La Banque Mondiale peaufine sa communication en direction du Maghreb

Par : Autres
La Banque Mondiale peaufine sa communication en direction du Maghreb

Par Oualid CHINE

La Banque mondiale donnait, vendredi 2 novembre 2007, une
conférence à la Bibliothèque Nationale, avec pour thème l’accès aux
informations qu’elle même produit. Le 30 octobre, c’était le tour des
étudiants du Campus Universitaire de Tunis. Les 25-26 octobre, c’est à
Casablanca que des journalistes maghrébins apprenaient que le fameux rapport
« Doing Business» est avant tout incitatif !

La Banque mondiale multiplie les opérations de communication à destination
du Maghreb. Le 30 octobre, une conférence a été donnée au campus
universitaire de Tunis, avec pour thème central, l’accès aux informations.
Même programme, vendredi 2 novembre 2007, dans le cadre des activités de la
Bibliothèque Nationale Tunisienne. Mme Véronique Danforth, Chef de l’Unité
de Coordination des services publics d’information, basée à Washington, a
fait spécialement le déplacement pour l’occasion, après avoir dirigé, les 25
et 26 octobre, une session de formation spécialement destinée aux
journalistes maghrébins (Tunisiens, Algériens, et Marocains).

L’objectif : Permettre au grand public, comme aux professionnels, aux
étudiants comme aux journalistes de se documenter, d’obtenir des
informations fiables sur les différentes actions de l’institution
internationale. Une initiative qui est destinée à favoriser la libre
circulation de l’information sur les projets et programmes de développement
financés par la banque. Mais il s’agit aussi de faciliter l’accès aux
connaissances produites par les différentes structures du groupe de la
Banque mondiale.
Les principaux vecteurs de cette politique en seront les Centres Publics
d’Informations (CPI). Ouverts au grand public, ils permettent la
consultation de bases de données en libre accès, ainsi qu’une multitude de
documents sur les projets en cours ou achevé, l’état de leur progression,
etc.

Après avoir longtemps été plutôt opaque dans ce domaine, la Banque mondiale
lance une campagne de communication tous azimuts, et vise la transparence.
La quasi-totalité des rapports et des dossiers élaborés sont publiés. A
l’exception des «documents dont la divulgation pourraient avoir des
répercussions négatives sur la stabilité des Etats». Est ainsi disponible
sur internet la liste de tous les projets financés par la Banque, avec tous
les détails y afférents, tels que les sommes décaissées, les montants
restants…

«Jadis, les sociétés civiles de différents pays nous rendaient responsables
des sommes dépensées», a affirmé lors d’un séminaire à Casablanca, M. Karem
El Sharkawy, responsable des relations extérieures de la Banque mondiale
pour la région Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord). En 1993, il a été
décidé de favoriser la plus large divulgation de l’information pour couper
court aux controverses. Il s’agissait de viser la plus large audience pour
«responsabiliser» les différentes parties. Mettre les rapports à la
disposition du public permet à celui-ci de quasiment assurer le suivi des
investissements. C’est ce qui se passe en Argentine, par exemple, dans le
cadre du programme SEPA (savoir en langue espagnole) : des ONG surveillent
le bon déroulement des programmes et rentrent tous les chiffres concernant
les projets dans une base de données, librement disponible sur internet.

Dans sa collecte d’informations, la Banque mondiale ne se limite pas à
celles fournies par les pouvoirs publics. L’organisme multiplie les contacts
avec les ONG et les représentants de la société civile, particulièrement au
Maroc. Et c’est aussi dans ce pays qu’est basé le bureau principal, chargé
de la coordination des actions sur tout le Maghreb. Au Royaume Chérifien,
l’organisation semble de plus en plus liée avec le tissu associatif local.
Lors d’une conférence à Casablanca, l’institution financière avait ainsi
invité le juriste Abdelaziz Nouidi, connu pour son projet de nouvelle
constitution marocaine. A la demande de Transparency Maroc (filiale de
Transparency International), il vient par ailleurs de publier son rapport
sur le droit du citoyen à l’accès aux données publiques.

La Banque mondiale semble avoir développé une expertise en la matière. M.
Karem El Sharkawy nous apprend que l’organisation internationale a ainsi été
mandatée par les gouvernements égyptien et syrien pour «favoriser la
communication entre gouvernants et gouvernés». Une première, donc, puisque
la Banque mondiale en vient à répondre à la demande des Etats, pour leur
permettre d’établir des liens avec leur propre population. Et on n’est pas à
un paradoxe près. Selon Mme Danforth, et toujours dans le même cadre, les
différents classements publiés par la Banque mondiale ne peuvent être pris
au pied de la lettre. Le fameux «Doing Business», par exemple, qui a tant
fait coulé d’encre, ne prend pas en compte la sécurité des biens et des
personnes, ni l’état des infrastructures. «Il a pour objet de susciter les
débats. Il faut s’en servir pour éliminer les obstacles à la croissance. Son
rôle est surtout incitatif, et doit pousser les décideurs politiques à faire
des efforts».

La transparence serait ainsi devenue l’un des principaux chevaux de bataille
de la Banque mondiale. Ce qui n’empêche pas l’institution financière de
rester particulièrement sensible à son image de marque. Lors de ce séminaire
casablancais, par exemple, Mme Najet Yamouri, responsable principale de
communication pour le Maghreb, a, par exemple, exigé de lire de toute
interview avant sa publication. Avant que l’équipe n’élude finalement toute
idée de confrontation aux questions des journalistes présents. La
transparence s’avère être un idéal difficile d’accès.