Média tunisien : blogs contre presse


Par Oualid CHINE

En périodes de turbulences, nos blogs jouent un rôle informationnel de tout
premier plan. Que de trop nombreux titres de nos médias «reconnus» ont
renoncé à jouer. Ils se sont mis gentiment sur la touche, pour laisser la
parole aux jeunes. Tant mieux, puisque l’année leur est consacrée ! Le
dialogue avec les jeunes passe désormais aussi par le net. Et ils ont la
langue bien pendue ! Sur les blogs les phrases sont lapidaires, ce qui
n’offre guère d’espace à la redondance, et autres discours ronronnants. Pour
diverses raisons, bien connues des Tunisiens.

 

Paradoxalement, même des journalistes généralement «bien informés»,
commencent leur journée par une lecture attentive de quelques blogs. Et
depuis l’avènement des «agrégateurs», ces sites qui rassemblent sur une page
les commentaires de dizaines de blogs différents, la tache n’en est que plus
aisée. La blogosphère tunisienne a déployé ses ailes pour s’intéresser à
tous les domaines touchant le Tunisien.

 

Nous n’avons pas, dans la presse écrite traditionnelle, des journaux
spécialisés dans le marketing et la publicité, par exemple. Des blogueurs
tunisiens ont pallié ce manque. Analysant, décortiquant les campagnes de
pub, et donnant leur point de vue de professionnel. Car quoiqu’on en dise,
ce ne sont pas toujours des amateurs qui s’expriment sur le Net. Mieux : ce
sont souvent des professionnels chevronnés, passionnés par leur métier, qui
font profiter leurs lecteurs en ligne de leur expérience. Quelques uns
commencent même par faire autorité.

 

Les blogueurs y gagnent en notoriété, leurs lecteurs acquièrent des
connaissances introuvables sur d’autres supports. Vu que la presse
spécialisée dans les hautes technologies, le marketing, et autres secteurs
pointus de l’économie, est encore à ses premiers balbutiements dans notre
pays. Sans même parler de la presse satirique tunisienne, autrefois
florissante, et qui s’est aujourd’hui perdue. Voilà que nos blogs s’y
mettent aussi ! Des plumes acérées (quoique le mot clavier aurait été plus
approprié), un sens de la dérision parfois poussé, que l’on aimerait trouver
plus souvent dans nos journaux imprimés.

 

Et quand les agrégateurs de blogs ne suffisent pas, restera toujours la
possibilité de suivre les liens que les blogueurs mettent sur leur site.
Offrant ainsi la possibilité aux internautes d’approfondir leurs recherche
dans le même champ d’intérêt. Que l’on soit intéressé par le haut débit (pas
si haut que ça, dans nos contrées), ou par les dernières actualités
concernant la communauté tunisienne au Canada, le raccourci des blogs permet
de gagner du temps, et de s’informer sur des sujets généralement soit
délaissés, soit traités à la légère par une presse qui, décidément,
s’éloigne des intérêts de ces concitoyens.

 

Certains mettent pourtant en cause la crédibilité de nos blogueurs. Ces
derniers ne la revendiquent pourtant pas. Puisqu’il s’agit clairement
d’opinions personnelles, d’impressions individuelles a priori
non-généralisables. Mais le nombre tous les jours croissant de blogs
traitant d’un même sujet, permet pourtant d’obtenir une image nette de la
réalité évoquée. Et après tout, la «presse classique» n’est pas, à cet
égard, tout à fait irréprochable. On ne compte d’ailleurs plus les
journalistes qui, parfois, après plus de 30 ans de carrière, sont venus
renforcer les rangs du net, par blogs interposés. Si les blogs et les
portails d’informations sont florissant, c’est aussi, peut-être, parce que
les tenants de la presse traditionnelle, leur ont abandonné le terrain. Tant
mieux pour le net tunisien. Dommage pour nos quotidiens.