L’économie américaine regarde avec inquiétude les violences au Proche-Orient

 
 
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Le président de la Fed, Ben Bernanke, à Chicago le 15 juin 2006 (Photo : Peter Thompson)

[14/07/2006 21:13:29] WASHINGTON (AFP) Les économistes américains voient avec inquiétude la situation se dégrader au Proche-Orient, craignant un atterrissage brutal de la croissance aux Etats-Unis avec la flambée des prix du pétrole.

La crise est d’autant plus menaçante qu’elle coïncide avec une phase de ralentissement de l’économie américaine, qui doit réussir à passer la vitesse inférieure sans caler au passage.

“Les événements géopolitiques peuvent-ils transformer l’atterrissage en récession? Absolument” estime Bernard Baumohl de l’Economic Outlook group.

“L’escalade des violences au Proche-Orient et la hausse des taux d’intérêt dans le monde amènent à se demander si les Etats-Unis connaîtront un ralentissement beaucoup plus marqué au second semestre”, selon lui.

La spirale de violence qui s’est accélérée depuis mercredi a déjà eu un effet sur le pétrole, faisant bondir le cours du baril au-delà de 78 dollars avant un léger retrait en clôture vendredi.

Les conséquences pour l’économie américaine risquent d’être multiples.

D’abord par le biais de la consommation, car les voitures américaines absorbent à elles seules 11% du pétrole mondial. Toute hausse des prix de l’essence vient amputer le pouvoir d’achat des consommateurs américains, par ailleurs lourdement endettés.

Vendredi le département du Commerce a annoncé que les ventes de détail avaient reculé de 0,1% en juin.

“Les consommateurs rognent sur leurs dépenses et avec la flambée des prix du pétrole, ce phénomène risque de se répéter”, estime l’économiste indépendant Joel Naroff, pour qui “cela n’augure rien de bon pour la consommation”.

Or les dépenses de consommation représentent près des trois quarts de la croissance aux Etats-Unis. Si les Américains arrêtent de dépenser, c’est l’économie tout entière qui en paie le prix.

“Le second semestre pourrait être plus faible que beaucoup ne le pensent. Ce ne sera pas la récession, mais ce ne sera pas rose non plus”, estime M. Naroff.

La flambée des cours du pétrole menace aussi la stabilité des prix.

“Les conditions des marchés pétroliers vont continuer de faire grimper l’inflation”, avertit Peter Morici, professeur d’économie à l’université du Maryland.

Mi-juin le président de la Réserve fédérale (Fed) Ben Bernanke s’était inquiété des conséquences de l’énergie chère, jugeant qu’une forte hausse des prix pouvait “à la fois ralentir la croissance et augmenter l’inflation”.

Pris entre deux feux, les économistes craignent que M. Bernanke ne choisisse de lutter contre l’inflation, notamment parce que le nouveau président de la banque centrale américaine veut asseoir sa crédibilité.

Cela signifie qu’il risque de remonter encore les taux directeurs.

Or “de nouvelles hausses de taux ne feront qu’augmenter les risques d’un passage très déplaisant par la stagflation”, en donnant un coup de frein à la croissance, estime M. Morici.

L’économie risque aussi de payer le contre-coup des violences au Proche-Orient par une perte de confiance des investisseurs.

En trois jours, le Dow Jones a perdu près de 400 points, et “il est très difficile d’estimer où se situe le niveau plancher d’un marché en cas d’escalade des tensions”, estimait Frederic Dickson, stratège chez D.A. Davidson and Co.

Une chute de la bourse atteint les Américains directement au portefeuille dans un pays où l’actionnariat populaire est très répandu.

“La persistance de l’essence chère, associée à une baisse des cours boursiers et une perte de confiance ramènera la croissance des dépenses de consommation à 2,7% au deuxième semestre”, prédit Brian Bethune de Global Insight.

 14/07/2006 21:13:29 – © 2006 AFP