Pratique des affaires en Afrique : La sécurité juridique et judiciaire, un impératif

Par : Tallel

Par
Rabankhi Abou-Bâkr ZIDA

La Cour commune de justice et d’arbitrage de l’Organisation pour
l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (CCJA/OHADA) a organisé du
5 au 7 février 2008 en Guinée- Conakry, un atelier de sensibilisation au
profit des opérateurs économiques et des organes de presse de la zone OHADA.
L’ouverture des travaux a été présidée par le Premier ministre guinéen,
Lansana Kouyaté.

 

“Le droit OHADA à l’épreuve de la pratique”

 

Sous ce thème
a été organisé en Guinée-Conakry du 5 au 7 février, un atelier de
sensibilisation au profit des opérateurs économiques et des organes de
presse. L’objectif recherché par la Cour de justice et d’arbitrage de
l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (CCJA/OHADA)
à travers cette activité est le suivant : “donner l’occasion aux opérateurs
économiques et aux médias de s’imprégner des règles du droit uniforme et des
tendances jurisprudentielles de la haute juridiction communautaire sur un
certain nombre de questions importantes”. L’atelier visait également selon
le président de la CCJA/OHADA, M. N’Dongo Fall, “l’évaluation de l’impact
des décisions de la Cour dans les pays membres de l’OHADA”. Le Premier
ministre guinéen, Lansana Kouyaté a salué cette initiative car dit-il, en
général les magistrats ne sont pas enthousiastes à l’idée de sortir de leur
palais de justice. Pour lui, le rythme d’adoption et la qualité des Actes
uniformes de OHADA imposent le respect et prouvent que cette organisation
est “le meilleur moyen d’intégration africaine dont nous disposons
aujourd’hui”.

 

L’OHADA en
effet, régit à titre exclusif, le droit commercial général, les sociétés
commerciales et groupements d’intérêt économiques, l’organisation et
l’harmonisation de la comptabilité de l’entreprise, les sûretés, les
procédures simplifiées de recouvrement et les voies d’exécution, les
procédures collectives d’apurement du passif et les contrats de transport de
marchandises par, la route. Le Premier ministre guinéen a, par ailleurs,
regrette le fait que l’acte uniforme du 22 mars 2002 relatif aux contrats de
transport de marchandises par la route n’ait pas fait l’objet d’un thème de
communication à cet atelier.

Très bientôt
annonce-t-il, “le droit du travail sera unifié pour l’ensemble des seize
Etats de l’OHADA”. Cela constituera une avancée en termes de création
d’entreprises et de disponibilité de la main d’œuvre dans la zone. Lansana
Kouyaté a également relevé que les commerçants, les chefs d’entreprises et
magistrats ont la responsabilité de faire vivre l’OHADA pour que “le rêve
panafricain soit une réalité”. L’OHADA, selon lui, doit raffermir sa base
par l’extension des matières harmonisées et l’élargir progressivement en
recevant en son sein, tous les Etats africains qui le souhaitent.

 


La sécurité juridique et judiciaire

 

“Face aux
difficultés économiques persistantes et à la crise judiciaire, il est
impératif de poser des actes dans le sens de garantir aux investisseurs, une
sécurité juridique et judiciaire”. Tel est l’avis du chef du Projet d’appui
institutionnel du Fonds africain de développement (FAD) à la CCJA/OHADA,
Mme Andréa Marie Elise Agbo. Pour elle, plus que jamais, le droit doit se
mettre au service du développement. La ministre de la Justice et des Droits
de l’homme de la Guinée a ainsi salué l’appui technique et financier du FAD/BAD.
Et de conclure que même si “le présent atelier ne tranche aucun contentieux,
il a une vertu inexplicable” Du 5 au 7 février 2008 en effet, la centaine de
participants des 16 Etats de l’OHADA ont eu droit à deux communications par
jour. “L’arbitrage institutionnel de la CCJA de l’OHADA” est le thème de la
première communication. Présentée par Jacques M’Bosso, premier-vice
président de la CCJA, cette communication fait ressortir les éléments
suivants dans une première partie intitulée “régime juridique de l’arbitrage
CCJA” : les textes de base constitutifs du régime juridique de l’arbitrage
CCJA, le champ d’application du droit de l’arbitrage CCJA.

 

Dans une
deuxième partie, il a été question de l’administration et du déroulement de
la procédure arbitrale de la CCJA. A ce niveau, Jacques M’Bosso a fait
ressortir le double rôle de la CCJA (attributions administratives et
attributions juridictionnelles). D’autres questions comme la mise en œuvre
de la procédure CCJA, la constitution du tribunal arbitral, la remise du
dossier à ou aux arbitres, l’établissement du procès verbal constatant
l’objet du litige et fixant le déroulement de la procédure, le déroulement
de l’instance arbitrale, la contestation de la validité de la sentence,
l’exécution volontaire ou forcée de la sentence ont également été traités
par l’exposant.

 

A sa suite,
M. Maïnassara Maïdagi, magistrat à la CCJA/OHADA, a donné un “aperçu sur le
droit commercial général” . Après avoir fait un état des lieux avant et
depuis les indépendances, le magistrat nigérien a d’abord fait une
présentation général de l’Acte uniforme de l’OHADA. Il ressort que le
document comprend 289 articles subdivisés en 5 livres traitant
respectivement des sujets suivants : le statut des commerçants, le registre
du commerce et le crédit mobilier, le bail commercial et le fonds de
commerce, les intermédiaires de commerce, la vente commerciale. Chacun de
ses sujets a été développé par Maïnassara Maïdagi. Il est ensuite revenu sur
“les innovations liées à l’adoption de l’acte uniforme”. Pour lui, les
innovations les plus significatives portent sur la définition des actes de
commerce, sur le registre du commerce et du crédit mobilier, du le bail
commercial et sur la vente commerciale. La troisième communication est un
“aperçu sur les sociétés commerciales et les groupements d’intérêt
économiques”.

 

Ce thème a
été développé par Amadou Sakho, directeur du Centre de formation et de
documentation judiciaires de la Guinée. Il a dans une premier temps, parlé
des statuts de la société, des apports, de la nullité de la société, de la
personnalité morale, de la participation aux bénéfices et aux pertes, la
décision collectives, des dirigeants sociaux, des commissaires aux comptes,
des liens entre sociétés, de la dissolution de la société.

 

La 2ème
partie de l’exposé de M. Sakho a concerné “les règles propres à chaque type
de société”. Il s’agit notamment de la société en nom collectif, la société
en commandite simple, la société à responsabilité limitée, la société
anonyme, le groupement d’intérêt économique. Enfin, Amadou Sakho a dressé un
tableau comparatif des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt
économique sous l’angle du capital, du statut des associés, de la direction,
de la responsabilité des associés ou membres, des commissaires aux comptes
inscrits au tableau des experts agréés. La quatrième communication faite par
Felix Onana Etoundi porte sur “le recouvrement des créances”. Magistrat
camerounais, docteur d’Etat en droit des affaires, Félix Onna E. est juriste
à la CCJA/OHADA.

 

Son
intervention a porté sur deux points : “le recouvrement des créances par les
procédures simplifiées et le recouvrement des créances par les voies
d’exécution”. En conclusion, l’intervenant a dit que théoriquement, “la
reforme des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies
d’exécution de l’OHADA a considérablement augmenté les chances du créancier
de pouvoir contraindre son débiteur à honorer ses engagements”. Mais dans la
pratique, les contestations systématiques du débiteur créent un contentieux
parfois lent et coûteux qui en limite l’efficacité.

 


Le droit des affaires dans tous ses états

 

Encore que
s’agissant de l’injonction de payer, l’on se demande si le législateur OHADA
avait besoin de l’étendre à n’importe quel montant alors que le droit
antérieur, lui, ne concernait que les petites créances civiles et
commerciales. Aussi, l’on se demande si la saisie-attribution des créances a
suffisamment mieux combattu l’insolvabilité qu’elle était censée combattre
par rapport à la saisie-arrêt traditionnelle qu’elle a remplacée. La
cinquième communication portant sur “les entreprises en difficulté” a été
faite par Fodé Bangoura, président du tribunal de première instance de
Kaloum. Cette communication compte 4 volets : la prévention des difficultés
de l’entreprise, le redressement, la disparition de l’entreprise (la
liquidation), les sanctions.

 

Le droit des
entreprises en difficulté, spécialement celui des procédures collectives, a
été profondément renouvelé avec l’adoption de l’Acte uniforme portant
organisation des procédures collectives d’apurement du passif à Libreville,
le 10 avril 1998. Il est entré en vigueur le 1er janvier 1999. Il est
applicable aux procédures ouvertes à compter de son entrée en vigueur. La
sixième et dernière communication est intitulée : “l’intervention de la Cour
commune de justice et d’arbitrage de l’OHADA en matière consultative et
contentieuse”. Elle a été présentée par Boubacar Dicko, magistrat et juge à
la CCJA/OHADA. Sa communication a consisté d’abord en une présentation de la
CCJA. Puis, il est revenu sur les attributions, les compétences et les

procédures de
la CCJA et enfin, les effets des décisions de la CCJA.

 

La CCJA
assure entre autres rôles, l’interprétation et l’application commune du
traité, des règlements pris pour son application et des actes uniformes.
Pour M. Dicko, en guise de conclusion, on retiendra essentiellement une
autonomie et un détachement des arrêts de la CCJA de tout ordre juridique
national ainsi que des contingences diverses de celui-ci. Il en résulte, à
tout le moins, simplification, célérité et efficacité, toutes choses pouvant
exercer une certaine séduction des investisseurs. C’est là un des objectifs
importants du traité institutif de l’OHADA.

 

Les pères
fondateurs de cette organisation ont créé “la CCJA pour assurer et garantir
la sécurité juridique et judiciaire des investisseurs économiques nationaux
et étrangers dans les Etats membres”. Pour permettre l’atteinte de cet
objectif, les participants au présent atelier, ont formulé deux
recommandations. Il s’agit de la révision des articles 12 et 30 de la
procédure simplifié de recouvrement et de la procédure d’exécution. Aussi,
ils ont estimé que la multiplication de ce genre d’atelier et la traduction
des actes de l’OHADA en espagnol, en anglais, en portugais apportera un plus
à l’OHADA.

 

(Source :

http://www.lefaso.net/spip.php?article25591&rubrique3
)