L’ex-géant russe du pétrole Ioukos placé en liquidation judiciaire

 
 
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Un garde de sécurité à côté d’un logo de Ioukos, le 18 juin 2004 à Moscou (Photo : Denis Sinyakov)

[01/08/2006 21:20:20] MOSCOU (AFP) Le tribunal d’arbitrage de Moscou a prononcé mardi la liquidation judiciaire de Ioukos, l’ancien numéro un du pétrole russe, mettant le point final à une longue descente aux enfers considérée comme orchestrée par le Kremlin.

La Cour “reconnaît la cessation de paiements et lance une procédure de liquidation judiciaire”, a déclaré le juge Pavel Markov après moins d’un quart d’heure de délibérations, concluant à l’insolvabilité du groupe après une série massive de redressements fiscaux.

“C’est la peine de mort pour la compagnie”, a asséné un des avocats de Ioukos, Drew Holiner, devant les journalistes.

Le juge a précisé que la procédure de liquidation devait durer un an et a nommé Edouard Rebgoun, actuel administrateur judiciaire de la compagnie, liquidateur du groupe.

A la sortie du tribunal M. Rebgoun a précisé que “tous les actifs de la compagnie” seraient vendus, ne laissant aucun doute sur la disparition de la compagnie pétrolière.

“Il n’y a aucun doute que tous les actifs seront vendus et à un prix plus bas que celui du marché”, a renchéri M. Holiner, précisant que la direction du groupe allait certainement faire appel de cette décision.

“Toutes les actions qui ont mené à cette faillite ont déjà été contestées devant la Cour européenne des Droits de l’Homme”, a-t-il également souligné.

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Le portrait de l’ancien PDG Mikhaïl Khodorkovski au siège de Ioukos, le 31 octobre 2003 à Moscou (Photo : Yuri Kadobnov)

Le 25 juillet, les créanciers du pétrolier, essentiellement le fisc russe, avaient voté à une majorité écrasante contre le plan de sauvetage présenté par la direction, et pour la mise en liquidation de la compagnie.

Ils se sont alignés sur l’avis de l’administrateur judiciaire qui estime que la valeur des actifs (17,7 milliards de dollars selon lui) est insuffisante pour couvrir les 18,3 milliards de dollars de dettes du groupe.

Les analystes estiment de leur côté les actifs du groupe autour de 30 milliards de dollars, alors que la compagnie continue à extraire près d’un demi million de barils de brut par jour sur fond d’envolée des cours du pétrole.

Au tribunal, Tim Osborne, directeur financier du holding GML (ex-Menatep) et représentant des actionnaires principaux du groupe, a de nouveau mis en doute les conclusions de l’administrateur.

“On n’a pas besoin d’être un expert financier pour comprendre qu’une compagnie qui a des actifs de 38 milliards de dollars et des dettes de 18,5 milliards n’est pas insolvable”, a-t-il déclaré dans une lettre lue devant la cour.

M. Osborne a qualifié cette procédure de “façade destinée à créer une apparence de légalité”.

Ioukos a entamé sa descente aux enfers en 2003 avec des redressements fiscaux massifs et une vaste offensive judiciaire considérée comme orchestrée par le Kremlin contre ses propriétaires, à commencer par son Pdg, Mikhaïl Khodorkovski.

M. Khodorkovski, ex-première fortune de Russie, et son associé Platon Lebedev, ont été condamnés à des peines de huit ans de prison pour fraude fiscale et escroquerie.

L’affaire Ioukos est considérée comme inspirée par le Kremlin pour neutraliser M. Khodorkovski, un adversaire politique potentiel, et permettre un transfert d’actifs juteux vers des groupes proches du pouvoir.

Les repreneurs sont déjà en embuscade pour acquérir les derniers joyaux du groupe, ex-numéro un du pétrole russe.

Le géant gazier russe Gazprom, contrôlé majoritairement par l’Etat, a manifesté son intérêt pour les 20% que Ioukos détient dans le groupe pétrolier russe Gazprom Neft (ex-Sibneft).

Le groupe Rosneft, également majoritairement public, et qui a prospéré après avoir acquis dans des conditions troubles à l’issue d’une saisie judiciaire la principale filiale de Ioukos, vise pour sa part les raffineries du groupe.

Mais ce sont les dernières filiales de production de Ioukos, Tomskneft et Samaraneftegaz, qui produisent quelque 5% du brut du brut extrait en Russie, qui devraient être les plus disputées.

 01/08/2006 21:20:20 – © 2006 AFP