Ahmed El Karam à webmanagercenter : La dette n’est pas un mal en soi

Par : Autres

    

Ahmed El Karam à webmanagercenter

La dette n’est pas un mal
en soi

   

Management &
Nouvelles Technologies – Magazine
On-Line : 14-07-2003 à
08:00

 

 


karam0703.jpgAhmed
El Karam est un ex-cadre de la banque centrale. Il y a fait ses premières
armes et les preuves de sa compétence, il a été ensuite recruté par l’Amen
Bank, à l’époque où il s’appelait encore le CFCT. Economiste confirmé, il
est maintenant le Vice-président Directeur Général de la plus importante
banque familiale et privée de la place.


Homme de communication, Ahmed El Karam n’a pas peur des mots pour exprimer
ses idées sur ce qui se qui se passe sur la scène financière nationale et
dans le secteur bancaire plus précisément.
Avec lui, nous avons évoqué l’épineuse question des crédits accrochés, du
rôle et de la responsabilité des banques. Mais aussi des meilleures moyens
et des obstacles qui pourraient entraver le règlement de cette question des
crédits accrochés.
Interview

Comme toutes les banques de la place, l’Amen Bank a
vu chuter son résultat net pour l’exercice 2002. Une baisse volontariste,
puisqu’elle vise essentiellement la couverture des risques et le
renforcement des fonds propres.

L’année 2003 aussi, débute avec des chiffres qui confirment la hausse des
crédits accrochés et la prise de risque continue des banques, dans une
conjoncture que tout le monde traite de pas bonne ou pour le moins, encore
instable. Pensez-vous que le secteur bancaire, lui-même encore en phase de
restructuration et de modernisation, puisse encore se permettre cette voie?

Il faut d’abord rappeler, que pour créer une économie nationale, il fallait
au début de l’indépendance miser sur un capital national qui n’existait pas.
Forcément, les risques pris par les banques étaient importants. On en voit,
jusqu’à maintenant, les conséquences.

Les choses ont radicalement changé, depuis l’introduction des règles
prudentielles et l’évaluation des risques est maintenant une préoccupation
majeure de toutes les banques. Il y a maintenant une plus grande sélectivité
en terme de choix de financement d’investissement et d’exploitation.

Reste que la Tunisie est passée en 2002 et je pense en 2003 aussi, par une
conjoncture difficile, provenant d’un environnement délicat, que ce soit
pour l’économie européenne ou l’économie américaine. Et cela se représente,
en terme de croissance, sur notre économie. Il est donc normal que certaines
affaires se soient fragilisées par cette conjoncture.

Pour ma part je demeure confiant et persuadé que ce n’est qu’une crise
conjoncturelle qui touche surtout le tourisme et l’industrie manufacturière.
Mon espoir est que 2004 sera meilleur et que nous puissions retrouver un
rythme de croissance normal de l’économie Tunisienne et par voie de
conséquence atténuer les risques rattachés au financement.

N’empêche que les banques ont pris l’initiative d’anticiper et de
privilégier, pour les années 2002 et 2003, la réservation des intérêts et la
constitution des provisions pour se constituer un matelas de sécurité qui
leur permettrait de faire face à tout éventuel aléa.

Cela n’empêche ! Le problème
des crédits classés se pose avec une acuité, de plus en plus grande pour les
entreprises de crédit; les grands groupes s’endettent de plus en plus auprès
d’un secteur bancaire qui se finance, en recourant à la BCT. Est-ce que
c’est encore la bonne voie ?

Les créances classées sont un encours qui découle d’une exploitation de
plusieurs années. C’est l’accumulation des efforts consentis par les
banques, durant les dernières décennies, qui se traduit inévitablement et de
manière prévisible par des créances accrochées. On ne peut pas financer le
développement et espérer que tout l’effort de financement se traduise par
des créances saines.

Le débat, à mon sens, est tout autre et ne se
pose pas à partir du constat des créances accrochées ! Aurions-nous pu avoir
le tissu industriel, la capacité hôtelière et les activités de services qui
sont aujourd’hui les notre, si nous n’avions pas agit ainsi, et pratiqué une
politique prudente et restrictive de financement ? Il ne faut pas
oublier non plus que tous les hommes d’affaires qui opèrent aujourd’hui sont
la création des banques. Certains ont été à la hauteur, d’autres ont
malheureusement mal tourné et c’est le propre de l’économie. Il ne faut pas
dramatiser mais traiter la question d’une manière pragmatique et là, le
changement de l’environnement des affaires peut nous aider.

A ce propos ! Vous étiez,
deux années en arrière, un fervent dénonciateur de la loi sur les
entreprises en difficulté que vous accusiez de refuge pour les mauvais
payeurs et d’entrave au processus de recouvrement des créances accrochées.
L’êtes-vous encore ? Est-ce qu’il y a une autre voie ?

Absolument ! Il suffirait pour cela de
réaménager et de mettre de l’ordre dans cette loi que certains utilisent
pour organiser leurs faillites et laisser une ardoise importante chez les
fournisseurs et les banques.

Il est normal d’aider les entreprises en
difficultés. Mais encore faut-il que ce soit celles qui sont réellement en
difficulté. De là à faire de ce cadre généreux de la part de l’Etat, un
refuge pour ne pas faire face à ses obligations, il y a un pas à ne pas
franchir. On doit rapidement stopper cette hémorragie et ne pas donner un
mauvais exemple et de mauvaises idées aux bons payeurs. Il y va de la survie
de l’économie du pays que de réhabiliter la confiance entre les banques et
les entreprises et de réhabiliter le respect de l’engagement. Les
banques sont disposées à étudier la question de ces crédits, au cas par cas
et trouver les solutions appropriées, en terme de rééchelonnement,
d’abattements d’intérêts de retard, de soutien complémentaire ou de
recherche de partenaire. Mais tout cela suppose la transparence et la
volonté réelle de sauver les affaires.

Ne pensez-vous tout de même
pas que les banques prennent plus de risque qu’il n’en faut avec certains
groupes, qu’elles le font en dehors de toute concertation et sans la
désignation d’une banque chef de file, comme le leur demande la BCT ?

On peut toujours améliorer l’organisation. La concertation existe, mais elle
n’est pas techniquement formalisée et c’est ce qu’il faudrait faire. Je
pense quand même que cette question des groupes est à traiter avec beaucoup
de doigté et ne pas la limiter à l’endettement.

Pour faire faire du développement dans une économie libéralisée, vous êtes
obligé de faire de l’accumulation de capital. Une accumulation qui doit se
faire entre les mains de certains patrons de l’industrie, du tourisme et des
services et qu’il faut bien choisir, sur la base de leurs compétences, leur
transparence et leur sens de l’organisation et miser sur eux pour construire
l’économie.

Quitte à les endetter ?

La dette n’est pas un mal en soit. C’est même un acte qui s’inscrit dans
l’ambition de l’être humain. Ce qu’il faudrait approfondir, c’est l’usage
que font ces groupes des financement qui leurs sont alloués.

La banque a-t-elle les moyens
de vérifier cela ?

Nous avons des structures de suivi de plus en plus performantes et qu’on
développe. Avec la concertation, il est possible d’orienter le financement
vers l’objectif escompté. Créer un chef de file ne veut en tous cas pas
dire, limiter le financement aux groupes, mais plutôt organiser le
financement, assurer un meilleur suivi, qui soit collégial pour que les
décisions soient homogènes.

L’AMEN BANK vient
dernièrement de signer un contrat avec la société française STERIA pour
l’acquisition d’un nouveau système d’information. Pourquoi et dans quel
objectif ?

Les évolutions que connaissent actuellement les modes de communication en
matière d’internet, les changements opérés dans les logiciels informatiques
ainsi que les modernisations intervenus dans le métier de banquier et les
exigences de la clientèle d’une qualité d’information irréprochable et d’un
service de plus en plus rapide, nous ont en effet amené à moderniser le
système d’information de la banque.

Deux options s’offraient à nous. Soit de continuer à développer des
logiciels maison, conçus et réalisés par nos équipes d’informaticiens, soit
acquérir une solution de global banking. Nos études ont opté pour cette
dernière solution, rapide à installer, qui nous place immédiatement dans les
standards internationaux d’information et nous permette les évolutions, les
adaptations et l’intégration, le cas échéant, de nouveaux produits.

Qu’est-ce que cette solution
de global banking, apportera de nouveau pour votre clientèle ?

Si on avait à donner une définition à la banque, on dirait que c’est “des
hommes et des femmes compétents, appuyés par un système d’information
performant”. Cela voudra dire, pour notre client, une collecte et une
transmission de l’information en temps réel, une rapidité dans la prise de
décision, une intégration de toutes les fonctions de la banque et une
disponibilité d’une masse d’informations par client pour consacrer
l’approche de la gestion de la banque, non pas sur la base du compte, mais
sur la base du client qui sera au centre de notre système d’information.

Cette solution STERIA, c’est
un investissement de combien pour la banque ?

Il est assez important, puisqu’il concerne l’achat de la licence, sa mise à
jour, l’achat d’équipements informatiques et des logiciels d’accompagnement.
Son coût se situe à quelques millions de dinars.
 

14-07-2003


Khaled
BOUMIZA

 

 


Lire aussi :

Amen
Bank, première banque privée tunisienne, choisit Steria pour
l’intégration de son nouveau système bancaire multicanal

(communiqué de presse – 10 juin 2003).