Innovation et libéralisation des services en Tunisie

Par : Autres

Par Kley Visentin, Consultant en stratégie d’entreprise

info@mkc-consulting.com

 


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kley11052005.jpgLa
Tunisie est en plein processus de construction de son potentiel
d’innovation. Un fort investissement dans les universités, les laboratoires
de recherche et la création de plusieurs parcs technologiques spécialisés
dans différents domaines illustre les efforts déployés dans ce sens.
Malheureusement, le potentiel d’innovation, et en particulier au niveau du
secteur TIC, reste en deçà des objectifs ambitieux de la Tunisie, en
particulier quand il s’agit de se comparer aux pays industrialisés.

 

Si on prend comme critère d’évaluation du potentiel d’innovation, le nombre
de brevets déposés, nous remarquons que la contribution des entreprises
tunisiennes aux «brevets» enregistrés en Tunisie1 est resté
marginale. Entre 1984 et 1994, sur un total de 1720 brevets, seulement 285
brevets (16,6%) ont été déposés par des sociétés locales, le reste émanant
d’entreprises étrangères. La petite taille des entreprises, ainsi que la
protection du marché local sont les deux principaux motifs qui expliquent le
faible niveau «inventif» des entreprises tunisiennes. De plus, le budget
alloué jusqu’en 2004 pour l’investissement dans la R&D était relativement
faible en valeurs relative et absolue, à savoir moins de 1% du PIB2.

 

A titre de comparaison, le budget total du Royaume-Uni pour 2004-2005 est de
3.901$ milliards pour la R&D, soit environ 2% du PIB et il va grimper à 2,5%
durant cette décennie3, et la Finlande investit 3,5% de son PIB
en R&D. La moyenne d’investissement dans les pays de l’OCDE est de 2,15%.
L’Australie prévoit d’investir plus que 5.3$ milliards pour les 5 prochaines
années (8,3$ milliards de 2001 à 2011) pour la science et l’innovation.

 

1- L’accès à la «société du
savoir »

 

A notre sens, le facteur le plus
important pour le développement de la Tunisie n’est pas le niveau
d’investissement étranger qu’elle attire chaque année. Un investissement
massif qui ne fait appel qu’à une main d’œuvre bon marché serait contre
productif à terme. Le vrai investissement «stratégique» est celui qui permet
de renforcer la capacité locale de développement de produits innovants.
L’innovation étant le processus qui permet de hisser plus haut le niveau de
compétitivité globale du pays.

 

C’est là que la libéralisation
joue un rôle clé pour réduire les coûts et accentuer les processus
d’acquisition, d’apprentissage et d’implémentation des technologies et des
meilleures pratiques qui lui sont associées dans des pays industrialisés.

 

L’innovation en Tunisie ne
sera pas possible sans un large accès aux marchés internationaux, et l’accès
à ses derniers ne sera pas possible sans l’élimination des barrières
commerciales.

 

 

___________________

1 National Innovation
Systems Overview and Country Cases. Stephen Feinson.

2 En 1994, les
investissements dans R&D était de 0.27% du PIB, avec des entreprises privées
qui comptent 6.8%.

3 Australia
announcement: May 6, 2004; UK announcement: July 12, 2004.

 

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2- Rôle de la libéralisation
dans le développement de l’Innovation Technologique

 

Pour la Tunisie,
la libéralisation des services ouvre les portes à la technologie et aux flux
de savoir, qui sont impossibles à obtenir autrement (sauf s’ils sont
développés à nouveau de zéro). En particulier, les possibilités offertes
pour l’admission et le séjour temporaire sur le territoire national de
personnes étrangères sont déterminantes dans ce contexte, à cause du
caractère tacite d’une grande partie du savoir, incrusté dans l’esprit
humain, et difficile à transférer sans déplacements physiques.

 

Dans le but de comprendre l’impact de
la libéralisation des services sur la capacité d’innovation tunisienne, il
est nécessaire d’analyser la liaison entre les différents modes
d’approvisionnement et le processus d’innovation.

 

Dans le
présent article, le processus d’innovation sera analysé à travers les trois
points de vue suivants :

 

innovation09052005.jpg
l’acquisition d’une technologie étrangère,


l’utilisation interne et la diffusion de la technologie, et


l’amélioration et le développement de la technologie.

 

 

3- Acquisition et
transfert de technologies

 

La
technologie peut être acquise de deux manières4 : un
investissement direct étranger; ou une acquisition de licence étrangère.
L’investissement direct étranger implique la présence commerciale à travers
l’établissement en Tunisie de sociétés filiales, ou en joint venture. Le
déplacement du personnel étranger pour travailler dans l’entreprise locale
est un élément critique, puisque celui-ci fournit une assistance et une
expertise pour implémenter de nouvelles technologies. L’accès aux
prestations de service à l’étranger pourrait aussi être tout aussi
importante dans le cas où les employés tunisiens auront à voyager à
l’étranger pour suivre une formation spécifique pour renforcer leurs
compétences. Les deux modes de fourniture des services –cf. tableau
récapitulatif des modes de fourniture des services selon l’OMC- présentent
une source importante de connaissances théoriques et pratiques.

 

Le
gouvernement tunisien peut influencer ces acquisitions de savoir et d’outils
technologiques de différentes manières. En relaxant la politique
d’investissement locale et étrangère, et en fournissant des programmes
d’incitations sélectifs pour améliorer le niveau d’acquisition de
connaissance dans les services à haute valeur ajoutée, qui s’appuie
fortement sur l’innovation tels que les secteurs TIC et santé.

 

 

 

 

 

___________________

4
La contrefaçon des marchandises étrangères n’est pas considérée dans cette
étude. C’est la méthode de transfert de savoir la plus risquée puisqu’elle
pourrait s’avérer très chère (similaire au coût de l’innovation) d’une part,
et nuire aux relations commerciales en révélant les droits de l’auteur
intellectuels des partenaires.

 

 

 

09- 05 – 2005 ::
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4- L’assimilation et
l’expansion des nouvelles technologies

 

Il y a deux
facteurs importants pour profiter entièrement des technologies développées,
acquises ou transférées. La capacité d’assimiler les nouvelles technologies,
d’une part, et la capacité d’étendre à de nouvelles applications des
technologies existantes, d’autre part.

 

L’assimilation
est reliée à la capacité de repérer, comprendre et utiliser les nouvelles
technologies, qu’elles soient d’origine locale ou internationale.

 

L’expansion
consiste en la capacité collective d’une industrie ou d’un secteur à adopter
à travers de nouvelles applications une technologie existante.

 

Le gouvernement
tunisien poursuit ces deux objectifs en créant des politiques et des
programmes qui poussent les entreprises locales à utiliser de nouvelles
technologies. Les certifications, les instances de normalisation, les
laboratoires de contrôle technique et de la qualité sont des exemples
typiques illustrant cette politique, appuyée par un programme de mise à
niveau qui a su impulser l’investissement technologique dans certaines
entreprises industrielles.

 

 

modes09052005.jpg

 

 

La
libéralisation des services joue un rôle direct en fournissant un moyen
d’accès aux ressources étrangères pour appliquer ces programmes et
politiques. La présence commerciale ou le déplacement des personnes
physiques deviennent ainsi critiques pour ramener des consultants, des
ingénieurs et d’autres professionnels spécialisés avec une expertise
internationale confirmée. Le transfert de savoir et connaissances se faisant
principalement à travers le contact direct avec les clients et fournisseurs
locaux.

 

5- Le
développement par les technologies

 

Bien que la
création dépende du niveau de formation et de l’orientation créative des
gens, la libéralisation de services pourrait jouer un rôle important dans la
motivation de l’innovation. Comme il a été mentionné ci-dessus, le
protectionnisme du marché interne tunisien a affecté considérablement les
stimuli pour l’innovation. Cependant, une forte rivalité entre les
entreprises et le contact avec des clients exigeants s’avèrent un catalyseur
de l’innovation, qui est perçu alors comme un avantage compétitif décisif.
La libéralisation de services peut encourager ces deux éléments de plusieurs
façons.

 

Tout d’abord,
ouvrir le marché aux fournisseurs étrangers augmente le niveau local de
compétition. Le besoin de survivre et prospérer dans ce nouvel environnement
pousse des entreprises locales à chercher de nouveaux moyens pour satisfaire
les besoins de leurs clients, et barrer la route aux nouveaux arrivants par
un meilleur positionnement stratégique. La question ici est dans quelle
mesure les entreprises tunisiennes sont capables d’être innovatrices, si
elles ne passent pas au préalable par «l’épreuve du feu» pour se rendre
compte de l’importance de l’innovation technologique.

 

Par ailleurs, le
marché «mondialisé» fournit des sources de valeurs sans cesse renouvelées et
des clients «solvables» de plus en plus diversifiés, exigeants et volatils,
mettant à pied d’égalité les compétiteurs qui ont les moyens de leurs
ambitions. Ceci devrait encourager les entreprises tunisiennes à miser sur
un esprit de conquête par l’innovation, dans des domaines bien ciblés et à
haut potentiel de rentabilité.

 

La
libéralisation des modes de fourniture des services 3 & 4 selon l’OMC, sera
également important à ce niveau. Seule une politique de libéralisation
plus téméraire pourrait fournir l’impulsion nécessaire à l’essor de
l’innovation en Tunisie.

 

Toutefois, l’un
des problèmes en Tunisie est le manque de masse critique des sociétés
leaders localement. Plus que jamais, les besoins des marchés internationaux
inciteront aux regroupements inter-entreprises et à une plus forte
collaboration public/privé.

 

 

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La connexion entre la libéralisation de services et l’innovation

 

6- Conclusion

 

Le développement
d’une stratégie nationale d’innovation, cohérente et consistante est
prioritaire. La Tunisie devrait s’inspirer de l’expérience de certains pays
comme le Canada, l’Afrique du Sud ou l’Australie, qui ont bien articulé leur
plan stratégique technologique pour promouvoir leur système d’innovation.

 

 

 

09- 05 – 2005 ::
09:30

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