !
Une situation sans doute étonnante et qui pousse à se demander sur le
pourquoi de ce report indéterminé, mais il convient également de se demander
à quand la mésentente primera à Batam entre les employés et la nouvelle
direction?

Syndicat : «c’est la cassure!»


«S’il vous plaît, parlez de nos maux, de notre situation qui ne s’est pas
améliorée d’un pouce depuis ce rachat», c’est en ces propos que l’un des
employés rassemblés nous a accueillis avec un visage qui ne manque pas de
désespoir. Il n’est pas le seul à prouver ce sentiment certes de colère, de
refus, de désespoir mais aussi d’amour pour cette société à laquelle ils ont
«beaucoup donné», selon leurs propos.

L’avis du syndicat pour cette situation est clair et tranchant : «c’est la
cassure», nous confie un responsable syndical, qui nous affirme qu’ils ont,
à plusieurs reprises, «vainement» essayé de négocier leurs problèmes de
salaires, d’horaire de travail, «d’avenir de la société» avec la nouvelle
direction.

Après que le PV de la passation sociale ait été signé, les revendications
actuelles de quelque 300 employés de Batam portent – par ordre de priorité
exprimé par les employés- sur :


– l’avenir de la société : l’ouverture des magasins étant reportée plusieurs
fois et l’activité n’ayant toujours pas été reprise.
– l’horaire de travail : pendant le mois saint du Ramadan les employés de
Batam travaillent en double séance (de 8h à 13h et puis de 14h30 à 18h) !
– les sanctions «injustifiées» prises à l’égard d’une cinquantaine
d’employés,
– Le non versement du salaire du mois d’août jusqu’au 4 septembre 2008 (date
de notre visite dans les locaux de la société).
 

Toujours selon notre interlocuteur, la nouvelle direction aurait présenté
une demande aux autorités pour bénéficier des avantages octroyés aux
entreprises en difficultés. Cette demande est selon le syndicaliste une façon
de légitimer par la suite le chômage technique et le licenciement, alors que
les acquéreurs se sont initialement engagés à ne pas licencier d’employés
sauf faute grave bien entendu.

Face à cette situation, les employés de Batam ont décidé d’observer une
grève de deux jours, les 15 et 16 septembre 2008. Cette décision traduit
clairement la tension persistante au sein de l’entreprise entre les employés
et les nouveaux acquéreurs dont l’un d’entre eux vient de démissionner de sa
qualité de gérant, soit M. Mohamed Makni. Suite à cette décision de
démission, MM. Fehmi Mhiri et Mohamed Naceur Essuih ont été nommés en tant
que gérants solidaires de la société.

Direction Batam : «situation très critique !»


Si la situation pour les employés et leur syndicat est qualifiée
d’«irréparable», elle est aux yeux de la nouvelle direction jugée «très
critique».
M. Fehmi Mhiri, récemment nommé à Batam, a aimablement accepté de nous
accueillir pour nous exprimer le point de vue de la direction face à cette
situation, qui est le moins que l’on puisse dire alarmante.

«C’est une situation très critique, souligne M. Mhiri ; il y a un arrêt
total de la communication entre la direction et le syndicat».

Pour ce qui est de l’ouverture des magasins incessamment reportée, M. Mhiri
nous a expliqué que «c’est dû à des problèmes administratifs liés à la
cession» (des problèmes avec le tribunal) et que l’ouverture même partielle
devrait incessamment avoir lieu.

Quant au travail en double séance pendant le mois de Ramadan, M. Mhiri nous
souligne que Batam fait partie du régime 48 heures, et que légalement la
direction n’est pas dans le tort si elle demande aux employés de travailler
en double séance que ce soit en été ou pendant le mois de Ramadan. «La
direction a opté pour la séance unique en été, mais nous avons constaté que
le travail ne se faisait pas du tout comme il le fallait, donc nous avons pensé
que le temps alloué n’est pas suffisant et avons donc pris la décision de
retourner à la double séance», explique M. Mhiri. «La double séance pendant
le mois de Ramadan est un problème qui suscite la sympathie de l’autre quand
on se plaint, c’est pour cela qu’il est avancé comme argument pour les
rassemblements et les grèves syndicales, mais en réalité les employers ne
veulent pas travailler et refusent de s’exécuter aux ordres de la direction
et c’est là où réside le problème. Sans travail, nous ne pourrons jamais
avancer».

Reste le problème du salaire, non encore versé. M. Mhiri s’exprime à ce
propos pour nous dire que «le salaire doit être versé d’ici le début de la
semaine maximum. Nous sommes toujours dans les délais».

Ainsi, la tension persiste au sein de Batam entre les employés et la nouvelle
direction bien que nous ayons cru à un moment donné que les deux parties
avaient réussi à trouver un compromis.